Fyctia
Chapitre 19 - ARIANA
« Nous avons tous un ange gardien qui nous relève lorsque nous tombons. » (Isabelle SARTER-TISNE)
- Excuse-moi ?
- Pourquoi tu es venue à mon secours ? Je pensais que tu ne voulais plus me voir.
C’est tellement dur de ne pas laisser parler mon cœur. Je me sens obligée de lui avouer la vérité :
- A la base, j’étais venue pour taper le punching-ball. J’avais besoin de me défouler un peu…pas mal de stress ces derniers temps.
L’ascension du groupe entraîne de plus en plus de critiques sur les réseaux. J’ai beau savoir que ça fait partie du jeu, ça m’affecte et je passe des heures à effacer les commentaires négatifs.
- Quand je t’ai vu, tu n’avais vraiment pas l’air bien. J’ai hésité mais mes jambes m’ont porté vers toi avant que je ne prenne une décision. Quand j’ai lu cette souffrance dans tes yeux, je ne pouvais pas te laisser comme ça.
- Merci de ton honnêteté et merci d’être là, avec moi.
J’aimerais lui dire que je serai toujours là. Vraiment n’importe quoi.
- Tu veux en parler ?
- De quoi ?
- De la raison pour laquelle tu étais si mal.
Il semble hésiter puis dit simplement :
- Mon père.
- Il t’a fait du mal ?
- Il ne m’a pas blessé physiquement, mais c’est à cause de lui que j’ai frappé dans le mur puis dans ce punchingball. Sans gant.
Il me raconte sa discussion houleuse avec son père et je suis choquée. Mon père n’a pas toujours été facile mais celui de Jacob est horrible. Il ne mérite pas ça, je le sais.
- Toute cette colère que je n’arrive pas à maîtriser, je sais que ça vient surtout de lui. Depuis que je suis gosse, il s’énerve pour tout et rien. Le soir, quand il rentrait du travail, on appréhendait son humeur. Quand elle était mauvaise, ma sœur et moi, on se faisait engueuler.
- Ça n’a pas dû être facile…
- Non, mais on était habitués. Pour mon père, je ne suis qu’un idiot. Il me l’a tellement répété que j’ai fini par le croire.
- C’est horrible. Et ta mère ne dit rien ? Et ta sœur ?
- Ma sœur subissait la même chose que moi, voire plus vu qu’elle est l’aînée. Ma mère nous défend mais rien ne peut faire changer d’avis mon père.
Il inspire et je sens que c’est difficile pour lui. Je lui prends la main pour lui montrer mon soutien. Il entrelace ses doigts aux miens et une vague de chaleur m’envahit.
- J’ai…j’ai l’impression que je suis en train de lui ressembler. J’ai peur qu’il ait fait de moi exactement ce que je ne veux pas être.
Je serre plus fort sa main. Je n’aurais jamais imaginé qu’il portait un tel poids sur ses épaules. L’année dernière, j’avais déjà senti qu’il portait un lourd fardeau mais j’en ignorais la cause.
- Je pense que tu devrais montrer à ton père la personne que tu es vraiment. Tu n’es absolument pas comme lui.
- Comment tu le sais ? Tu l’as dit toi-même, on ne connaît pas quelqu’un avec des souvenirs d’enfance et une soirée.
- C’est vrai mais je pense qu’on peut savoir rapidement si une personne est bonne ou mauvaise. J’ai toujours pensé que tu étais quelqu’un de bien. Même quand tu étais énervé sur le balcon l’autre soir. J’ai vu que tu étais quelqu’un de gentil, attentionné et profondément bon.
- Merci à toi, vraiment...Mais j’ai peur de te décevoir.
- Pourquoi ?
- Tu as une image de moi tellement positive. Je crains de ne pas être à la hauteur et que tu découvres que je ne suis finalement qu’un connard colérique.
- Je ne vois pas comment je pourrais le penser. Même si c’était le cas, mon avis est-il si important ?
