Fyctia

Du plus loin que je me souvienne, j'ai toujours détesté l'amour. Les histoires à l'eau de rose, ce n'était pas pour moi. Je n'étais d'ailleurs jamais sorti avec personne, même pas les amourettes d'été ni de primaire, personne. Je m'en sortais très bien seule, je n'avais pas besoin de quelqu'un à aimer ni de quelqu'un qui m'aimait. Le seul problème, c'était ma famille. J'en étais la déception et ils ne se privaient pas de me le dire clairement. Mes parents s’étaient mis ensemble au collège et ne s’étaient plus jamais quittés. Ils se sont mariés dès leur majorité. Pour eux, c’était inconcevable que quelqu’un soit satisfait de faire sa vie seul. Mon frère et ma sœur avaient eu le même parcours qu’eux, ils étaient mariés et avaient des enfants. Alors moi, vingt-cinq ans et toujours zéro copain au compteur, j'étais forcément la loupée de la famille. Le pire, c'était nos repas, surtout celui de Noël. Sur les tonnes qu'organisait ma famille chaque année, c'est le seul auquel j'assistais. Je me forçais à faire acte de présence une fois par an, pour le reste, je m'inventais des occupations. J'étais avocate, je disais donc souvent que je devais passer la nuit sur un dossier important.

La semaine d'avant Noël, on se donnait toujours rendez-vous chez mes parents pour confirmer notre présence et se donner les listes de cadeaux qui nous plaisaient et dans le cas de Jackson et Ashley, aussi celles de leurs enfants. On aurait pu se les envoyer par message, mais c'était notre tradition. Je venais à chaque fois, et tous les dix-sept décembre, je savais en fonction des questions à quelle sauce j'allais être mangée pour le réveillon.

Je suis donc, comme tous les ans, allée chez mes parents le dix-sept. Quand je suis arrivée, ma fratrie était déjà là, sans leurs enfants. Ivy, la fille de Jackson, et Cameron, le fils d'Ashley, croyaient encore au Père-Noël. On venait alors pendant une heure où ils étaient à l'école pour qu'ils ne nous voient pas nous organiser pour acheter leurs cadeaux. On a beaucoup parlé et c'est encore ma mère qui m'a posé la première question sur mes relations :

- Ça ne te donne pas envie d'avoir des enfants ou un mari de voir ton frère et ta sœur raconter leurs joies familiales ?

- Non maman, tu sais à quel point je déteste les enfants et il est hors de question que je m'encombre avec un mariage.

- Mais enfin chérie, tu as vingt-cinq ans, il va falloir s'y mettre ! s'exclama mon père.

- Je suis désolée, mais si c'est pour avoir les mêmes relations qu’Ashley et Jackson, je préfère mourir seule.

Le mari de ma sœur la trompait. Tout le monde le savait, mais c’était un sujet interdit. Je ne comprenais donc pas comment ma mère pouvait donner leur couple en exemple.

- Pour qui tu te prends ?! Tu critiques ouvertement nos mariages, mais tu t’es vue toi ?! Toujours seule à vingt-cinq ans, tu trouves pas qu’il y a un problème ?!

Ma sœur hurla ces paroles.

- Elle a bien raison, tu n'apprécies peut-être pas ma femme ni son mari, mais au moins nous, on a su avancer normalement dans la vie !

- Arrêtez de vous crier dessus ! Jackson et Ashley n'ont probablement pas trouvé des personnes parfaites, quoi qu'il en soit, personne ne l'est. Cependant, toi Hazel, tu n'as jamais trouvé personne, on aimerait que tu t'épanouisses complètement. expliqua ma mère.

- Eh bien, tu sais quoi maman ? Tu as tort, vous avez tous tort ! D'abord, j'ai quelqu'un, et en plus, lui, il est parfait. D'ailleurs, rajoutez une chaise pour le réveillon, il sera là. Je m'en vais, je dois aller le retrouver parce que lui au moins, il ne passe pas son temps à me rabaisser.

Tout le monde était choqué et ils n'ont même pas eu le temps de prononcer un seul mot que j'étais déjà dans ma voiture. J'ai commencé à rouler sans vraiment savoir où j'allais. Je me suis retrouvée dans un bar près de ma rue, au Jimmy's corner. Je me suis assise sur une chaise au comptoir et là, je me suis demandée pourquoi j'avais dit ça. Je n'avais absolument pas de copain, comment j'allais faire maintenant ? Je devais trouver une solution très rapidement.