Fyctia
21
New York, Appartement d’Adelie, 8 décembre
Après qu’Adelie a découvert mes yeux vairons, je me suis mis à moins porter mes lentilles, notamment quand nous n’étions qu’avec la bande. Puis, quand on a commencé à sortir ensemble, j’ai totalement arrêté.
Et bien sûr, Adelie avait raison, cette particularité m’a apporté un nouveau succès auprès des filles. Je ne compte plus le nombre de jeunes femmes que j’ai vu porter des lentilles pour imiter mon hétérochromie durant les concerts. Un article a même titré « Bennett Lowell, le guitariste au regard magnétique, hypnotise les foules ».
- Benn ! Tu goutes sur mon parquet !
La voix d’Adelie me rappelle à l’ordre et je réalise que je suis toujours planté dans l’entrée, mes vêtements dégoulinant sur le sol dans un ploc-ploc régulier. Je commence donc à retirer mes chaussures et mon pantalon et quand je lève la tête pour lui demander où je les mets, je découvre un spectacle qui fait monter ma pression sanguine, notamment dans mon entrejambe.
À quelques mètres de moi, Adelie a retiré son jean et le collant qu’elle portait en dessous, dévoilant ses cuisses rondes couvertes de taches de rousseur et ses fesses délicieusement moulées dans une culotte en dentelle kaki.
J’ai à peine le temps de me remettre de cette vision, quand elle enlève pull et tee-shirt, m’offrant une vue plongeante sur sa sublime poitrine dissimulée par un soutien-gorge assorti à sa culotte.
Le ploc-ploc est toujours là, mais impossible de savoir s'il vient de mes vêtements ou de la bave qui doit coule de ma bouche.
Elle est tellement belle, tellement désirable que j’en oublie de penser ou de respirer. Soit c’est une manière particulièrement tordue de me torturer, soit elle n’a pas conscience de l’effet que sa tenue a sur moi, parce qu’elle se met à déambuler dans l’appartement le plus naturellement du monde.
- Tu es en hypothermie ou quoi ? Ne me dis pas qu’il va falloir que je t’aide à retirer tes fringues, quand même.
- Je pense qu’il serait plus sûr pour toi, et pour moi, que tu ne me touches pas pour l’instant, ma beauté.
Le regard d’Adelie dérive vers mon entrejambe. L’effet qu’elle me fait s’y affiche très clairement, difficile à dissimuler derrière la seule barrière de mon caleçon. Ses yeux fixent une seconde de trop le renflement de mon sexe. Le désir entre nous est toujours là, comme tout le reste. Et je le regarde s’éveiller doucement chez elle, comme après une longue hibernation.
Un instant, je me demande si elle a touché d’autres hommes depuis notre séparation, été caressée par d’autres mains que les miennes, fait l’amour avec d’autres que moi, et la bile me monte à la bouche.
Je repousse loin cette pensée. Ce qu’elle a fait durant mon absence ne me regarde pas. Je n’ai aucun droit sur elle, et je le sais. Ce qui ne m’empêche pas de tester les limites d’Adelie. Avec une lenteur calculée j’enlève mon sweat et je suis presque sûr de la voir déglutir.
- Ce que tu vois te plait, Delilah ?
- Tu es… tu as vachement… Je… Tu sais quoi je vais aller prendre une douche pour me réchauffer. Tu sais où sont les serviettes, fais comme chez toi.
Elle pivote tellement vite sur elle-même qu’elle manque se prendre le mur. Évidemment, je ne peux pas retenir mon éclat de rire.
- La ferme ! gronde-t-elle avant de disparaître dans la salle de bain.
Je lui fais toujours de l’effet, et celle seule pensée me fait entamer une petite danse de la joie.
Jusqu’à ce que mes yeux se posent sur les nombreuses photos qui ornent le frigo.
Certaines me sont familières, d’autres pas du tout. Je m’approche pour les voir de plus près. Je suis presque étonnée de découvrir qu’à une ou deux exceptions près, ce ne sont que des photos de la bande. J’aurais pensé qu’Adelie aurait fait disparaître toute trace de ma présence à peine l’avion envolé, mais visiblement non.
Sur l’une d’entre elles, je reconnais le premier Halloween des filles. Adelie est née le 31 octobre, ce qui nous fait deux raisons de célébrer cette journée. Tous les ans, nous avons assisté à la parade puis nous sommes allés à la fête organisée par Juillard avant de rentrer à la coloc nous gaver de gâteau et de cochonneries. Tout était si simple à l’époque que ça me fait presque mal d’y repenser.
Une autre photo attire mes yeux, un autre Halloween visiblement. Les filles sont déguisées en Super Nana et entourent Nathan, grimé en Papa Professeur, l’effet est génial.
Je ne connais pas cette photo, surement prise il y a quelques semaines. Nous étions à Séoul pour Halloween cette année, loin, tellement loin, beaucoup trop loin.
Je ferme les yeux un instant, juste le temps que le chagrin reflue. Quand je les rouvre mon regard est attiré par le mur de verre fumé qui sépare la salle de bain du reste de l’appartement. J’y devine Adelie en ombre chinoise et je crois bien que je bave de nouveau à la vue de ses courbes.
Pour éviter de penser à tout ce que je rêve de lui faire dans cette salle de bain, ce lit, ce canapé, ce comptoir de cuisine, tout ce que je lui ai déjà fait dans tous ces endroits, je recentre mon attention sur les photos.
Remise de diplôme, moment en couple ou en bande, virées entre filles, répétitions, concert, fêtes… les meilleurs moments de ces trois dernières années s’affichent fièrement devant moi.
Un nouveau cliché éveille mon attention. Adelie est assise devant un énorme gâteau sur lequel sont plantées une bougie en forme de deux et une en forme de un. Derrière elle, les visages souriants d’Isabelle, Nathan, Elena et mes parents.
- C’était quand ça ?
- Bordel Benn ! On frappe avant d’entrer ? L’intimité, tu connais ?
Est-ce que j’ai déboulé dans la salle de bain sans réfléchir ? Peut-être bien, oui. Et croyez-moi, avoir l’air décontracté alors qu’elle se tient nue, à moins de deux mètres de moi, me demande un effort surhumain.
L’air est saturé d’humidité, les miroirs embués. Adelie ne prend ses douches que glacées ou brûlantes, en fonction de la saison.
Je m’assieds sur la lunette des toilettes pour lui faire comprendre que je ne bougerai pas tant que je n’aurai pas eu de réponse. Cependant je garde les yeux baissés vers le sol et tends la photo vers elle.
- T’es vraiment un crétin ! Tu déboules comme un malade pour me montrer ça. Ça ne pouvait pas attendre que j’aie fini ? C’est mon anniversaire de cette année. Ta mère nous a invités un week-end pour qu’on fasse la fête.
La douleur refait son apparition, plus forte cette fois, et me brûle littéralement de l’intérieur.
C’est toi qui as fait le choix de partir, me rappelle ma traîtresse de conscience. Tu ne peux t’en prendre qu’à toi si tu as manqué tout ça. Tu ne peux pas en vouloir aux autres d’avoir continué à vivre.
Je parviens malgré tout à donner le change en articulant :
- Quand je pense au foin que tu as fait la première fois qu’on est allé chez eux, je ne pensais pas que tu y retournerais de ton plein gré.
15 commentaires
Rachel Dena
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Il y a un an
Lola B. Thomas
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Il y a un an
Laureline Maumelat
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Il y a un an
Christelle Emilie
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Il y a un an
Emeline Guezel
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Il y a un an