Fyctia
Chapitre 12 - JACOB
« La distraction est nuisible lorsqu’elle se glisse là où nul ne peut se figurer sa présence. » (Jacques NTEKA BOKOLO)
1 an plus tard...
- On arrive bientôt ? Je meurs de chaud !
L’Audi noire de Mathilde luit sous le soleil du mois de juillet, à Montpellier.
- Tu vois bien qu’il y a des bouchons, je réponds. Je t’avais dit de te préparer plus vite.
Mathilde soupire. C’est son truc préféré, soupirer. Mathilde, c’est ma « fausse petite amie ». Je l’ai rencontré à une soirée arrosée il y a quelques mois et ça a bien matché. Je l’ai défendu face à deux gros lourds qui l’emmerdaient. Ça s’est fini en bagarre mais Mathilde m’a largement remercié.
- N’empêche, dit-elle, si tu ne t’étais pas bagarré et si tu n’avais pas fini en cellule, je ne serai pas en route pour cet hôtel de luxe à la reconquête de l’amour de ma vie.
Oui, j’ai fini au poste après la bagarre. Mathilde a prévenu mon père qui a payé ma caution. Elle a pris ma défense face à lui en lui expliquant que je l’avais sorti d’une mauvaise passe. Mon père s’est fait amadouer par cette fille, surtout quand il a su qui elle était. Elle est la fille aînée de la principale famille concurrente à sa chaîne hôtelière. C’est Mathilde De la Rivière. Il n’a jamais été aussi fier de moi d’avoir trouvé une fille comme elle. Son comportement envers moi a changé. Il m’a félicité pour mon travail sérieux et il m’a proposé d’être son adjoint au sein de son nouvel hôtel « Le Magnifique » . Rien que ça. Ces deux mois d’été doivent être un test pour savoir si j’en suis capable. Je pense en être heureux mais je sais que ce n’est pas une proposition désintéressée. Il a un cerveau d’homme d’affaire bien trop fourbe.
- Profite de cet été, Mathilde. Surtout, rappelle-toi, tu peux te rapprocher de ton ex mais le plus discrètement possible. Mes parents, surtout mon père, doivent croire qu’on est vraiment ensemble.
Ni Mathilde ni moi ne voulions être dans une vraie relation. Nous nous sommes mis d’accord : nous faisons semblants d’être en couple pendant l’été pour qu’elle puisse essayer de récupérer son ex, barman au « Magnifique » et que je puisse prouver à mon père que je suis capable de gérer des tâches plus importantes dans l’hôtel. Je veux tellement son approbation et sa reconnaissance que je suis prêt à tout.
- Ne t’inquiète pas mon bichon, je vais être discrète. Ma seule présence devrait suffire à ramener ce beau gosse de Lucas vers moi. Et il va être jaloux de toi, c’est sûr.
- J’avoue que ce boulot va me changer du ménage et de la maintenance. J’espère être à la hauteur.
Je suis faible et paumé donc rien n’est moins sûr, mais ça vaut le coup d’essayer. Ça fait un an que je patauge dans ce travail qui ne me plait pas et que je me sens de plus en plus mal dans ma vie. La seule chose que j’ai réussi à faire durant cette année, c’est écrire une ébauche de roman que j’ai envoyé dans plusieurs maisons d’éditions. J’attends une réponse positive, sans trop d’espoir. Si cet été se passe bien, je resterai sûrement dans l’hôtellerie finalement et ce ne sera peut-être pas si mal.
- Tu vas gérer, me dit Mathilde. Et si ça ne va pas, compte sur moi pour te consoler comme je sais si bien le faire.
Elle dépose un baiser langoureux sur ma joue et sa main descend sur mon entre-jambe. Etre en faux couple n’empêche pas les bonnes parties de sexe. Mathilde sait parfaitement s’y prendre. Malgré tout, je n’arrive pas à oublier Ariana. Quand je suis triste et en colère, ce qui est fréquent, je pense à elle. Dans mon roman, c’est d’elle que je parle. Après tout, c’est elle qui m’a donné l’idée d’en écrire un. Après notre soirée idyllique et cette nuit qui hante encore mon esprit, j’ai eu l’espoir qu’Ariana reste et reconsidère son choix de ne m’accorder qu’une nuit. Hélas, tout ce que j’ai trouvé à mon réveil est un mot sur lequel était noté : « Merci pour cette soirée parfaite mais ça ne peut rester qu’une soirée. Adieu Jacob. Je t’en prie, ne cesse jamais de croire en tes rêves. N’essaie pas de me retrouver. Bises. » Ce mot m’a fait descendre de mon nuage et toute la colère mise en sourdine à ses côtés est remontée à la surface. J’ai mis ma chambre en vrac pour me défouler et j’ai frappé dans le mur. Je lui en voulais autant que je m’en voulais. Elle m’avait prévenu que ce ne serait qu’une soirée et bêtement, j’ai envisagé un avenir pour nous. Je n’ai pas cherché à la retrouver, respectant sa demande. J’étais décidé à l’oublier et à reprendre le cours de ma vie. Mais ça s’est avéré bien plus difficile que prévu. C’est fou comme une seule soirée a rendu cette fille si importante pour moi. Le lendemain, je me suis même fais tatouer un loup sur l’avant-bras et j’ai adopté un chien dans le mois qui a suivi. Le mec à l’ouest, vraiment. Franchement, on aurait dit un psychopathe. Mathilde s’est avéré être une distraction nécessaire.
- Hâte de faire la fête et de faire baver Lucas de jalousie. Mais tu devras te montrer beaucoup avec moi si tu veux que notre plan fonctionne.
- J’aurai du boulot aussi…
- Tu vois très bien ce que je veux dire. Tu as tendance à t’isoler pendant des heures. Il faut qu’on montre à tous qu’on est un vrai couple presque prêt à se fiancer.
Je lui promets. Quand je m’isole, c’est pour écrire évidemment. Pas forcément le roman, mais toujours mes pensées torturées dans mon journal. Ecrire ce que j’ai sur le cœur m’aide à mettre des mots sur le mal-être qui est le mien. Dans ce carnet, je parle beaucoup d’Isabelle qui est revenue chez mes parents mais que je trouve toujours tellement triste. J’essaie de la faire rire et souvent j’y parviens, même si ça ne dure jamais. Je parle également de mon père qui est la personne que je déteste le plus. Je parle aussi d’Ariana sur quelques pages. Je me demande ce qu’elle devient, si elle va bien et si elle s’accepte plus. J’espère même que son groupe fonctionne toujours aussi bien. Quel imbécile ! Me promener avec Doudou, mon carlin beige au museau noir, est aussi une distraction nécessaire.
- Evidemment, interdiction de se battre, me dit-elle alors que nous arrivons à l’hôtel.
- Evidemment.
Ce ne sera pas simple avec tous les petits bobos qui vont pulluler mais c’est primordial que je prenne sur moi. J’aide Mathilde et Doudou à descendre et donne mes clés au voiturier. J’aurai bien fait le trajet jusqu’à l’hôtel en moto mais je n’aurai pas pu prendre mon chien et Mathilde voulait qu’on prenne son Audi, pour « faire bonne impression ». Bien que venir ici me donne la nausée, je suis satisfait de pouvoir dire que je peux y entrer la tête haute avec un rôle plus important. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle réapparaisse dans ma vie cet été là…
4 commentaires
Salma Rose
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Il y a 3 mois
Vana Aim
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Il y a 3 mois
Dine79
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Il y a 3 mois
BettySophie
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Il y a 3 mois