Fyctia
7
Il est 14h57 et toujours aucune trace d’Adelie. Techniquement, elle n’est pas encore en retard, pourtant une part de moi s’inquiète à l'idée qu’elle puisse ne pas venir du tout.
À moins que ce ne soit ma culpabilité qui me rattrape. J’ai peur d’avoir été trop loin avec elle hier.
Je suis le premier surpris du soulagement que je ressens quand elle apparaît enfin à la porte du café, son éternel bandeau rouge entremêlé à ses boucles blondes dans une tresse compliquée.
- Salut, ma beauté ! Voilà ton tablier ! Prête pour ton premier jour ?
Au lieu de se saisir du morceau de tissus que je lui tends, elle reste plantée face à moi, raide et mal à l’aise.
- Je ne suis pas venue pour travailler… En réalité, je suis venue pour te dire que je ne voulais plus de ce job finalement, et que tu peux l’offrir à quelqu’un d’autre.
Ma culpabilité remonte en flèche. Je suis allé trop loin, bien sûr que je suis allé trop loin. C’est ce que je fais toujours. J’adore taquiner mon monde, mais quand je commence, je suis incapable de m’arrêter avant qu’il ne soit trop tard et que les gens soient blessés. Évidemment qu’Adelie n’allait pas être l’exception à la règle.
Elle est fière, je l’ai su dès notre première rencontre, fière au point de rejeter mon offre pour éviter le gigantesque idiot que je suis. Et je refuse qu’elle renonce à ce travail par ma faute.
- Hewitt attend ! Si c’est à propos de ce qui s’est passé hier, je suis vraiment désolé de t’avoir mise mal à l’aise, ce n’était pas le but.
- Tu m’as demandé de chanter dans un café blindé.
- Ok, peut-être que c’était le but. Mais je voulais juste te taquiner, t’embêter. Visiblement, j’ai dépassé les bornes et je te demande pardon pour ça.
Elle me fixe, interdite. Puis elle soupire.
- Je ne sais pas si c’est une très bonne idée qu’on travaille ensemble, Bennett. Toi et moi, on s’est vus moins de dix fois depuis qu’on s’est rencontrés, et à chaque fois, on s’est marché sur les pieds ou rentré dedans. Je ne suis pas sûre que passer tout notre temps libre ensemble ne se termine pas en meurtre ou en internement forcé.
J’ai du mal à retenir mon sourire.
- Je te rends folle, ma beauté ?
Elle roule des yeux.
- Tu vois, c’est exactement de ça que je parle ! Tu ne prends jamais rien au sérieux et tu passes ton temps à flirter avec moi comme si j’étais une de tes fans.
- Tu as raison, je fais ça souvent, mais jusqu’ici personne ne s’en était plaint. Laisse moi le temps de me faire au changement. Aller, tu ne vas quand même pas renoncer à un job en or juste parce que je suis un petit con trop sûr de son capital séduction ?
- Je pourrais, pour éviter d’étrangler le petit con en question avec l’archet de mon violon.
- L’archet de ton violon ?
- J’ai vu ça dans un livre, un Agatha Christie, je crois. À moins que ce ne soit dans un tome de Détective Conan et que l’arme soit une corde de piano, bref tu vois ce que je veux dire. Tu ne vaux pas la peine que j’aille en prison.
- Tu as parfaitement raison. Et je ne vaux pas la peine que tu refuses ce travail non plus, crois-moi. Accepte-le, Hewitt. Je te promets que je serai sage.
Elle lève un sourcil dubitatif.
- Permets-moi d’en douter. Sincèrement Bennett, je pense que toi et moi travaillant ensemble, c’est une très mauvaise idée.
- Et si on faisait un marché ?
- Un marché ? Quel genre de marché ?
Elle a l’air sceptique, mais je ne me laisse pas démonter.
- J’arrête de t’embêter, ou du moins pas pendant les horaires de travail, et en échange, tu acceptes ce job et tu me laisses te prouver que je peux être quelqu’un de parfaitement fréquentable quand je m’applique. Ton frère est mon meilleur ami et je pense que toi et moi, on pourrait aussi devenir amis si tu me donnes une nouvelle chance.
Elle hésite un instant. Je peux presque lire sur son visage qu'elle est en train de peser les pour et les contre.
Pour : il lui faut un boulot.
Contre : moi.
Pour : les horaires sont parfaitement adaptables en fonction de son emploi du temps à la fac.
Contre : moi.
Pour : pas de travail en soirée.
Contre : moi, moi, moi.
- Pas de surnoms débiles, annonce-t-elle soudain en pointant un index menaçant dans ma direction.
Je lui souris de toutes mes dents et elle m’imite plus timidement.
- Pour ça, je ne peux rien te promettre. On a un deal alors ?
- On a un deal.
- Génial ! Maintenant enfile ce tablier, ton service a commencé il y a cinq minutes déjà.
Elle se dépêche de le nouer autour de sa taille, puis me suit dans la réserve pour y déposer ses affaires.
- Une dernière chose avant que je ne te montre comment te servir du percolateur, cette relation est basée sur l’honnêteté, donc si jamais tu trouves que je vais trop loin d’une manière ou d’une autre, je veux que tu me le dises, d’accord ?
Je suis très sérieux, ce dont elle semble se rendre compte puisqu’elle acquiesce d’un solennel hochement de tête.
- Parfait ! Allez au travail. En revanche, je dois te mettre en garde contre mon incroyable personnalité. Une exposition prolongée et tu risques de ne plus pouvoir te passer de moi.
- Bennett ?
- Oui ?
- Tu vas trop loin.
J’ouvre la bouche, prêt à m’excuser de nouveau, quand je réalise qu’un sourire moqueur étire ses lèvres.
- Je te préviens juste ! Tu verras Hewitt, dans trois mois, toi et moi on sera les meilleurs amis du monde.
- Je ne parierais pas là-dessus, si j’étais toi.
- Au contraire, je suis prêt à parier plutôt deux fois qu’une. Et toi Hewitt, cap ou pas cap ?
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Jodie P.M
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