Fyctia

Sans m'en rendre compte, je me retrouve dans ma rue. J'avance, la tête haute, essayant d'avoir l'air de revenir d'une balade matinale. Les voisins m'adressent quelques sourires, je le leur rend. On me dit bonjour, je fais de même. J'essaie d'agir normalement. De ne pas penser à ce que vont dire maman et papa quand je vais rentrer. Par chance, il est dix heures heures. Ils doivent être au travail. J'aurais le temps de prendre une douche, et de préparer mon discours.

Et c'est sur ces pensées que j'ouvre la porte d'entrée et me retrouve face à face avec maman.

— Stella ! Tu es rentrée ! Tu es là ! Tu es vivante ! Oh mon dieu ! Merci Seigneur ! Oh mon dieu, ma fille est en vie !

Elle me serre contre elle, dans une étreinte désespérée. Et moi j'étouffe. Lorsqu'elle me lâche, il n'y a plus aucune trace de soulagement. Elle me tire par le bras et me force à m'asseoir à table, à laquelle se trouve déjà papa, la tête entre les mains. Maman reste debout, les bras croisés, les sourcils froncés, les lèvres pincées. Ses yeux lancent des éclairs, elle avale à grande peine sa salive. Ça ne sent pas bon du tout. Et ce n'est pas seulement dans le sens figuré. Quelque chose doit être en train de crâmer dans le four.

— Maman, il y a...

— Silence !

Je ne dis plus un mot.

— Stella Bella ! Vas-tu nous expliquer pourquoi tu es partie comme ça ?

— Je...

— Tu ne peux même pas imaginer un seul instant la frayeur que tu nous a fait, à ton père et moi.

— Mais...

— Partir comme ça, sans même envoyer un seul message, sans même répondre à un seul appel, crois-tu que c'était la meilleure solution ?

— Maman...

— Crois-tu que nous ne nous sommes pas inquiétés ?

— Si, mais...

— Tu n'es pas rentrée de la soirée, tu n'es pas rentrée cette nuit, tu n'es pas rentrée ce matin !

— Je sais...

— Et maintenant, maintenant, tu oses revenir à la maison, au beau milieu de la matinée, comme si de rien n'était ?

Je ne cherche plus à répondre. Elle est trop en colère pour m'écouter.

— J'attends... Nous attendons tes excuses Stella ! Si tu étais en colère, triste, choquée ou peu importe, tu aurais dû partir dans ta chambre ! Pas dehors, dans la rue, sans même dire où tu es ! On a passé toute la nuit à te chercher ! À chaque coin de rue, je t'appelais, à chaque tournant, je cherchais ma fille, à chaque passant je pensais que c'était toi !

Papa n'a toujours pas prononcé un mot. Je ne sais pas si je dois espérer qu'il soit moins en colère que maman. Elle part dans la cuisine, sûrement pour aller chercher son plat brûlé.

— Stella, je comprends que tu aies eu envie de partir loin d'ici, ce n'était pas facile pour moi d'en parler, pour ta mère de l'apprendre. Mais il faut que tu saches que tu l'a alarmé. Et moi aussi. On ne t'as pas retrouvé. On a cru au pire. Que tu te sois fait kidnapper, tuer, perdue. Ta mère est furieuse après toi, et c'est normal. Tu es sa fille, elle a failli perdre la prunelle de ses yeux, l'enfant qu'elle a chéri toute sa vie et qu'elle chérit encore. Elle a déjà commis une erreur qu'elle estime irréparable à ses yeux, alors elle ne pouvait pas supporter d'avoir perdu sa fille.

Je ne suis pas capable de regarder papa. Son ton est doux, mais ces mots sont vrais. Et ça me fait mal.

— Ne pense pas que je ne suis pas fâché contre toi. Je suis furieux. Tu ne peux pas imaginer à quel point. Et tu seras punie, tu le sais, non ?

Je hoche la tête. Je le savais. C'est compréhensible. Je ne peux pas leur en vouloir.

Maman revient et s'assoit à côté de papa.

— On part dans dix minutes.

— Où ? je demande interloquée

— À l'école ! Où croyais-tu aller ? me réplique-t-elle.

Ah.

Bien sûr, l'école.

— Et autant te prévenir tout de suite, tu es privée de téléphone ainsi que de sortie jusqu'en octobre !

Fallait s'y attendre. 1 mois de punition. Je soupire et monte me doucher rapidement avant de partir à l'école.