Fyctia

« Les choix que vous faites aujourd’hui seront vos bonheurs ou vos blessures de demain. » (Josiane COEIJMANS)

- Je pense que tu devrais aller te préparer, me dit Bruno en soulevant la couverture du lit, c’est le premier concert de l’été, on doit assurer.

Je m’étire et entreprends de me lever. Avant que je n’aie pu faire un pas, Bruno m’attire par la taille et me positionne sous lui.

- Qu’est-ce que tu fais ? lui dis-je en riant. Tu as dit qu’on devait se dépêcher.

- Oui mais te voir en petite tenue me donne d’autres envies.

Je souris et laisse Bruno m’embrasser. Nous ne sommes pas un couple, j’ai été claire là-dessus. Bruno m’a avoué être amoureux de moi à la fin d’un concert, quelques mois auparavant. Il m’a embrassé et m’a dit qu’il voulait qu’on soit ensemble. Ça m’a fait mal mais j’ai été honnête en lui disant que je n’éprouvais pas de sentiments amoureux pour lui. Il m’a proposé une relation « sex friend », espérant que les sentiments viennent avec le temps. J’ai longuement hésité à accepter car tout le monde sait que ça ne finit jamais bien. D’autant que ce déclic que j’attendais quand je rencontrerai la bonne personne, je l’ai déjà eu, l’été dernier… J’en ai eu marre de réfléchir et de penser à lui, d’autant que Bruno me plait beaucoup physiquement. Devant lui, j’arrive à me mettre à nue sans trop douter, je lui fais confiance. Nos parties de jambes en l’air sont fantastiques, en plus de nos confessions sur l’oreiller. Cependant, ça n’a rien à voir avec le moment intense et hors du temps passé avec Jacob. Je sais que je suis une personne horrible mais j’ai aussi accepté cette relation pour l’oublier. Je m’en suis voulu de m’être laissée aller aussi facilement à Jacob. Jamais je n’aurais dû baisser ma garde. Malgré tout, quand je repense à lui, je ressens un manque ainsi qu’une profonde nostalgie, teintés de colère. Contre lui car il savait qu’il me plaisait et il a su en jouer, mais aussi contre moi. Je m’en veux tous les jours depuis un an et je m’en veux surtout de regretter de ne pas être restée le lendemain matin. J’ai pris la fuite, par peur de ce que l’avenir ensemble pourrait nous réserver. Jacob est un séducteur et il m’a sûrement déjà remplacé. Je ne regrette pas mon choix…enfin, j’essaie de m’en persuader.

- On n’a pas le temps Bruno, dis-je en le repoussant quand je vois qu’il en demande plus. Tu l’as dit toi-même, on doit faire bonne impression.

Je traverse ma chambre d’hôtel pour aller dans un dressing mis à ma disposition. Je suis ébahie devant toutes ces robes, chaussures et bijoux tous plus beaux les uns que les autres. Il n’a pas fait les choses à moitié. Quand je dis « il », je parle de David, notre manager, qui est la raison pour laquelle notre groupe est dans cet hôtel grandiose. Il a été convaincu par notre prestation durant le concert du collège et nous avons continué à nous produire sur des petites et moyennes scènes, grâce à lui. Que ce soit dans notre ville, à Marseille ou encore à Montpellier et à Aix en Provence, je ne compte plus le nombre de salles où ma voix s’est élevée. Nous sommes aussi très présents sur Youtube et les réseaux. Ça m’effraie toujours mais David dit que c’est indispensable pour percer. Malgré tout, l’argent récolté en concert n’est pas suffisant pour vivre bien. Nous avons tous un petit boulot pour arrondir les fins de mois et payer la colocation. Au moment où on se demandait si David nous donnerait enfin une vraie chance de briller, un miracle est arrivé. Il s’est arrangé avec l’un de ses amis, PDG d’un des plus gros hôtels de Montpellier, l’hôtel « Le Magnifique ». Il nous a proposé un contrat pour les deux mois d’été. Il s’engage à financer notre premier album et une tournée si nous réussissons à les convaincre, lui et sa clientèle. Notre mission est d’animer les soirées dansantes de l’hôtel. La joie que j’ai ressenti face à cette proposition a été immense. Nous avons immédiatement accepté. Voilà pourquoi je m’apprête à monter sur scène ici ce soir pour la première fois.

- Tu es stressée ? me demande Bruno en me rejoignant.

- Un peu. On ne doit pas se louper ce soir.

- Il n’y a aucune raison. Ce n’est pas notre première scène, même si les gens de la « haute société », ne sont pas notre public habituel. Ta voix va les envoûter, surtout avec notre nouvelle chanson.

- David m’a dit de commencer par celle-là pour introduire notre groupe. J’espère vraiment être à la hauteur.

- Tu le seras. Comme d’habitude.

Il m’attire contre lui pour m’embrasser. Je me détends et profite de ce moment. L’heure de monter sur scène arrive et j’inspire profondément. Bruno serre ma main dans la sienne et je prends celle de Justine, qui prend celle de Christophe. J’entends une voix nous présenter et mon corps est parcouru de frissons. Cette voix…ça ne peut pas être lui. Bruno me tire de ma rêverie quand nous sommes annoncés et je le repère tout de suite, non loin de la scène. Jacob. Si j’avais su, je ne sais pas si je serai sortie de cette chambre et de cette étreinte avec Bruno…