sarali vre Princess of the wolf Chapitre 1 (3)

Chapitre 1 (3)

Contrairement à mes attentes, la transformation ne fut pas douloureuse. Bien au contraire : je me sentais enfin complète, comme si mon âme n’avait jamais été aussi en paix.


J’avais enfin accepté les deux parts de moi-même, l’humaine et la louve. Je me sentais libérée d’un poids : ma louve ne cherchait plus à dominer, mais à s’unir à moi. Elle ne dictait plus mes émotions, mais les amplifiait, les rendait plus vibrantes, plus vivantes.


Pour la première fois, nous étions en harmonie parfaite. Je n’étais plus une humaine qui luttait contre sa louve, mais un être complet, libre, sauvage, et fort.


Ma louve était heureuse. Je la sentais rayonner de joie, m’acceptant pleinement, avec mes qualités, mes failles et mes défauts. C’était tout ce dont j’avais toujours rêvé : être comprise, être aimée pour ce que j’étais vraiment.


Avant que je ne puisse m’en empêcher, un hurlement s’échappa de ma gorge. Un hurlement primal, profond, chargé d’émotions, qui semblait venir des tréfonds de mon âme.


Ce hurlement s’adressait à la lune, à mes parents... et à une autre présence, floue, que je n’arrivais pas encore à identifier.


La louve tourna la tête. Je ne savais même pas si c’était moi qui l’avais décidé. La frontière entre nous deux n’était plus visible : nous ne faisions qu’un, et c’était extraordinaire.


Nous nous précipitions vers la sortie, sous les cris effarés des hommes. Nous dérapions au tournant d’une rue, semant la peur et l’angoisse sur notre passage. Nous courions comme si notre vie en dépendait ; ce qui, à bien y réfléchir, était sûrement le cas. À chaque foulée, les pas pressants de l’homme se rapprochaient.


Au détour d’une ruelle, j’aperçus un tram qui commençait à avancer. Mon cœur s’emballa. C’était ma chance ! Je me lançai dans un sprint à en faire pâlir le champion du monde. Ma louve me hurlait d’accélérer encore, refusant de plier face à la fatigue.


Je sentais ses forces s’amenuiser. La transformation et cette course effrénée avaient pompé son énergie. Alors, dans un dernier effort, je bondis en direction du tram. En plein saut, je sentis mon corps amorcer sa retransformation. Cette poussée d’énergie inattendue me projeta si haut dans les airs que je remerciai le ciel de ne pas souffrir de vertige.


Mes doigts agrippèrent de justesse le rebord du tram, mes jambes ballottant dans le vide. Je hurlai aux passagers, figés par la peur et la stupeur :

— Mais bon sang, ouvrez-moi !


Un homme d’une cinquantaine d’années s’approcha. Malgré l’odeur de sa peur, il gardait un certain sang-froid. Il m’ouvrit la porte du tram au moment exact où mes mains menaçaient de lâcher. Je me propulsai à l’intérieur, m’écrasant lourdement sur le sol du wagon.


Le choc me coupa le souffle, et je restai là, allongée, essayant désespérément de respirer sous les regards horrifiés des passagers.


L’homme, toujours tremblant, s’avança prudemment vers moi. Je le fixai froidement, réfléchissant à ce que je devais faire. Et, à ma grande surprise, les mots s’échappèrent de ma bouche sans que je ne les contrôle :

— Si jamais l’un d’entre vous parle ou montre ce qui s’est passé, je jure de retrouver vos familles et vos amis. Tous paieront pour votre imprudence.


Les passagers reculèrent d’un bond, terrifiés.


Je baissai les yeux sur mes mains : la peau était éraflée, écorchée, ensanglantée... mais, sous mes yeux, les plaies se refermèrent lentement, laissant ma peau lisse et intacte. Un léger picotement accompagna ce phénomène fascinant.


En levant la tête, je croisai les regards choqués des passagers, l’un d’eux évanoui sur son siège. Une petite pensée moqueuse traversa mon esprit : Alors, qui a dit que les femmes étaient fragiles ?


Le wagon entier semblait suspendu à mes moindres mouvements. Chaque geste de ma part provoquait un sursaut général. Puis, soudain, les portes du tram s’ouvrirent, déclenchant une cacophonie de cris et de pas précipités. Une vague d’émotions contradictoires m’envahit. Je savais que j’étais la cause de cette terreur, et cela me heurta plus que je ne voulais l’admettre.


Je vérifiai l’arrêt : il ne me restait plus beaucoup de chemin à faire pour rejoindre mon appartement. Mais une pensée me traversa l’esprit : l’homme, le géant aux yeux noirs, m’avait trouvée une fois. Mon appartement était probablement surveillé.


Je pris donc une décision : je passerais la nuit dans un hôtel, pas trop loin de chez moi. Un hôtel à une rue de distance me sembla le meilleur compromis.


Arrivée à la réception, un doute s’installa en moi. Avais-je fait le bon choix ? Choisir un endroit si proche de mon appartement, était-ce de la prudence ou de l’inconscience ?


Sans trop y penser, je réglai la chambre avec ma carte bancaire. Je remerciai intérieurement ma mère, qui m’avait imposé de toujours l’avoir sur moi malgré mes objections. Son argument avait été simple et efficace : « En cas de séparation, une carte bancaire pourrait te sauver. »


Je récupérai la clé et montai les escaliers, encore sous le choc de la soirée. Je pénétrai dans ma chambre sans même la visiter. Je m’écroulai sur le matelas et sortis mon téléphone pour tenter, une fois de plus, d’appeler mes parents.


Encore une fois, je tombai sur le répondeur. Je ne cherchai pas à comprendre. Exténuée, je laissai mes pensées s’éteindre et m’endormis presque instantanément.


Je fus réveillée en sursaut par ma louve qui hurlait en entendant des sirènes. Encore ensommeillée, je me levai et ouvris doucement les volets, m’attendant à tout moment à voir une patrouille de police défoncer la porte pour m’emmener en prison. Cela ne pouvait être que ça : l’un des passagers du tram avait dû parler, et maintenant j’allais en subir les conséquences.


Mais ce que je vis me glaça : ce n’étaient pas des policiers qui s’approchaient, mais des dizaines d’ambulances roulant à toute allure en direction de ma rue. Elles étaient suivies de voitures de police et de véhicules du SAMU.


Une angoisse terrible monta en moi. Poussée par un mauvais pressentiment, j’allumai frénétiquement la télévision et zappai jusqu’à tomber sur une chaîne d’information en continu.


Ce que je vis à l’écran me pétrifia : mon appartement était filmé en direct. Une agitation intense y régnait : infirmiers et infirmières entraient et sortaient à toute vitesse, escortés par des policiers. Soudain, un groupe d’ambulanciers se précipita à l’intérieur. Mon cœur battait à tout rompre, comme si je savais ce qui allait suivre.


Quelques instants plus tard, ils ressortirent, poussant deux brancards. La caméra zooma sur les visages des personnes allongées. Mes jambes se dérobèrent sous moi : c’étaient mes parents.



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