La_petite_plume PERE NOEL CHAUD BOUILLANT Chapitre 2 - Cher Niklas,

Chapitre 2 - Cher Niklas,

Mon père termine de désinfecter ma tempe avec un coton imbibé d’alcool.


— Bien, je vous laisse. Je dois foncer à la salle, nous prévient Julia en prenant son sac.


— Fais attention sur la route, soupire notre père en rangeant son matériel. Tu as de la chance Elena, c’est passé tout près de ta cicatrice.


Il pose un pansement avec une délicatesse exagérée, comme si j’étais encore sa gamine de quinze ans. Mais bon, je ne dis rien, histoire de lui faire plaisir.


— Merci. Et sérieusement, apprends à Julia à conduire.


— Ta sœur sait conduire.


Ah bon ? Où ça ? Dans Mario Kart ?


— Elle a juste du mal à rester concentrée, poursuit mon père. C’est déjà un miracle qu’elle arrive à gérer d’aussi gros événements. Mais je trouve que s’investir dans ce genre de choses l’aide avec son trouble de l’attention. Ça lui donne un but, quelque chose sur quoi se focaliser.


— Elle pourrait se focaliser sur des petits sablés ?


— Et faire brûler la maison ? ironise-t-il.


Je ris avec lui, me rappelant du Noël 2018, quand Julia avait mis le feu au four en essayant de cuire des bonshommes en pain d’épices. Elle avait quatorze ans et les avait laissés cramer à cause d’un nouvel épisode de Winx Club à la télé.


Mon regard se pose sur la décoration intérieur de la maison de mon enfance, où rien ne change jamais vraiment. Ce lieu a quelque chose de rassurant. Les lumières de Noël scintillent dans le salon, diffusant des teintes rouges et dorées. Une odeur sucrée flotte dans l’air, mélangée à celle du pin et du feu de bois. Le sapin, minutieusement décoré (sans doute par ma mère), trône fièrement près de la fenêtre. Une vieille décoration faite à la main casse un peu l’harmonie. Julia l’a sûrement accrochée là avec insistance, pour embêter ma mère.


— Elle est où, maman ?


— À la salle, elle aide ta sœur avec la décoration.


— Bien entendu.


Je me lève pour aller me réchauffer près de la cheminée où les flammes crépitent doucement.


— Je te fais un café ? Un chocolat chaud ?


— J’ai surtout envie d’un gros sandwich. J’ai trop faim. Un truc bien gras.


— Et dire que tu es la fille d’un médecin… Je te laisse vraiment t’empoisonner avec ces cochonneries.


C’est vrai qu’ici, tout est healthy. Mon père cuisine comme un chef et il est obsédé par la nutrition. Si seulement il savait que depuis que j’ai mon propre appart, mes repas consistent en chips au vinaigre et nouilles instantanées… Il ferait une syncope.


Je prends le temps de répondre à mes mails pendant qu’il me prépare un sandwich – pas aussi gras que je l’espérais, évidemment. Puis, il enfile son manteau. Il est déjà 18h, mais il doit partir en urgence à l’hôpital pour l’un de ses patients.


Dès qu’il claque la porte, j’allume la télé et pars en quête de la boîte de chocolats pralinés. Une fois trouvée, je commence à me goinfrer, bien installée sous un plaid.


Le bruit d’une clé tournant dans la serrure me tire de mon cocon sucré. Julia.


— Rentrée !


Je crache presque mon chocolat en voyant un reflet dans l’écran de la télé.


Un manteau rouge.


Je me retourne, la bouche à moitié pleine.


Cauchemar.


— Quand je l’ai renversé, il a perdu ses clés, explique Julia. Comme il fait nuit, je lui ai proposé de dormir ici, et on ira les chercher demain. Vu qu’on a une chambre d’amis qui ne sert pas…


Je me force à avaler mon chocolat tout en dévisageant l’homme que je voulais oublier.


— Tu déconnes ?


— Quoi, t’as peur du Père Noël, petite ? commence Niklas, un sourire amusé aux lèvres.


— Oui. Tu devrais peut-être enlever ta barbe et ce manteau rouge, ça aiderait, suggère Julia avec un grand sourire.


Très bien. Expose-lui mes peurs, Julia, vas-y. Quelle sœur exemplaire.


Niklas attrape sa fausse barbe et l’arrache d’un geste, révélant une barbe beaucoup plus courte, de quelques jours, parfaitement taillée, et… aussi blanche que ses cheveux. Il enlève ensuite son manteau, dévoilant un débardeur blanc moulant qui épouse ses biceps un peu trop musclés pour un simple Père Noël.


OK.


Bon, il est canon. Mais ça n’empêche pas qu’on héberge peut-être un escroc qui arnaque les parents pour des photos avec leurs gosses.


Ou pire.


Le genre de gars qui fait payer trois euros un bonbon et s’achète ensuite des chevalières qui, soit dit en passant, rendent ses mains… vraiment…


Je me mets une claque mentale. Regarde-le dans les yeux, Elena. Dans les yeux.


— Maman a dit oui ?


— Oui, confirme la principale intéressée en rentrant, son écharpe encore autour du cou.


— Et papa, il a dit—


— Ne t’en fais pas, je ne mange pas les enfants, plaisante Niklas.


MAIS QUEL CONNARD.


J’ai 23 ans.


Et il ne doit avoir que quelques années de plus.


Julia et ma mère explosent de rire. Évidemment qu’elles le trouvent charmant.


Bien sûr.


Quelle soirée de merde.


— Super, grogné-je en croisant les bras. J’espère qu’il ronfle pas.


— Non, mais je parle dans mon sommeil, annonce-t-il, faussement sérieux.


— Génial.


— Et je dors en caleçon.


Je cligne des yeux, choquée par son aplomb. Julia ricane.


— Très bien, je vais dormir dans une autre maison, m'exclamais-je.


— Ah, dommage. J’aurais aimé te montrer mes tatouages, se moque-t-il.


— Dommage ? C’est quoi ton but ? Rendre ce Noël encore plus traumatisant que celui de mes 17 ans ?


— Ça dépend… ton dernier Père Noël était aussi sexy que moi ?


Mon poing me démange.


Julia rit tellement qu’elle en pleure.


Ma mère, elle, secoue la tête, amusée.


— Bon, c’est pas tout ça, mais je vais préparer le repas, annonce-t-elle.


— Je viens t'aider, dit Julia en baillant.


Elles vont dans la cuisine et nous laissent seuls.


Merveilleux.


— Tu vas vraiment dormir en caleçon ?


— T’es curieuse ?


— Non. Je veux juste savoir si je dois me préparer à porter plainte.


Il rit, puis s’installe sur le canapé avec une désinvolture exaspérante.


— Allez, détends-toi, Elena.


Comment il connait mon nom celui la ? Julia parle vraiment trop.


— Je suis peut-être le Père Noël, mais promis, je n’ai aucun cadeau bizarre pour toi cette année.


— Bonne nouvelle. J’ai pas envie d’un traumatisme en édition limitée.


— Raison de plus pour qu’on parte sur de nouvelles bases, non ?


Il me sourit.


Je déteste ça.


Parce que son sourire est bien trop séduisant pour un mec censé distribuer des cadeaux aux gosses.


Je souffle et pars vers ma chambre.


Ce Noël va être long.

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