Fyctia
C6P.3 Mona & Booba
— Ok, alors, cite moi des blazes de rappeurs morts !
— Deu gwa ? -elle parle la bouche pleine-
— De rappeurs morts. Allez, y’en a plein. Go !
— Ok, c'est pas du tout bizarre. Mmmh, j'en sais rien moi… Booba ?
— Booba ? Mais il est pas du tout mort !
— Roh, j’en sais rien moi, je suis nulle en rap !
— Bah pareil, mais là, quand même ! ...Du coup, t'as perdu.
— Pffff ! pffff-t-elle en me jetant un regard laser.
Aucun de nous deux ne trouve à rebondir là-dessus.
Nouveau temps mort. Ritournelle. Serpent qui se mord la queue.
Elle sort son téléphone. Les reliefs de son visage prennent une teinte spectrale quand l'écran s'allume.
Comme à chaque fois qu'une personne s'intéresse à son tél en pleine conversation, je sais plus où me mettre. Dois-je continuer à parler ? M'écoute-t-on encore ? Est-ce pour me démontrer combien le reste du monde s'avère plus fascinant que le moment passé avec moi ?
Elle pianote une partition rageuse sur son clavier tactile sans me calculer.
J’enfouis mes mains au plus profond de mes poches. Si le reste de mon corps pouvait suivre et disparaître avec.
On est clairement sur une fin de parcours pour Mirek et son intrigante compagne. Même les sculptures du pont ont l'air de me juger.
Pendant qu’elle tweete, qu'elle scrolle, qu’elle pianote ou que sais-je, je lève le nez pour inspirer un grand coup.
— On a du mal à se mettre d'accord, hein ? Ne serait-ce pas le moment de rentrer sagement chacun chez soi ? C'était cool de s'éclipser du bar à l'improviste avec toi, maintenant, on a peut-être trop étiré le moment.
Elle relève la tête façon suricate contrarié !
— T'essais même pas de coucher avec moi ?
Que je ... !!!
V'là autre chose !
Bon, ça a le mérite d'être franc -et ça prouve qu'elle m'écoute.-.
— D'où... D'où tu sors ça ?
— Quoi ? Tu me trouves moche ? dit-elle en fourrant son tél dans son sac.
— Hein ? Mais rien à voir! Juste, j'ai pas forcément la tête à ça en ce moment.
— Ok, tu me trouves moche.
— La vie de mon arbre généalogique que non ! Et arrête de me pointer avec cette bouteille où j'appelle la police !
— C'est bien la première fois qu'on refuse de coucher avec moi, dit-elle, ébahie.
C'est limite si elle croise pas les bras sur sa poitrine pour bouder.
— J'ai rien refusé, c'est toi qui balance que j'essaie de coucher avec toi !
Moment suspendu durant lequel j'hésite à me lancer ou non.
— Toi, tu veux ?
On n'a qu'une vie.
Elle hausse les épaules en repoussant une mèche rebelle qui s'acharne à lui obstruer la vue.
— J’avoue que l’idée m’a effleurée l'esprit, suggère-t-elle. Mais là, maintenant..., -elle semble entretenir une réflexion avec les hautes instances de sa conscience-..., y’a peu d’chance !
Elle rajoute en pointant le menton vers la bouteille :
— À moins que t'aies drogué le vin…
— Damned ! Je savais que j’avais oublié quelque chose !
Bon. On est pas plus avancé.
Je note quand même, dans un coin de ma tête, sa propension a passé la nuit avec le Mirek. J'ignore ce que ça révèle de mon pouvoir d'attraction ou de son état de misère sexuelle avancé mais c'est toujours bon pour l’orgueil.
Soudain, le grondement d’un moteur abrège notre échange. On tourne la tête en même temps, en direction des imposants piliers où s'érigent les Pégases dorés. Une paire de phares, pareil à des yeux de démon, s’engage à l’entrée du pont. Vous n'avez jamais vu de démon ? Sondez à l'intérieur de vous.
Ava et moi, observons le véhicule s’approcher, hypnotisées tels des hérissons par les yeux de lumière qui engloutissent la distance et la nuit sans jamais ralentir.
C’est une voiture noire, aux lignes agressives et aux vitres teintées. Un beau modèle selon l'état de mes connaissances -risibles- dans le domaine.
Et alors qu’ils n’avaient qu’à continuer leur route, nous contourner en ayant à peine besoin de se reporter, les pneus de la voiture se mettent à crisser -le cri du démon, vous suivez ?- ! Une des deux roues avant s’enfonce dans le bitume, entraînant l’arrière de la voiture à son niveau. Là voici à l’horizontale, en plein milieu du pont, prête à barrer le passage.
On échange un coup d’œil suspicieux avec Ava. Vous aussi vous suspiceriez de toutes vos forces à notre place.
Un ange passe. La portière côté conducteur s’ouvre. Le bruit d’un talon qui touche le sol. Une forme sombre s'extrait du véhicule, et doucement, surement, contourne la BM par l’avant.
Quand elle passe devant les phares, la violente lueur de ceux-ci, creuse sur la silhouette, des contours qui déclenchent aussitôt une alerte dans mon cerveau.
Ma gorge se noue tandis que je ressasse les paroles de Sami.
La personne s’arrête face à nous, sa posture est plus raide que les piliers des Pégases.
Désormais, on distingue chaque trait de son visage, chaque détail de son accoutrement.
C’est un homme.
De noir vêtu.
Avec un chapeau et des lunettes de tueurs à gages.
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Paige
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John Wait
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cedemro
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