Fyctia

NdA : une incongruité s’est glissée dans la séquence finale du dernier chapitre. Il manque une mention comme quoi Maeva a retrouvé une photo de dos de Julia où le fameux tatouage est visible. C’est cette photo qu’Adrian entrevoit avant l’attaque.

***

Nerveuse, Maeva observe l’homme devant elle avec méfiance. Certes, elle a relâché sa prise sur sa gorge, mais son esprit embrumé ne sait plus où elle doit placer sa confiance.

Le fait est qu’il est un assassin reconnu et que sa guilde est beaucoup plus organisée qu’il ne paraît. Pourtant, ce dernier ne semble en aucun cas déterminé à prendre action contre elle alors qu’il vient de la surprendre dans ses recherches pour le moins dangereuses.

De son côté, Adrian fait l’impossible pour calmer son cœur qui tambourine avec violence entre ses côtes meurtries par cette nouvelle attaque contre sa personne. Néanmoins, rien en lui ne lui suggère de se méfier de la jeune femme qui semble pourtant troublée par ses découvertes récentes. Avant qu’il puisse prendre parole, c’est d’ailleurs elle qui décide d’approfondir le sujet.

— J’ai remarqué le même tatouage à ton poignet et cela me perturbe. Tu connais cette femme ?

Certain de pouvoir s’expliquer, Adrian choisit d’y aller en toute franchise et se lance.

— Je l’ai croisée quelques fois effectivement, mais je ne la connais pas en dehors des missions que nous avons effectuées ensemble.

— Et si je te dis que cette personne s’appelle Julia, cela réveille en toi de quelconques souvenirs plus précis ?

Surpris d’entendre à nouveau le nom qu’elle a évoqué la veille, l’assassin commence à comprendre ce qui trouble sa compagne.

— Non. Je t’assure que je ne te cache rien. Cette femme était un assassin redoutable, c’est tout ce que je sais. Je suis vraiment surpris d’apprendre que tu as partagé des moments d’amitié avec elle sans rien découvrir sur sa véritable identité. D’ailleurs, disons que ce n’est pas dans les habitudes de la guilde de tolérer ce genre d’interactions sociales.

— Tu viens pourtant de me proposer pas plus tard que la nuit dernière de partager ta vie avec moi, non ?

L’inconfort sur le visage d’Adrian est évident et cela trouble sa compagne qui commence à avoir de la difficulté à mettre de l’ordre dans ses pensées.

« Serait-il envoyé pour terminer une mission que Julia a échouée ? », ose-t-elle imaginer.

— Avant de paniquer, écoute-moi ! lance Adrian en voyant l’air perplexe de la femme plantée devant lui. J’ai décidé de quitter la guilde.

Bien que soulagée par cette affirmation, Maeva reste perplexe pour bon nombre de raisons.

— Tu sais bien que cela n’est pas possible. Tu en sais beaucoup trop sur eux.

— Je sais, mais il existe toujours un moyen quand on veut vraiment. J’ai une forte somme de côté et je compte m’en servir pour me forger une nouvelle identité loin d’ici. Un assassinat simulé, quelques chirurgies et un maximum de planification et je disparais de la carte pour de bon.

— Ta naïveté va te coûter la vie ! s’impatiente Maeva. Tu sais bien que ces gens sauront te retrouver où que tu ailles et quoique tu fasses. Tu sembles n’avoir aucune idée des ramifications que possède l’organisation pour laquelle tu travailles.

— Or, toi tu sembles en savoir un bail sur eux. Puis-je te suggérer de partager tes découvertes avec moi ?

— Qu’est-ce qui me dit que tu es digne de ma confiance ?

Sincèrement hésitante à discuter de DARLA avec cet homme qu’elle parvient de moins en moins à cerner, Maeva tente désespérément de trouver le courage de lui imposer une fois de plus sa volonté de le voir quitter sa demeure. Tremblante, elle se prépare mentalement à agir lorsque l’homme glisse lentement la main dans une poche dissimulée derrière sa ceinture.

Elle réalise alors qu’Adrian a pris le temps d’enfiler ses vêtements avant de venir la rejoindre dans le bureau. Il peut donc avoir n’importe quelle arme avec lui, mais cela ne la perturbe évidemment pas. Elle le regarde donc présenter un petit tube avec un anneau rouge, tube qu’il dépose dans sa main en la fixant d’un regard doux qui tranche avec la tension qui règne en cet instant.

— Cette petite chose peut régler tous mes problèmes en un éclair, commence-t-il d’une voix calme. Pointe-le vers moi et appuie fermement sur son extrémité et une fléchette viendra mettre fin à tous mes problèmes.

Puisque seul le silence répond à sa dure affirmation, Adrian poursuit sur une même lancée.

— Si tu songes un seul instant à me demander encore de fuir loin de toi pour me protéger ou si tu crois que je puisse te vouloir du mal, fais-moi le plaisir d’appuyer pour que je puisse partir sans douleur. Si tu ne le fais pas, peut-être que mon plan va échouer, tu as raison, mais au moins j’aurai passé quelques bons moments en ta compagnie d’ici cet instant fatidique. J’aimerais néanmoins savoir ce que tu as trouvé sur la guilde si tu veux bien partager tes informations avec moi.

— S’ils réalisent que tu en sais trop, tu seras encore plus exposé à leur ire, tu en es conscient ?

— Si tu veux mon avis, mieux vaut connaître ses ennemis si on veut essayer de survivre à leurs attaques. Dis-moi ce que tu sais, je t’en supplie !

Chassant mentalement tous les doutes qui tournoient dans son esprit, Maeva s’abandonne totalement à l’horrible tristesse qui grandit en elle depuis la vue de la photo de Julia. Un flot soudain de larmes prend alors naissance dans ses yeux et elle se jette à corps perdu dans les bras de son compagnon après avoir jeté le tube au sol.

— Pourquoi suis-je encore surprise par la cruauté dont les gens savent faire preuve avec leurs semblables ? s’étonne-t-elle au travers de sanglots bruyants.

— Je ne crois pas que Julia ait cherché à trahir ta confiance si tu veux mon avis. Nos méthodes n’impliquent jamais un quelconque rapprochement avec nos cibles.

— Comment peux-tu en être certain ?

— Je ne peux pas, mais je peux seulement te garantir qu’elle n’a pas complété de contrat depuis plus d’un an. Qui sait, peut-être a-t-elle voulu disparaître des radars de la guilde ?

— Tu vois où cela l’a menée.

À ces propos, le corps de Maeva s’anime d’une série de soubresauts qui brisent le cœur d’Adrian qui tente en vainc de la rassurer en la serrant dans ses bras. Une idée saugrenue lui vient alors à l’esprit et il décide d’y aller franc-jeu avec sa partenaire.

— Tu sembles maîtriser plutôt bien les sombres avenues de ce vaste réseau qu’est Internet. Peut-être pourrions-nous prendre nos ennemis à leur propre jeu ?

Ravivée à l’idée de pouvoir trouver une solution à un problème à prime abord insurmontable, la jeune femme arque le sourcil en attente de la suggestion lumineuse de son compagnon.

— Je t’écoute, se contente-t-elle de répondre.

— Tu ne m’as pas encore donné de détails, mais je sais que la guilde est intouchable à la base. Toutefois, tu sembles avoir franchi les murs de leur forteresse. Et si tu te prenais pour Dieu pendant un instant ?

« Se prendre pour Dieu, voilà qui est ironique. », pense la jeune femme damnée.