Fyctia

Je reste figée face aux deux personnes présentes devant moi, les yeux aussi ronds que des soucoupes. Je suis loin des exigences de beauté, parce que je fais plus un 42 qu'un 36, mais je suis plutôt à l'aise avec mon corps et mes formes. Pour autant, pas en étant à moitié à poil devant des inconnus.

— Mais qu’est-ce que tu fiches ici? m’assène sèchement Sam avec un regard amer, visiblement contrarié par ma présence.

— Vous, qu’est-ce que vous faites là? rétorqué-je aussi durement que lui en serrant fort le tissu contre moi.

— C’est la chambre qu’on nous a attribuée, intervient Pete, d’un air nonchalant, pas plus perturbé que ça.

— Attendez, il doit y avoir un souci, car cette chambre est la mienne, j'insiste, ma valise a été déposée ici.

— Tu devrais peut-être te rhabiller, propose le blond en jetant un œil à son ami puis moi, voyant qu'on se défie du regard. En revanche, ce sont nos valises aussi.

Une voix au loin se manifeste et je me rappelle seulement maintenant que ma meilleure amie attend toujours à l’autre bout du fil. Je ramasse le téléphone en tachant de fléchir les jambes suffisamment afin de ne pas offrir un spectacle des plus gênant à mes spectateurs.

— Ouais, louloute, je te rappelle, je suis face à une crise majeure là..

— Hum, ouais, j’ai cru entendre ça en effet, rigole-t-elle, ils sont mignons au moins?

— Bon je te laisse, bisous, dis-je en secouant la tête d'exaspération tout en raccrochant.

Le sourire de Pete me confirme qu’ils ont bien entendu les paroles de mon amie, mais je ne montre pas le moindre signe de gène, alors que mon cœur tambourine dans ma poitrine si fort qu'il pourrait presque s'en échapper.

— Il doit y avoir une erreur. Je vais m'habiller et ensuite je contacterai Eddie pour savoir ce qu'il en est..

—Pas la peine, je suis déjà en train de discuter avec lui, me coupe Pete tout en pianotant sur son téléphone, et aucune erreur, nous sommes bien dans la même chambre. D'ailleurs, il compte sur nous, fait-il en s'adressant à Sam qui n'a pas bougé d'un pouce et me reluque toujours, pour qu'on se tienne bien.

— Il croit quoi? Qu'on est des bêtes ? S'amuse Sam en détournant enfin le regard pour s'adresser à son ami.

— Hein, quoi? fais voir ça, je m'insurge en tentant de lui piquer son portable.

Sauf que dans ma précipitation et ne pensant plus à la tenue dans laquelle je me trouve, je desserre la prise sur ma serviette qui glisse laissant entrevoir un de mes seins.

Paniquée, je la remonte et leur hurle dessus. J'aperçois le sourcil du beau brun se soulever. Est-ce qu' il apprécie la vue? Non mais c'est pas le moment pour se poser ce genre de questions! Je dois, assurément, ressembler à une pivoine, car je sens le rouge me monter aux joues.

— Mais retournez vous, bande de pervers!

— Promis j'ai rien vu, s'amuse Pete.

— C'est toi qui te retrouve presque nue et c'est nous les pervers, remarque Sam en même temps.

Pour autant, ils se retournent tous les deux le temps que je puisse prendre ma valise et filer dans la salle de bain.

J'enfile ce qui me vient en premier, mes sous vêtements, un short en jean et un top sans manche noir. Ce n'est peut-être pas la meilleure couleur quand le soleil tape fort, mais j'ai pas le temps d'y penser, car je veux juste sortir d'ici. J'ai chaud, et ce malgré la climatisation et j'ai besoin d'air. Je prends deux minutes pour souffler et calmer les palpitations de mon cœur.

Quand je sors de la pièce, les deux collègues sont sur la terrasse et discutent en contemplant le spectacle de l'eau turquoise à perte de vue. C'est Sam qui me remarque en premier. Ses yeux bleus se rétrécissent quand il m'observe et j'ignore si c'est parce qu'il me trouve à son goût ou au contraire parce que ma présence le débecte. Il est tellement difficile à déchiffrer que ça en est déstabilisant.

— On se demandait qui allait prendre la chambre avec le grand lit.

— Bah c'est moi évidemment, je rétorque sèchement.

— Et pourquoi ça? explique moi, me presse t-il en ne détournant pas le regard et en se rapprochant si près que je n'aurai qu'à tendre le bras si je voulais le toucher.

Non pas que j'en ai envie.. quoique..

— C'est simple je suis la seule fille, et je ne vous connais pas! Hors de question que je dorme avec l'un de vous, vous pourriez être un tueur en série.

Je soutiens son regard ne voulant pas céder à son intimidation, malgré qu'il me dépasse d'une tête, mais Pete le prend par l'épaule ce qui le fait céder le premier.

Oui, victoire!

— Il te charrie, on avait décidé de te laisser la grande chambre, ça va de soi. Mais rassure toi, on est très gentil.

— Oui c'est ce que disent les meurtriers pour amadouer leur victime.

Je me retourne et emporte mon bagage dans ma chambre sans rien ajouter et en ressort aussitôt pour quitter la suite sous leur air ébahi.

Dans le couloir, je souffle tout l'air resté bloqué dans mes poumons et mes épaules se relâchent. Je ne m'étais pas rendu compte que j'étais à ce point tendue.

J'ai trente minutes devant moi pour explorer les environs avant de devoir revenir me changer pour la réception. J'ai hâte et à la fois, je suis angoissée par ce qu'il nous attend. Laurent De Yves n'est pas connu pour faire dans le simple et classique donc je peux m'attendre à tout.

Je dégaine mon téléphone et prends des photos et des notes qui alimenteront mon compte Instagram, l'immense piscine en forme d'haricot, l'architecture moderne de l'hôtel, tout passe devant mon objectif.

En flânant dans l'hôtel, je décide de rappeler mon amie. Il est tard à Paris, mais il est certain qu’elle ne dort pas encore. C’est une couche-tard et comme nous sommes samedi, elle est peut-être même en train de se préparer à sortir.

Elle me bombarde de questions concernant les deux photographes, mais je me garde bien de lui dire que l’un d’eux me perturbe plus qu’il ne devrait. Elle se marre quand je lui montre les décorations qui polluent chaque centimètres carrés.

Cette distraction me permet de ne plus gamberger et me change les idées si efficacement que je ne vois pas l'heure passée et risque d'être en retard si je ne me dépêche pas de retourner dans ma chambre pour me changer.