Fyctia
17-Aveux difficiles
Pendant un long moment, Adrian et Maeva restent immobiles à se regarder droits dans les yeux. La situation a tout pour être étrange.
D’un côté, la femme au corps presque totalement dénudé combat cette attirance inattendue qui la pousse à vouloir sentir la peau de cet homme contre la sienne.
Face à elle, son prétendant doit se faire violence pour ne pas succomber à l’envie de retirer à son tour ses vêtements pour satisfaire à ce désir intense qui le vrille. Or, il sait qu’il fait face à une situation qui échappe à son esprit empirique et que ce besoin physique si fort ne peut être naturel.
Certes, Maeva a tout pour lui plaire et le peu qu’il sait sur elle fait d’elle potentiellement la seule personne qui pourrait survivre à cette vie qu’il mène depuis sa plus tendre enfance. Néanmoins, il ne peut humainement pas s’abandonner à elle sans comprendre un minimum qui elle est.
Dans l’esprit de Maeva, c’est un maelstrom étourdissant de souvenirs et d’émotions qui menace de l’emporter à tout moment. Comment peut-elle s’imaginer avouer à cet homme ce qu’elle n’a jamais partagé avec personne jusqu’ici ?
Même Julia ne savait rien.
Voilà justement l’œil de la tempête qui est en train de la retourner de l’intérieur.
Pourtant, elle sait qu’Adrian est différent et qu’il pourrait bien lui permettre de retrouver l’espoir de se voir libérée un jour de sa damnation. Voilà justement ce qui la convainc de se lancer dans des aveux qui vont déterminer si cet homme est assez fort pour affronter l’impossible réalité.
— Je crois que tu serais mieux de t’asseoir avant que je ne commence. Ce que je vais te dire risque de changer à jamais ta manière de voir ce monde et je doute que ce soit pour le mieux malheureusement.
— N’oublies pas que tu parles à un homme qui a le sang de centaines de victimes sur les mains. Je suis en partie responsable de la noirceur de ce monde, et ce même si j’ose encore croire que je ne fais qu’éliminer des personnes encore plus méprisables que moi.
— Peut-être voudras-tu encore m’éliminer avec ce que je m’apprête à te dire.
Pour la deuxième fois en cette nuit froide, Adrian voit une larme unique couler le long de la joue de Maeva. Cependant, cette fois, elle ne l’essuie pas et commence son histoire une fois qu’il s’est assis dans un fauteuil moelleux.
— J’avais vingt-cinq ans lorsque la Mort s’est présentée à moi pour la première fois. À l’époque, j’étais l’une des servantes d’un seigneur cruel qui considérait ces sujets comme de vulgaires morceaux de viandes. Il n’y avait que l’argent, le pouvoir et son goût pervers pour les femmes qui l’animaient. Cette chose tenait plus d’un monstre que d’un homme et il a fallu qu’il s’intéresse à moi.
— Attend une seconde, tu parles d’un seigneur comme si nous étions encore à l’époque médiévale. Tu faisais partie d’une secte ou quoi ?
— Le terme est pourtant bien choisi et non il ne s’agit pas d’une secte. La Suède de cette époque était bien divisée en lots qui étaient accordés à des nobles qui en faisaient ce que bon leur semble.
Voyant l’expression d’incrédulité la plus totale qui déforme les traits de son invité, Maeva ne peut que reconnaître à quel point son histoire peut lui sembler totalement fictive.
— Je sais que c’est difficile pour toi de le concevoir, mais j’ai aujourd’hui plus de cinq cents ans. Avant que tu te lances dans je ne sais quelles hypothèses à mon sujet, non je ne suis pas une sorcière.
— Tu vas devoir me fournir une autre explication dans ce cas.
