Aime Kha Premier amour ou dernier ? Explications 1

Explications 1

Il est tard et la rue est totalement déserte, seuls quelques fumeurs sont sortis du bar pour aérer leurs poumons.

Je cherche Gabriel des yeux et le trouve assis sur une des chaises de la terrasse.

Je m’approche de lui, légèrement hésitante.


- Viens t’asseoir Camille, je ne mords pas.

- Ça, ça reste à prouver…


Un flash, dix ans en arrière, me passe devant les yeux. Je secoue la tête pour revenir à l’instant présent et m’installe à côté de lui.

Je croise les bras et pose mon regard sur une porte d’entrée d’un immeuble face au bar et j’attends qu’il parle. Deux minutes passent et j’attends toujours mais il reste silencieux.

C’est terminé, la gentille Camille pleine de patience a disparu il y a longtemps. Je me relève et sa main vient immédiatement attraper mon poignet.


- Reste, s’il te plait.

- Lâche-moi, ordonné-je sans appel.

Sa main relâche son étreinte dans la seconde.

Je le toise mais il ne vient pas à la rencontre de mon regard.


- Gabriel.

- …

- Gabriel ! Aboie-je et, enfin, il lève les yeux vers moi. J’ai écouté ton silence pendant les dix dernières années. Je connais le refrain et même les couplets par coeur. Si tu n’as rien d’autre à me faire partager, ça me va. Mais là, tu me fais perdre mon temps et je n’ai plus une seconde de temps à perdre avec toi, le stock a été écoulé.

- Je pensais que je ne te reverrais jamais Camille.

- Tu… C’était ce qui était sensé se passer.

- Mais tu es là.

- Tu n’as pas perdu ton sens de l’observation on dirait, raillé-je, lui provoquant un sourire en coin qu’il se dépêche de cacher en tournant la tête.

- Ça me fait plaisir de te voir, je ne…

- Eh bien pas à moi, le coupé-je.

- J’ai cru comprendre, en effet.

- Bien. Tu es là, je suis là, premier fait établi. Tu es content, je ne le suis pas, second fait établi. On passe à la suite, histoire d’en finir rapidement ?


Gabriel fronce ses sourcils et relève de nouveau le regard vers moi. Je sens mon souffle se bloquer et la naissance de frissons à la base de ma nuque, aussi, je détourne rapidement les yeux. Pas moyen que je le laisse me mettre dans un état pareil. Plus maintenant.


- Comment vas-tu ? Me demande-t-il.

- T’es sérieux là ? Rétorqué-je en haussant les sourcils et en le fixant afin qu’il puisse voir à quel point sa question était tout sauf légitime.

- Tout à fait sérieux, répond-il, ses fichus sourcils toujours froncés.

- Comment je vais ne te regarde plus Gabriel. Pas plus que toute autre question personnelle que tu pourrais avoir envie de me poser. Si je suis là avec toi c’est d’une part parce que tu m’as menacé, d’autre part parce que j’aimerai récupérer un truc.

- Un truc ? Tu parles de quoi ?

- T’occupes, ça non plus ça ne te regarde pas. C’est toi qui voulait me parler à la base pour, je cite « avoir l’opportunité de présenter des excuses à la plus grande tête de mule que tu aies jamais rencontré », balancé-je en mimant les guillemets.

- Tu as raison.

- Heureuse de te l’entendre dire. Donc ?

- …

- Ok, c’est bon, j’ai eu ma dose.


Je tourne les talons et décide de rentrer dans le bar. Ça ne m’apportera manifestement rien de rester ici.

Une main sur mon épaule me stoppe dans mon élan. Je ne me retourne pas, j’attends. Il se rapproche, je peux sentir la chaleur de son corps derrière le mien. Je ferme les yeux et m’exhorte à me concentrer sur autre chose.


- Que s’est-il passé Camille ?

- …


Cette fois c’est moi qui suis sans voix. C’est quoi cette question ?


- À quel moment j’ai merdé pour qu’on en soit là ?

J’hallucine, ce n’est pas possible autrement. Un rire frénétique, presque flippant s’empare de moi.

Je me retourne pour lui faire face. Il faut que je voies ses yeux, que je voies à quel point il est doué pour me prendre pour une idiote.


- Tu oses me poser la question, Gabriel ? Remarque, il y a du progrès… Cette fois tu n’envoies pas, comment c’était déjà ? Ah ! Oui ! Cette fois tu n’envoies pas Andréa à ta place pour faire le sale boulot.

- Andréa ? Tique-t-il.

- Oui, Andréa, ta meilleure amie.

- Ma meilleure amie est Irène, par extension avec Théo, Camille. Andréa n’est pas ma meilleure amie.

- Ah non ? Qui est Andréa pour toi alors, Gabriel ?


Dis-le, dis-le… Montre-moi ton vrai visage, enflure.

Gabriel semble perdu, ses yeux fouillent les miens et soudain il ferme les yeux.

- D’accord… J’ai peur de comprendre ce…

- Qui est Andréa pour toi ? Répété-je ma question, une octave plus basse.

- Mon ex, capitule-t-il dans un souffle.


Un sourire victorieux fleurit sur mon visage ce qui a le don de le surprendre.


- Eh bah voilà, nous y sommes, argué-je. Ça y est, tu percutes, les connexions neuronales sont à plein régime là je me trompe ?

- Il me manque certaines pièces du puzzle encore pour percuter, comme tu le dis.

- Arrête de te foutre de moi, c’est bon là.

- Je ne me fous pas de toi. J’ai cessé d’avoir de tes nouvelles peu de temps après le décès de mon père.

- À t’entendre on croirait que c’est moi qui ai coupé contact, ça me ferait presque rire, mais ça ne prend pas.

- Ok, ok. Deux minutes Cam, tu peux m’accorder ça ? Deux putains de minutes sans sarcasme, sans agressivité ? Deux minutes où on échangerait comme des êtres civilisés faisant preuve de respect mutuel ?

- Pour quelle raison je t’accorderais ça, dis-moi ?

- En l’honneur de ce qu’on a vécu ?

- Notre histoire ne vaut plus deux minutes de mon temps.

- Ok, je te le demande comme une faveur ok ?

- Je ne te dois plus rien Gabriel, conclus-je en lui tournant le dos à nouveau et en m’avançant vers l’entrée du bar.

- Camille ! Gronde-t-il de cette voix puissante et rauque que je n’ai jamais pu oublier, me figeant sur place et provoquant un long frisson tout le long de mon dos.


Je me retourne et ses yeux sombres, implorants et captivants, ont raison de moi.

Faible femme, je ne suis qu’une faible femme !

- Très bien, tu as gagné. Mais j’en ai marre d’avoir un public, dis-je en montrant du menton Rose, Marc et les autres qui nous observent sans se cacher. On marche ?

- Je te croyais plutôt sprinteuse…

- Arrête tes références ou je fais demi-tour.

- Ok. C’est parti pour la marche alors.


Nous n’avons pas fait dix pas que je reçois un message de Rose.

  • Vous allez où ?
  • Juste marcher. On revient. Je te tiens au courant.

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