Il se tourne vers moi et prends ma deuxième main dans la sienne. Il m’adresse ce sourire en coin susceptible de me faire fondre à tout instant.
- Ton avis compte énormément, Ariana. Et je…
Nous sommes interrompus par le médecin.
- Monsieur Boudoir ? Je vais examiner votre plaie.
- Si tu veux partir, vas-y. Je ne voudrais pas que tu rates ton concert, me dit-il avant de suivre le médecin.
Je regarde l’heure. Le concert commence dans deux heures. Je n’aurais peut-être pas le temps de me préparer mais je n’aime pas l’idée que Jacob rentre seul après les émotions de la journée. Il compte déjà plus pour moi que je ne veux bien l’admettre. Pendant que je patiente, je tiens au courant le groupe. Je leur dis que je suis partie prendre l’air pour me détendre et que je rentre vite. Si je leur dis la vérité, j’ose à peine imaginer leurs réactions, surtout celle de Bruno. Au bout d’une demi-heure, Jacob revient, un pansement autour des doigts. Je le rejoins et le sourire qu’il m’adresse vaut la peine d’avoir attendu.
- Tu avais raison, il a fallu des points de suture.
- J’ai peut-être manqué ma vocation. Comment tu expliqueras cette blessure à tes parents ?
- Je leur dirai que j’ai voulu défendre une demoiselle en détresse.
- Dans le cas présent, c’est plutôt toi le damoiseau en détresse, dis-je en riant.
Nous arrivons à la voiture et je démarre.
- J’ai décidé de ne plus me soucier de l’avis de mon père.
- C’est une bonne chose.
- Quand le médecin s’occupait de moi, j’ai pensé à ce que tu as dit. Tu as raison, je vais prouver à mon père et à moi-même que je suis quelqu’un de bien. Quelqu’un de bien qui pourrait être digne de toi…
Ces derniers mots me bouleversent.
- Ne dis pas ce genre de choses, Jacob. Surtout quand je suis au volant. Et tu as une petite amie.
- Excuse moi, dit-il en riant. Dans une autre vie, je devais être le personnage d’un film à l’eau de rose.
- Oui certainement.
Un silence s’installe et je sens qu’il a encore quelque chose à dire. Du coin de l’œil, je le vois jouer avec la manche de sa chemise bleue.
- Je suis prête si tu as encore une phrase niaise à me sortir.
Il pose sa main sur ma cuisse, provoquant une décharge dans tout mon corps.
- J’ai besoin de toi pour m’aider à être l’homme que je veux être.
- Je ne vois vraiment pas en quoi je peux t’aider.
- Tu l’as déjà fait et tu le fais encore aujourd’hui. J’ai l’impression que tu es la seule personne à qui je peux me confier et devant laquelle je n’ai pas besoin d’être parfait.
Ces paroles me touchent, j’aimerais tellement l’aider. Au feu rouge, je le regarde et je remarque un tatouage de loup sur son avant-bras droit. Mon cœur en est bouleversé.
- Oui, j’ai fait ce tatouage le lendemain de notre soirée. Tu peux me prendre pour un fou, je pense l’être un peu.
Il l’est, c’est sûr. Mais je suis tellement touchée. Cette soirée l’a donc autant marqué qu’elle m’a marqué ?
- Si j’accepte, il faut que tu me promettes que ça restera amical, que tu n’essaieras pas de me séduire.
- Tu sais aussi bien que moi que, nous deux, ça ne pourra jamais être qu’une simple relation amicale.
- Il faut que ça le soit. Moi aussi, j’aime te parler et me confier à toi. J’ai envie de t’aider. Mais ça doit rester amical.
- Ça va être difficile mais d’accord.
- Parfait.
Parfait, on en est loin mais c’est la seule façon pour moi de ne pas souffrir, même si lui résister sera très difficile.
6 commentaires
ninaracely
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Il y a 3 mois
Salma Rose
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Il y a 3 mois
Zatiak
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Il y a 3 mois
BettySophie
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Il y a 3 mois
Dine79
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Il y a 3 mois
BettySophie
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Il y a 3 mois