Fyctia
Chap 1-3: Surprise, surprise
— Vous vous souvenez, on avait demandé à ce que chacun porte un petit accessoire de fête, explique Alaric avant de se tourner vers Arsène : Arnold s’impatiente, il t’attend pour débuter son discours !
— C’est vrai, soupire-t-il en le rejoignant. Au fait, 'Ric, tu ne m’as pas dit si les micros du premier étage ont été réparés ? On a l’enregistrement la semaine prochaine et…
Les deux hommes disparaissent dans le couloir en poursuivant leur conversation, me laissant seule avec mes dossiers éparpillés. Je suis bonne pour tout reclasser demain, je n’aurai pas le temps de le faire ce soir… Je fais un tas sur mon bureau et soupire devant l’étendue du travail qui m’attend. Une longue mèche brune s’envole pour retomber négligemment sur mon visage, je la chasse d’un revers de main.
Profitant de sa proposition d’un rendez-vous, juste lui et moi, j’ouvre ma messagerie pour me rendre sur la page dédiée aux agendas. Le sien apparaît en premier puisque je l’ai paramétré ainsi pour le scruter tous les jours… Je le parcours dans l’espoir de trouver un créneau libre quand mes yeux s’arrêtent sur l’encart bleu de ce vendredi : « Appart 7ème ».
Encore un ?
Arsène cherche à déménager depuis quelques semaines, il m’a même proposé de l’accompagner à l’une de ses visites. L’agent immobilier a cru que c’était pour nous, je me suis sentie gênée, mais mon patron n’a pas démenti. Me projeter avec lui, dans ce bel appartement avec vue sur la Seine, m’a vendu du rêve. Il m’a enlacée devant l’imposante baie vitrée et je nous ai vus vieillir ensemble… Jusqu’à ce que je lui demande quand nous pourrions officialiser notre relation et qu’il se ferme comme une huître. Arsène finit toujours par m’expliquer qu’il ne veut pas nous causer d’ennuis au travail, que la DRH pourrait nous convoquer à cause de notre lien hiérarchique. Et lorsque je lui dis que je suis prête à changer d’entreprise si cela peut faciliter les choses entre nous, il se braque encore plus et clôture notre conversation en me disant qu’il ne veut pas que je m’éloigne de lui. Après cela, il me prend dans ses bras et m’embrasse avec passion. Certainement un bon moyen de me faire taire, et je suis navrée de l’admettre, mais cela fonctionne parfaitement.
Il est d’ailleurs temps que je me ressaisisse, l’heure tourne trop vite. Je clique sur le créneau précédent sa visite et bloque un rendez-vous « privé ». Avec un peu de chance, il me conviera dans cet appartement et je pourrai à nouveau faire des plans sur la comète.
J’attrape mon sac, en sors un petit miroir et tente d’effacer les traces de mascara qui, comme je l’avais redouté, forment des poches sous mes yeux. J’adore mes longs cheveux bruns, dont les ondulations atteignent quasiment mes fesses, mais ils sont indisciplinés et me donnent tous les matins du fil à retordre. J’essaie de les attacher, mais certaines mèches ressortent en prenant des angles improbables. Je m’empare du serre-tête pour le passer sur ma tête et cela aplatit le tout. Je ne suis pas convaincue du résultat, mais si c’est le thème de la soirée, alors allons-y ! Avec un peu de chance, je vais finir par l’avoir cette fichue promotion !
Les portes de l’ascenseur s’ouvrent sur le hall de notre tour entièrement redécorée pour l’occasion. Une foule de collaborateurs se tourne pour découvrir qui rejoint les célébrations. Des collaborateurs sur leur 31… Petites robes noires élégantes, costards taillés sur mesure et pas la moindre trace d’accessoires douteux de Thanksgiving. Près du bar éphémère, je distingue les membres du Codir dont notre N+2 et, à leurs côtés, Arsène qui trempe ses lèvres dans une coupe de champagne. Ses yeux se plissent en m’apercevant. Plusieurs de mes collègues s’esclaffent en me voyant et il me faut un certain temps pour comprendre que la raison de leur hilarité provient de ce qui surmonte mon crâne. Les plumes s’agitent dans tous les sens et je dois avoir l’air ridicule. Priya déboule pile à ce moment-là comme une tornade, au point que j’en oublie le serre-tête. Elle est accompagnée par Sarah qui est splendide dans une robe noire à sequins. Leurs tenues sont assorties, Priya a noué un foulard fait de la même étoffe autour de son cou fin.
— Prends ça ! ordonne ma meilleure amie en me flanquant une coupe entre les mains.
— Merci, sauf que tu sais que je n’aime pas le champagne, l’informé-je.
— Je t’assure que tu vas en avoir besoin, m’alerte-t-elle avant de scruter le dessus de ma tête : c’est quoi ce truc ?!
— Encore une blague pourrie de Ric, évincé-je d’un geste de la main. En avoir besoin, pour…
Le « quoi ? » meurt dans ma gorge lorsqu’elle se décale pour élargir mon champ de vision et que mon regard se braque à nouveau sur Arsène. Sa main a posé la coupe de champagne au profit d’une chute de reins sur laquelle une cascade de cheveux lisses et roux s’agite follement. La femme se pavane et rit à gorge déployée. Sa voix porte loin, j’entends d’ici son accent anglais. Mon air ahuri passe de ce spectacle à mes deux amies qui me fixent avec embarras.
Qu’est-ce que c’est que ce bordel ?!
Je ne comprends pas… Mon ventre se tord.
— Qui est cette femme ? m’entends-je dire en ayant la sensation d’être sortie de mon propre corps.
— Alison Deloria, la programmatrice de Sky One, me répond Sarah.
La chaîne anglaise pour laquelle je travaille comme une acharnée. Arsène rencontre souvent leurs équipes pour négocier les contrats.
— Mais, qu’est-ce qu’elle fait ici, à Paris... aux bras… d’Arsène ?!
— Apparemment, ils sont en couple, grimace Priya. On le découvre comme toi.
Je lui tends ma coupe et fends la foule pour me confronter à cet enfoiré.
« Mél, enlève au moins le… » tente de m’interpeller ma meilleure amie, mais je suis déjà loin. Lorsque j’arrive aux côtés des membres de la direction, tous se tournent comme un seul et même homme vers moi. Je me sens subitement toute petite. Le sourire radieux d’Arsène s’efface quand il me découvre et ses iris essaient de me contraindre au silence.
La fameuse Alison m’observe à son tour, dans l’attente que je me présente, mais pas un mot ne sort de ma bouche. En plus d’avoir une silhouette de rêve, cette femme a un visage parfait, de grands yeux bleus et des lèvres pulpeuses rouge carmin… Ma dizaine de kilos en plus et mon serre-tête à plumes ne me permettent clairement pas de faire le poids… sans mauvais jeu de mot. Arsène me désigne souvent comme « gourmande » et me dit que c’est ce qu’il préfère.
Apparemment, c’était le premier de ses mensonges.
12 commentaires
petites.plumes
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Il y a 7 jours
Sonia J. SAM
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Il y a 6 jours
Bellaa
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Il y a 24 jours
Sonia J. SAM
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Il y a 24 jours
Ludivine 27
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Il y a un mois
Sonia J. SAM
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Il y a 24 jours
Lauralyna
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Il y a un mois
Sonia J. SAM
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Il y a un mois
vic.mlr
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Il y a un mois
Sonia J. SAM
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Il y a un mois