Fyctia

Depuis l’entrée en fanfare du sombre gamos, c’est nouvelle salle, nouvelle ambiance.

L'homme mystérieux qui coupe court aux rencards est de retour pour notre plus grand plaisir.

Ironie.

Si j’en crois Sami, ce type nous trace depuis le début de soirée. Je sais pas ce qu'il cherche mais il nous a trouvé. Désormais, il nous confronte, droit comme un sceptre, sans prononcer le moindre mot, trop occupé à nous détailler de bas en haut derrière ses verres opaques. Et si je le prenais, en plein jour, pour une espèce de majordome, là, à la lumière de la nuit, j’ai quelques doutes.

Du côté d'Ava, c'est pas mieux.

J'affirme même, sans la trahir, qu’elle tire une sacrée tronche. Le genre de tronche de celle, qui, en entrant dans la chambre de son enfant, découvre l'ange de la mort assis sur le rebord du lit, les doigts glissants dans la chevelure du chérubin.

Histoire qu’on soit tous au même niveau, décrivons le man en question. Fermez les yeux et imaginez -c’est une image, gardez-les ouverts sinon, on va pas avancer.

Si le rebord de son chapeau voile en partie le faciès du « majordome », on devine un teint de peau, style croque-mort, aux doux reflets marron, voir gris dans l'ombre de ses joues creusées. Ce qui nous amène naturellement aux traits de son visage, tous, unanimement, taillés à la serpe par un mec qui louche un soir de pleine lune. Les commissures de ses lèvres ne semblent n’avoir jamais vu le Nord. Ses yeux, un lever de soleil. Et je dis ça, alors qu’ils sont cachés derrière des lunettes.

C’est vous dire l’aura du gars.

Pour les feignasses qu'auraient eu la flemme de lire cette longue description, imaginez un majordome vampire ascendant rapace en col roulé. Ok c’est vague, mais c’est tout ce que vous méritez.

L'homme incline sensiblement son chapeau pour nous saluer.

N’ayant aucun couvre-chef à ma disposition, je me contente de pleurer en silence.

— Ava Burnam ?

Bordel, c'est sa voix où des infrabasses ? Chaque mot qu'il prononce vibre dans mon bide avant d’atteindre mes tympans. Son timbre est si caverneux, qu'il ravive la terreur primaire de mes ancêtres préhistoriques aux fins fonds de mon génome.

— Euh, oui, répond Ava, bouteille à la main.

— Parfait. Avant de continuer, permettez-moi de me présenter, Ava.

Visiblement, oim, on s’en balek.

Le gars retire son chapeau. Cerise de merde sur un gâteau de cendres, une balafre hideuse barre le sommet de son front. Et quelque chose me dit qu’il se l’est pas faite en glissant à la piscine.

C’est mort. Ça peut pas être un simple domestique. C'est peut-être du délit de faciès, mais à un moment, j'suis pas plus con qu’un autre.

Enfin, ça dépend quel autre.

— Je suis Volco, l’homme de main de Chris Montini, le garçon que vous avez offensé en désertant votre rendez-vous sans prévenir. Ce dernier m’a donné l’ordre de vous ramener à lui. Sachez que vous l'avez profondément blessé dans son égo. Il consent néanmoins à vous pardonner si vous acceptez de faire marche-arrière et de le rejoindre.

Sur ces mots, il désigne la portière arrière de la voiture noire dont la vitre est légèrement baissée.

— Il est sérieux ?

J’ai encore pensé à voix haute.

— Je ne plaisante jamais. affirme Volco, et là-dessus, je veux bien le croire. Pour votre propre bien, je vous invite à suivre mon exemple. Chris est le fils du patriarche du clan Montini, Léon Montini, aussi appelé, l’Empereur de Paris.

Encore l’air d’être un sacré loulou celui-là.

— Avant de prendre une décision, Ava, je préfère m'assurer que vous en saisissez bien les tenants et les aboutissants. Les Montini ne sont pas n'importe quelle famille. Son clan à la main mise sur la capitale depuis des décennies. C’est lui qui gère et régule le crime, le banditisme, les différents trafics et ses acteurs.

Si j'ai tout bien saisi où il veut en venir, j'ose présumer -mais j'en rajoute peut-être !- que, cette soirée vient de prendre un tournant craignos as fuck.