— Je suppose que tu as déjà compris que ce monstre qui m’employait a voulu me faire connaître des plaisirs auxquels je ne m’intéressais aucunement. Je n’ai pas eu d’autre choix que de fuir sa tyrannie. Malheureusement pour moi, la Suède possède un climat qui n’est pas très clément pour une servante légèrement vêtue en plein mois de décembre. Je me suis rapidement retrouvée transie par le froid, perdue en forêt, sans personne pour venir m’aider malgré mes cris de détresse. À un moment, j’ai même supplié en hurlant mon maître de me retrouver en promettant de le laisser faire ce qu’il voulait de moi.
— Et il t’a retrouvé ? ose demander Adrian alors que Maeva prend une pause dans son histoire.
— Non. Toutefois, quelque chose de beaucoup plus grand que ce minable seigneur m’a trouvé à ce moment.
— Avec l’âge que tu viens d’annoncer, je me dis que cette chose n’avait rien d’humaine.
— Effectivement. Encore une fois, je te prie d’éviter les hypothèses, car je doute que tu parviennes à trouver, surtout si tu songes encore aux vampires !
— Puisque tu as indiqué tout à l’heure que la Mort fait partie de ta vie depuis longtemps déjà, je suppose que c’est Lui qui a répondu à ton appel.
Complètement abasourdie par la réplique d’Adrian, Maeva s’écroule littéralement à genoux, les yeux complètements inondés de larmes. Le corps animé de soubresauts dignes d’un enfant qui vient de se faire gronder, elle tient la tête baissée et sanglote sans retenue.
Le contact chaud de bras puissants qui l’entourent l’instant suivant vient toutefois lui procurer un réconfort qu’elle ne se rappelle pas avoir connu depuis qu’elle a vécu le triste instant qu’elle vient de ressortir de sa mémoire. Tremblante d’émotion, elle se laisse soulever par Adrian qui la mène doucement vers la causeuse où tous les deux s’installent côte-à-côte. Touchée par son geste, elle fixe ses yeux bleus qu’elle remarque pour la première fois.
— Comment fais-tu pour ne pas t’enfuir avec ce que je viens de te raconter ? demande-t-elle avec une voix vibrante.
— Ce que je retiens, c’est que tu as vécu trop longtemps dans la solitude avec pour seule compagnie l’être le plus froid que l’histoire nous présente. Je n’ose même pas imaginer la douleur que tu as dû endurer pendant toutes ces années.
— Tu devrais pourtant avoir peur de moi. Je ne te l’ai pas encore dit, mais ma mission est de prendre les âmes des personnes qui doivent rejoindre les Enfers. Tu réalises que le jour arrivera où je devrai possiblement prendre la tienne ?
— Si cela doit arriver, je t’offrirai mon âme sans aucune résistance. Je sais depuis longtemps que je suis damné à errer en Enfer pour mes actions. Je ne me suis jamais attardé à savoir s’il existait vraiment et je ne suis pas croyant, mais je suis prêt à affronter les conséquences de mes actions.
— Mais maintenant que je te connais, je ne pourrai jamais accepter de te soutirer ton âme !
— Tu n’auras pas à le faire puisque je te la donne d’emblée. J’imagine que tu n’as pas la liberté de refuser ce que la Mort t’impose de faire et je ne veux pas que tu souffres à cause de moi.
— Rien n’est aussi simple. Imagine ceci : tu accepterais de me tuer si un contrat devait être mis sur ma tête ? Sache que je te laisserais faire sans hésiter si cela peut me permettre de me libérer de mon engagement auprès de Lui.
Adrian reste dubitatif un moment, puis il prend doucement la main de Maeva dans la sienne.
— Mon seul espoir serait que nous nous retrouvions ensemble aux Enfers !
23 commentaires
WildFlower
-
Il y a 2 ans
cedemro
-
Il y a 2 ans
Emmy Jolly
-
Il y a 2 ans
cedemro
-
Il y a 2 ans
Emmy Jolly
-
Il y a 2 ans
cedemro
-
Il y a 2 ans
Kiria Parker
-
Il y a 2 ans
Lexa Reverse
-
Il y a 3 ans
clecle
-
Il y a 3 ans
cedemro
-
Il y a 3 ans