Aime Kha Premier amour ou dernier ? 10 ans +tôt. La fin, la vraie.

10 ans +tôt. La fin, la vraie.

Les jours qui avaient suivi étaient rythmés en fonction des échanges que j’avais avec Gabriel et Rose. Je ne respirais que lorsque je l’entendais, n’avais d’appétit que lorsqu’il m’envoyait un message. Je ne riais que lorsque Rose me sortait de ma déprime post-colonie.

Les semaines ont passé, la rentrée scolaire a eu lieu.

Les contacts avec Rose restaient stables, comme ils l’avaient toujours été. Je savais que je pourrais toujours compter sur elle, c’était établi depuis longtemps.

En revanche, les messages de Gabriel étaient de moins en moins récurrents. Les appels quotidiens étaient devenus des appels hebdomadaires, puis mensuels. Puis plus rien. Pourtant, rien ne pouvait me faire oublier le son grave de sa voix rauque.

Je recevais quelques messages de temps en temps, bien moins que ce que j’envoyais de mon côté.


La dernière fois que j’avais eu Gabriel au téléphone c’était à la mort de son père. Je l’avais à peine entendu, il était sous le choc.

Savoir que son père était condamné était une chose, le perdre à jamais, une autre.

On n’est jamais préparé à la perte des gens que l’on aime.

Gabriel s’était renfermé, replié sur lui-même. Je savais, de par nos échanges précédents que, si son père avait été fier d’apprendre que son fils voulait suivre la même voie professionnelle que lui, ce n’était pas le cas de sa mère.

Mais je le soutenais, j’avais de tout coeur envie qu’il fasse ce qui le rendait heureux même si j’avais une trouille bleue qu’avec un métier pareil sa vie ne soit en danger trop souvent pour que mon petit coeur tienne le coup.


De mon côté tout s’effondrait, sans nouvelle de Gabriel, je m’étais laissée aller. Je ne sortais plus, je n’appelais plus Rose. Mes notes chutaient, m’amenant à un redoublement que je ne désirais pas. Je ne désirais plus rien à vrai dire, sauf m’allonger et regarder indéfiniment la photo que Rose avait pris juste avant mon départ.

Avant lui, je ne savais pas ce que je voulais faire de ma vie, tant de portes s’ouvraient devant moi que ça me donnait le tournis. Maintenant, les portes se fermaient et je m’en fichais royalement.

Six mois plus tard, sur un coup de tête j’avais composé le numéro de Gabriel, que je connaissais par coeur.

Une voix sans âme m’avait répondu « le numéro que vous demandez n’est plus attribué ».


Un an après, une certaine Andréa m’avait contacté sur Facebook. Je ne la connaissais pas mais nous avions un ami en commun… Il ne m’avait jamais parlé d’elle, aussi je ne savais pas à quoi m’attendre.

Je lui avais toujours demandé d’être honnête avec moi, de me dire s’il rencontrait une autre fille parce que je préférais le savoir.

Manifestement j’en avais trop demandé. Ce que cette Andréa m’a dit a pulvérisé les derniers espoirs qu’il me restait de retrouver un jour Gabriel.


« Bonjour,

Je m’appelle Andréa. Je te contacte aujourd’hui parce que je suis la meilleure amie de Gabriel et que je sais à quel point il tient à toi. Seulement, il est trop lâche pour t’en parler directement alors il m’a demandé de m’en charger.

Voilà, à partir d’aujourd’hui tu n’auras plus jamais de ses nouvelles. Il est en couple avec une fille géniale qui lui fait oublier la tristesse de la perte de son père.

Il se concentre à fond sur ses études pour réaliser son rêve et n’a plus de temps à consacrer à une amourette de vacances.

Je suis désolée si ça te blesse mais, au cas où tu attendrais toujours de ses nouvelles ou autre, il valait mieux que tu le saches pour pouvoir passer à autre chose. 

Bonne journée.

Andréa. »


Mes mains tremblaient, un violent acouphène me vrillait les tympans et ma tête tournait.

Dans un réflexe de survie, en quelque sorte, j’avais copié ce message et l’avais envoyé à Gabriel sur Facebook en lui demandant si c’était vrai.

Cinq minutes plus tard, il me répondait :


« C’est vrai. Ne m’écris plus. Ne me contacte plus. »


Dans la foulée, son profil avait disparu. Perdant tous mes repères, je m’étais créé un faux profil et l’avais retrouvé.

Il m’avait effectivement bloqué.


Le lendemain, le premier jour de ma vie sans Gabriel avait commencé.

J’avais du réapprendre à vivre, à manger, à parler et à rire, sans coeur.

Mais c’est comme tout, on s’habitue, à force.

J’ai passé des nuits entières à pleurer. D’autres nuits à me convaincre que je n’avais pas rêvé, que notre histoire avait bien existé.

Rose multipliait ses venues, dès qu’elle était en vacances elle débarquait et m’aidait à me relever. Un jour, juste après son départ, je n’arrivais plus à mettre la main sur ma photo avec Gabriel. Rose m’avait avoué plus tard l’avoir récupérée, que c’était pour mon bien. Je lui en ai voulu pendant longtemps.


Six ans après cet été là, je ne faisais plus de cauchemars. Je ne pensais plus à lui.

Toutefois, cela ne semblait pas suffisant pour Rose qui, pour me secouer, m’avait lâché : « Regarde-toi Camille, c’est ça que tu appelles profiter de la vie ? Tu ne vis pas, tu ne te contentes que de survivre ! Réveille-toi à la fin. »


Elle avait raison, je ne faisais que survivre.

Mais comment vit-on avec un organe vital en moins ? Quelqu’un avait-il le mode d’emploi ?


Ce jour là, j’avais commencé à changer. J’avais travaillé sur moi et finalement réussi à donner le change. Et j’allais continuer ce travail jusqu’à ce qu’un jour je me leurre également moi-même.



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