Fyctia
5 minutes
Chapitre 2
Edouard.
Je mords dans une pizza quatre fromages, à coup sûr, surgelée, mais qui n’a étonnement pas si mauvais goût que ça. De toute façon, je pense que l’odeur de fumée ambiante a fini par altérer un peu mon sens du goût. Pourtant je repose le morceau que j’ai entamé tout en essayant d’avaler mécaniquement la bouchée. Mon estomac est noué par l’angoisse d’être entouré d’autant d’inconnus. Me voilà donc à la fameuse soirée promise hier par Aristide. Je suis assis, pour ne pas dire avachi, dans un vieux canapé blanc, et je regarde les gens se déhancher sur la musique, propulsée à plein volume sur des enceintes disposées dans la pièce. Une soirée banale, de la musique banale, avec des lycéens banals. En réalité, je ne sais même pas trop ce que je fais là parce que les soirées n’ont jamais été mon truc, je n’arrive pas à m’amuser et je me sens comme distancé de la réalité et des autres. Aristide m’a dit de venir à cette soirée dans l’espoir que je me fasse des potes dans mon lycée, mais je n’ai pour l’instant réussi qu’à rester dans mon coin en essayant de devenir invisible. Je crois que cela fonctionne bien. Je me répète intérieurement pour la dixième fois de la soirée au moins que j’aurais été bien mieux dans ma chambre. Mes paumes commencent à devenir moites et j’essaie d’évacuer ma tension en frottant ma clavicule avec mes ongles, laissant des marques rougeâtres sur ma peau.
Des accords à la guitare électrique s’échappent soudain des enceintes et un groupe de quelques filles se met à crier, il me semble même que l’une d’elle hurle « c’est ma musique ! » et j’esquisse un sourire discret puisque c’est sans doute la troisième fois qu’elle dit quelque chose du genre, à chaque fois pour une musique différente. Je me redresse légèrement et sors mon portable de ma poche droite tout en avalant une gorgée de bière. J’ouvre une application qui permet de reconnaître une musique et au bout de quelques secondes, le titre de la musique apparaît au milieu de mon écran « Five minutes – Her » en même tant que le chanteur entame le refrain dans la pièce. En regardant à travers la baie vitrée j’aperçois mon frère et son meilleur ami, au milieu d’un petit groupe de fêtards, pliés de rire en se passant un joint sur la terrasse. Les néons projettent une lumière violacée sur les danseurs qui balancent leurs bras au-dessus de la tête, le sourire aux lèvres, au rythme de la musique en essayant de ne pas renverser le contenu de leur verre. Sans m’en rendre compte, je bas la mesure avec mon menton tant la musique est entraînante. Malheureusement, cet intermède de pur plaisir auditif prend fin plus rapidement que je l’aurais aimé lorsqu’un garçon décide de passer à la musique suivante de la playlist. Je soupire puis allume mon portable. 4h21. Il est plus tard que je le croyais. Je tente de me lever difficilement et déambule dans le couloir pour chercher une chambre pour passer la nuit. Par chance, j’en trouve une rapidement et je m’allonge sur un matelas négligemment posé sur le sol, toujours vêtu de mon jean noir et de mon tee shirt noir uni. Alors que mes yeux se fermaient presque il y a quelques minutes, je n’arrive pas à trouver le sommeil, même si la musique s’arrête rapidement et que peu à peu tout le monde semble aller se coucher. Je me retourne une nouvelle fois sur les draps, comme je le fais déjà depuis une bonne heure, constamment dérangé par les derniers fêtards à avoir veillés qui viennent dans la chambre pour se poser sur un matelas. En glissant une main dans ma poche pour récupérer mon téléphone je constate qu’il est 5h27 du matin.
« Putain », je grogne, extrêmement agacé par cette insomnie inattendue. Je décide de me lever sans un bruit pour ne pas réveiller les autres occupants de la chambre. Une fois hors de la chambre, je me dirige vers le salon, et, comme je m’en doutais, la pièce est certes jonchée de gobelets mais elle est vide, à mon plus grand bonheur. Personne n’a pensé à refermer la baie vitrée donc la fraîcheur de la fin d’été me saisit et je frisonne. Je décide de me diriger vers la cuisine pour me servir un verre d’eau. Hum, finalement, je ne vais peut-être pas me servir dans un placard comme si c’était chez moi alors que je ne connais même pas le propriétaire de cette maison. Lorsque je me penche pour boire au robinet, j’entends une voix s’élever dans mon dos.
« Tu sais que tu peux prendre un verre, mec »
Je me retourne brusquement et dévisage la fille qui me fait face. Enfin dévisager est un bien grand mot puis que je n’en mène vraiment pas large, mon habituelle et insupportable timidité refait surface et je sens le rouge me monter aux joues. Pourtant, une étrange sensation me saisit et je comprends que j’ai déjà vu cette fille, mais impossible de me rappeler où. Peut-être que je l’ai aperçue pendant la soirée ? Je ne suis même pas si éméché que ça, je n’ai bu qu’un ou deux verres, donc je suis plutôt sûr de mon impression. Pourtant à cette fête il y a que des gens de mon nouveau lycée, donc des inconnus pour être plus clair. À part mon frère et Aristide évidement, mais je ne les ai pas croisés de la soirée puisqu’ils traînaient avec leurs potes sur la terrasse. Ce qui constitue bien évidement une raison suffisante pour ne pas essayer d’aller les voir puisque cela impliquerait de me confronter à leur groupe d’amis ce qui est, bien entendu, impensable.
Je me demande si c’est chez elle, ici ? Je n’en sais vraiment rien, et c’est vraiment super gênant.
« -Ah merci c’est gentil, j’osais pas me servir, je bafouille.
-Tu as l’air de me trouver gentille, dit donc, me répond la fille avec un sourire narquois. »
Je ne sais comment réagir pendant quelques secondes. Soit je n’ai pas compris la référence, soit elle est super bizarre.
« -Euh... pourquoi ? je lui lance.
-Non c’est juste que la dernière fois qu’on s’est parlé tu m’as aussi dit ”merci c’est gentil”, rigole-t-elle, creusant une fossette dans sa joue. »
Ça y est. Je sais où je l’ai vu. C’est la fille qui m’a rendu ma veste en jean quand je l’avais oubliée en classe. Je me détends peu à peu.
« -Ah mais je te reconnais, désolé je ne me rappelais pas où je t’avais croisé, mais c’est toi qui m’as rendu ma veste hier.
-Pas de soucis. Mais alors toi tu es le frère jumeau de Paul, j’imagine ? C’est quoi ton prénom déjà ?
-Ouais c’est ça, je m’appelle Édouard. Et toi ?
-Victoire. Enchantée alors, Édouard, puisqu’il semble qu’on va être amenés à passer plus de 5 minutes ensemble. »
En effet, une année scolaire dans la même classe nous attend. Elle me rend la main et je la saisis, amusé par son geste, et nos regards se croisent.
9 commentaires
Mariie Lou
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MiXado
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Princilia Daci
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Laëtitia Berger
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