BettySophie Renaissance ou comment ton amour m'a sauvé Chapitre 4 - JACOB

Chapitre 4 - JACOB

« La colère est ce genre de feu que vous allumez et qui brûle en vous. » (Thomas GATABAZI)


Six ans plus tard


- Et après le collège, Mr Boudoir ? Comment ça s’est passé ?

La jolie blonde devant moi me dévisage avec pitié. Certains diraient que c’est de la douceur et de la bienveillance, moi je vois ça comme de la pitié. Elle est la troisième psychologue que je vois, de nouveau à la demande de mes parents. J’aurais une « incapacité à gérer ma colère et à contrôler mes émotions ». Rien d’étonnant quand on a un père comme le mien qui se met en rogne à la moindre contrariété et qui me descend plus bas que terre dès que je fais un pas de travers. Il ne faut pas s’étonner, messieurs les psys, les chiens ne font pas des chats. D’après eux, cette non-gestion de ma colère serait dû à un mal être interne. En bref, ils pensent que je suis mal dans ma peau. Ce n’est pas tout à fait faux. Pour la troisième fois, je raconte ma vie, parce que c’est ce qu’on me demande :

- Je suis allé dans un lycée de bobos de merde et c’est là que les problèmes ont commencé. Pourtant, comme je vous ai dit tout à l’heure, au collège ça allait. J’avais quelques amis et j’ai eu une petite amie l’année de ma deuxième troisième avec qui je suis resté un peu en seconde. Après, elle a pris peur avec mes crises de colère et elle est partie. Je la comprends.

- Vous avez redoublé votre troisième ?

- Oui, j’ai toujours rencontré des difficultés scolaires. Le collège privé dans lequel mon taré de père m’avait inscrit avait un niveau trop haut pour moi. Ce n’était pas faute de lui avoir dit. Mais il me répétait « toute ta famille est allée dans ce collège, tu ne feras pas exception à la règle ». Mais en troisième, mes notes ont vraiment dégringolé et il a dû se rendre à l’évidence. Je suis donc allé dans un collège public et mes notes ont remonté, surtout grâce à une camarade de classe qui m’a bien aidé.

- Pourquoi êtes-vous allé dans un « lycée de bobos » si le privé* ne vous convenait pas ?

- Mon père, encore une fois. Que j’aille dans le public était un échec pour lui et vu que mes notes remontaient, il m’a inscrit dans LE lycée de famille, avec tous ces cons. Ça a été la catastrophe. La pression de mon père pour que je rattrape mon retard scolaire afin de pouvoir ensuite travailler dans l’entreprise familiale… c’était insupportable.

- Vous ne voulez pas travailler dans le complexe hôtelier de votre père ?

- Je ne sais pas trop, en fait. Lui et ma mère seraient fiers et ça voudrait dire qu’il me fait assez confiance pour ça. Mais je me demande si c’est ce que je veux vraiment faire…

La jolie psychologue m’encourage à continuer.

- Au lycée, toute cette pression combinée au comportement de ces fils à papa qui pétaient plus haut que leur cul…ça m’a fait déraper. Surtout quand ils se sont mis à faire des commentaires sur ma grande sœur.

- Votre sœur ?

- Oui Isabelle est dépressive et elle fait souvent des séjours en psychiatrie…Les lycéens débiles la traitaient de cinglée et ça me mettait hors de moi. Du coup, j’ai commencé à frapper. Le problème, c’est que quand on commence à se défendre comme ça, après c’est compliqué de faire autrement.

- Je comprends. Vous avez utilisé les armes que vous aviez à votre disposition à ce moment-là.

- Le sexe est également un bon moyen de me défouler, une bonne échappatoire à ma vie assez pourrie. En général, les filles aiment les bad boys, heureusement pour moi.

Je lui adresse un sourire charmeur pour illustrer mes propos et je savoure mon petit effet.

- Continuez à me raconter, dit-elle en se ressaisissant.

- J’ai quand même réussi à avoir mon bac parce que je ne suis pas si con que ça, heureusement. J’ai enchaîné avec une école de commerce, toujours pour faire plaisir à mon père. Je me suis fait viré au bout de trois mois pour violence et franchement, ça ne me plaisait pas du tout. Mes parents ont insisté pour que je m’inscrive à une autre école mais cette fois-ci, j’ai refusé. Je ne voulais pas emprunter cette voie à ce moment-là.

