Fyctia

« Chère Méline du futur,

C’est bientôt Noël et je ne savais pas à qui m’adresser… Pour te dire à quel point la solitude est devenue une bonne copine ! Je me retrouve seule face à mes problèmes. Enfin, non, ce serait te mentir… Je ne suis pas si seule que ça, une bonne bouteille de « Sancerre » m’accompagne et, vraiment, elle est d’un grand soutien ! Sans elle, je n’aurais pas eu le courage de prendre ce stylo. Et du courage dans la vie, j’en manque cruellement.

Je ne savais pas à qui m’adresser jusqu’à ce que je me souvienne de ce vieil article paru, la semaine dernière, dans un journal parisien : « S’envoyer une lettre du futur, ou comment se souhaiter un avenir radieux ».

Radieux ? Un avenir tout court me suffirait. Il m’est impossible d’envisager celui de vieille fille qui se profile devant moi. Surtout après cette terrible soirée, où j’ai vécu le pire moment de mon existence. Si la honte était un sport national, ma vieille, je serais montée tout en haut du podium, en avant la première place ! Oh, tu peux l’agiter ta médaille d’or, c’est bien la seule récompense que tu obtiendras de la part de ton employeur !

Et voilà, je m’énerve et mon verre s’est renversé… Bouge pas, je reviens.

Bon, j’ai dû faire sécher notre lettre. Il reste des taches, mais au point où j’en suis, ça fera l’affaire. Quand je te disais que je suis une catastrophe ambulante. Pas moyen de tenir quelque chose entre mes mains sans le renverser, ou de mettre un pied devant l’autre sans m’étaler par terre. Je m’agace souvent moi-même… Mais ce n’est rien face à ce que je ressens pour cet enfoiré d’Arsène Lemoine. Si je l’aimais éperdument il y a encore quelques heures, en cet instant, je le hais de toute mon âme ! Qu’il aille au diable avec sa rousse siliconée !

Mais, bon sang, combien de fois Priya m’a-t-elle prévenue ?! Je m’étais promis de me fier à son intuition. Ma meilleure amie sent toujours quand je me transforme en aimant à connards ! Ce n’est pas la première fois que ça arrive… mais, cette fois-ci c’est la dernière, Méline Joly !

Cette lettre doit sceller mon destin. Plus le choix, si j’aspire au bonheur.

Et parce qu’en tant que scénariste, c’est mon métier de planifier, je vais tout reprendre méthodiquement : ce que j’aimerais changer dans ma vie et ce dont je rêve pour l’an prochain. Il est 22 h, je me laisse deux heures pour écrire cette foutue lettre et invoquer la loi de l’attraction. À minuit, elle sera postée. Lorsqu’elle me reviendra, je la conserverai précieusement dans un tiroir pour ne la rouvrir que dans un an.

Arme-toi de ta meilleure plume car il est temps d’écrire le nouveau chapitre de ta vie ! »