Ner_or Outburst Intro

Intro

Autrefois, j'ai eu un cœur.



Quand la brise passait, elle chantait pour moi, son murmure sibyllin envoûtait mes pensées. Je me laissais porter par ses bras invisibles, le souffle du vent dans mes cheveux, cette fraîcheur agréable qui semblait promettre un ailleurs meilleur. J'attendais qu'il m'enlace, mais il ne l'a jamais fait. Et pourtant, ce rejet ne m'affectait pas. Il nourrissait au contraire cet amour inconditionnel que j'avais pour le monde.


Je faisais partie des grands romantiques, je suppose. Dès mon plus jeune âge, je ressentais une mélancolie douce, inexplicable, pour des pensées et des rêves.


Tout ce qui était éphémère m'attirait.


J'oubliais que l'éphémère cachait souvent des mensonges. Pathétiquement, j'ai fini par comprendre que cette mollesse qui battait en moi n'était rien de plus que des illusions tissées par mes espoirs.


On dit que derrière la haine se cache l'amour, ça me rappelle le concept des livres Ennemies to lovers. Sauf que pour moi, c'était le contraire. Le vent, qui avait été doux, est devenu brusque, violent. Peut-être l'avait-il toujours été, cependant je refusais de le voir. J'étais naïve, insouciante, trop rêveuse. Il m'a utilisée, trahie. Je croyais que le chaos autour de moi était le fruit de mon esprit, que c'était ma propre perception qui déformait les événements.

Mon véritable ennemi était l'espoir. Il m'a rendue amère.


Toutes ces promesses que le vent m'avait soufflées se sont révélées creuses, mensongères. Le vent m'a emportée, m'a fait voyager. Chaque paysage qu'il me dévoilait me coupait le souffle. Je vivais intensément chaque instant, oubliant complètement ce murmure sourd qui grandissait en moi, cette inquiétude enfouie. Je croyais me fier à mon intuition, ou peut-être que j'avais juste besoin de croire en quelque chose ? Peut-être que j'avais été égoïste ? J'ai cru qu'il serait différent avec moi... Et puis, du jour au lendemain, la tornade est arrivée.


Ses vents tourbillonnants m'ont encerclée, m'ont enfermée en leur cœur. Pendant des mois, j'étais coincée dans cette tempête sans fin, incapable d'en sortir. Et lorsque je pensais enfin être libre, je me suis retrouvée dans un marécage. Seule, avec pour seule compagnie le bourdonnement incessant des moustiques. Au lieu d'un champ fleuri parmi les arbres et les oiseaux, je reposais sur une surface boueuse, engluée, impuissante. J'essayais de m'en sortir, de bouger, mais la pluie est tombée. Elle m'a enfoncée plus profondément dans cette terre glaiseuse.


Bref, qui l'aurait cru ? Ces personnes, autrefois chéries et respectées, sont devenues mes muses. À travers la douleur et la déception, elles m'ont offert un miroir, un reflet de moi-même que je n'aurais jamais su voir autrement. Ironiquement, c'est de leur trahison que sont nées mes plus profondes inspirations.


Je retirai mon casque, comme pour me détacher de ces pensées, et m'enfonçai dans le siège rouge du cinéma. Les lumières se tamisaient et le murmure de la salle s'évanouissait alors que les publicités de début de séance s'estompaient. Le film commençait. "The Fall", de Tarsem Singh. J'observais sans vraiment regarder, encore perdue dans ce marécage qui m'avait hantée. Le contraste était si frappant – ce monde visuel à l'écran, chargé de rêves et de fantaisies, et mon propre monde intérieur, ravagé par des illusions brisées. Il y avait un lien, je le sentais. Une résonance étrange entre les histoires que je voyais se tisser à l'écran et celles qui tournaient en boucle dans ma tête.


Je me rendis compte, après tant d'années, pourquoi j'aimais éperdument ce film. Ce n'était pas seulement pour ses images éclatantes, ses paysages irréels, ou pour l'innocence du récit qui semblait effleurer la réalité sans jamais la toucher. Non, c'était bien plus que cela. Le film me parlait. Il reflétait quelque chose de moi que je n'avais jamais su formuler, néanmoins, chaque visionnage résonnait plus profondément.


Comme les personnages à l'écran, je m'étais laissée bercer par des illusions, des histoires racontées pour échapper à la brutalité du monde. Et comme eux, j'avais chuté. Ce n'était pas l'histoire d'un rêve devenu cauchemar, mais celle d'un espoir mal placé, d'une trahison sourde, d'une quête de rédemption à travers la douleur. Peut-être que, moi aussi, je cherchais à retomber en enfance, là où tout était encore possible ?


Non. J'avais surpassé cette idée. Mes muses avaient créé en moi une haine profonde contre l'amour et pour me venger, j'avais mis à feu mon île bien-aimé. C'était l'unique moyen de l'atteindre, de toucher son cœur pourri. J'avais rependu un chaos et je l'avais photographié. Ce moment capturé en milliers de pixel était devenu une œuvre reconnue dans le monde. Je l'avais appelé :


La fin de l'insouciance.

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