- Qu’avez-vous fait ensuite ?

Je soupire. J’ai honte de ma vie actuelle mais je suis là pour la raconter.

- J’ai enchaîné les petits boulots pour prouver à mes parents que je pouvais m’en sortir mais je me suis fait viré à chaque fois. Je ne supportais pas les clients impatients, chiants et mal-élevés. Et je draguais un peu trop au goût de mes patrons. Ma mère a convaincu mon père de me proposer un deal : je dois travailler dans l’un de leur hôtel. Si je me montre sérieux dans mon travail et ne crée pas trop d’histoires, nous pourrons « reparler entre adultes de mon avenir », dixit mon père

- C’est une bonne chose, non ?

- Oui mais je ne travaille pas à la réception ou dans les bureaux avec mon père, je ne le mérite pas assez pour lui. Je fais plutôt le ménage, un peu de maintenance, enfin ce genre de tâches indispensables à la vie d’un hôtel. Je ne bronche pas et je bosse. Je veux montrer à mes parents que je suis sérieux et que je sais travailler. C’est fou mais j’espère gagner ma liberté ou au moins un peu de considération pour ma personne. En plus, ça me laisse le temps de réfléchir à ce que je veux vraiment faire de ma vie. Je loue un petit studio pour plus d’intimité. Merci Maman.

La psy hoche la tête et sourit. Elle est vraiment mignonne.

- Si je vous voie aujourd’hui, c’est surtout parce que mon père pense que j’ai un problème psychologique et ma mère veut que je m’en sorte.

- Et vous, pensez-vous en avoir besoin ?

- Les deux premiers psys m’ont vu deux fois et ils ont tous les deux constatés que je n’« étais pas prêt à faire un travail sur moi-même » et qu’ils ne pouvaient pas m’aider si je ne le voulais pas.

- C’est vrai, me dit-elle.

Je rapproche ma chaise de la sienne. Elle recule.

- Je sais que j’ai un problème. Etre autant en colère, ce n’est pas normal. Mais ce n’est pas un psy qu’il me faut. Il faut que je confronte mon père…mais je suis faible donc je ne le fais pas. Je me laisse porter par le courant et on verra bien ce qu’il se passe.

Je pose une main sur sa cuisse.

- Je pense que ce dont j’ai vraiment besoin en ce moment, c’est de m’amuser…vous seriez partante pour m’y aider ?

Je lui fais mon regard de tombeur, en général ça marche. Mais je n’ai pas de chance, elle retire ma main.

- Ce n’est pas correct, Mr Boudoir.

- Nous ne sommes pas toujours obligés de vivre selon les normes…

- Il ne se passera rien entre vous et moi, vous êtes mon patient.

- C’est dommage, dis-je en soupirant et en me reculant.

- Si je peux vous donner un conseil, il serait bon pour vous de revoir des amis de la période primaire ou collège. Etant donné que, selon vous, c’était votre meilleure période, vous pourriez demander à d’anciens amis les souvenirs qu’ils ont de vous. Ça pourrait vous faire du bien.

Je ne réponds pas et griffonne mon numéro sur la feuille devant moi avant de partir, juste au cas où. Mais ses derniers mots trottent dans ma tête.


* Note de l'auteure : je ne dénigre pas les établissements privés, c'est pour l'intrigue.




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7

7 commentaires

Lulu's

-

Il y a 2 mois

2 personnages principaux qui ont tous les deux des problèmes d'estime d'eux mêmes ayant des répercussions différentes sur leurs vie. L'intrigue est vraiment sympa et donne envie de connaître la suite

Francis Jean

-

Il y a 2 mois

C’est toujours aussi vivant et rythmé. On est vraiment dans la peau des personnages. Ça sonne juste.

Dystopia_Girl

-

Il y a 3 mois

J'aime toujours autant:)

BettySophie

-

Il y a 3 mois

Merci beaucoup. J'aime également beaucoup ton roman que je lis avec attention😊
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