Bérengère Ollivier Nos coeurs sous la neige Baby, it's cold outside 4

Baby, it's cold outside 4

— Tout va bien ? demanda-t-il en désignant l’écran.

Je relevai les yeux vers lui, un sourire en coin.

— Oui, oui, répondis-je, avant d’ajouter plus bas : je vérifiais juste si j’avais un message de Mia.

C’était un mensonge à moitié. J’aurais dû dire que je regardais si mes enfants avaient besoin de moi, si tout se passait bien pour eux. Mais les mots s’étaient bloqués avant de franchir mes lèvres. Parce qu’à cet instant précis, je n’avais pas envie d’être la mère d’une pré-adolescente trop lucide et d’un petit garçon espiègle. Parce que, pour la première fois depuis des années, je redevenais simplement moi.

Et puis, il y avait aussi Mia. Mia qui, sans que nous ayons eu besoin d’en parler, s’était approprié la maternité de mes enfants devant Gabriel. Une inversion des rôles tacite. Si elle était la mère, alors moi, pour ces vacances, je serais celle qui n’avait pas d’attaches. Je rangeai mon téléphone, tentant d’ignorer la drôle de sensation que cette décision faisait naître en moi. Baptiste ne chercha pas à en savoir plus, mais il me regarda avec cette lueur dans les yeux, celle qui donnait l’impression qu’il savait toujours plus de choses qu’il ne le laissait entendre.

La soirée toucha à sa fin, et il insista pour me raccompagner jusqu’au chalet. L’air était glacial, mais je ne le sentais pas. Pas vraiment. Pas avec la chaleur diffuse qui me parcourait encore depuis notre dîner. Nous marchâmes côte à côte, sans précipitation, profitant du silence paisible de la station endormie. Les lampadaires projetaient une lumière douce sur la neige, créant une atmosphère feutrée, presque irréelle. À plusieurs reprises, nos épaules se frôlèrent, et chaque contact fugace fit monter en moi une tension douce, délicate, mais irrésistible. J’avais envie qu’il me touche, qu’il me prenne la main, qu’il me retienne encore un peu dans cette bulle où, pour une fois, je n’étais pas une mère, pas une femme débordée, juste… moi. Quand nous arrivâmes devant le chalet, Baptiste s’arrêta, les mains dans les poches de son manteau. Il me fixa un instant, son regard plus intense que jamais.

— Je… j’aimerais vraiment te revoir, dit-il, un peu hésitant, comme s’il cherchait ses mots. Ce n’est absolument pas dans mes habitudes, pourtant, de demander à une jolie fille que je ne connais pas de la revoir si rapidement.

Je déglutis. La confession me surprit. Pas dans le sens où je n’avais pas senti la tension entre nous — elle crépitait depuis qu’il avait attrapé la bouteille de vin sur la table et versé nos verres comme s’il était en train de lire en moi. Mais entendre ces mots… Je me figeai un instant, prise entre l’envie de céder et celle de me protéger. Alors, pour alléger ce qui pesait soudain dans l’air, je soufflai, taquine :

— Tu dois dire ça à toutes les touristes que tu croises ici à la station.

Son expression changea aussitôt. Son sourire s’effaça légèrement, et quelque chose dans son regard s’éteignit.

— Ah. C’est ce que tu penses de moi ?

Il ne semblait pas en colère, juste… touché. Blessé même.

Je me mordis la lèvre. Je n’avais pas voulu le vexer, loin de là. Au contraire, j’avais juste cherché à masquer mon propre trouble.

— Baptiste, je…

Il haussa un sourcil, attendant la suite, mais aucun mot ne vint.

Un sourire bref passa sur son visage, mais ce n’était plus le même.

— Bonne nuit, Agathe.

Sa voix était douce, mais teintée d’un léger retrait. Il allait partir.

Et moi, au lieu de le retenir, au lieu de faire ce que mon corps tout entier hurlait de faire, je me mordis la lèvre encore plus fort, mon regard glissant vers sa bouche. J’avais envie de l’embrasser. Tellement envie que mon cœur battait dans ma gorge. Mais je ne bougeai pas. Je le laissai reculer d’un pas, puis deux. L’air autour de moi sembla se refroidir instantanément. Il s’éloignait. Mais soudain, après quelques pas, il s’arrêta et se retourna vers moi. Ses yeux accrochèrent les miens, et cette lueur taquine, ce défi silencieux qui m’avait tant troublée tout au long de la soirée, revint s’y loger.

— Je te prouverai le contraire, déclara-t-il, un sourire au coin des lèvres. Rendez-vous demain pour une surprise.

Je clignai des yeux, surprise. Un frisson remonta le long de ma colonne vertébrale, un mélange d’excitation et d’anticipation pure.

— Demain ? répétai-je, comme une idiote en ouvrant grand les yeux.

— Demain, confirma-t-il avant de s’éloigner définitivement dans la nuit.

Je restai plantée là quelques secondes, le souffle court, puis rentrai en refermant doucement la porte derrière moi. Le cœur battant, un sourire irrépressible étirant mes lèvres. Je me sentais légère, euphorique, presque adolescente. Et demain, demain semblait déjà trop loin.

Sur la grande table en bois massif m’attendait un post-it rose fluo où je reconnus l’écriture de Mia. Le message était court et sans fioritures :

« Tout va bien,

ne t’inquiète pas,

je suis parti me coucher.

XOXO Mia »

suivi d’un petit cœur dessiné à côté. Je hochai la tête rassurée, et avant de laisser l’excitation m’emporter totalement, je montai les escaliers à pas feutrés et poussai doucement la porte de la chambre des enfants. Luna était recroquevillée sur le côté, sa respiration calme et régulière, tandis qu’Arthur dormait profondément dans une de ses positions insolites, sa peluche serrée contre lui. Un poids imperceptible s’échappa de ma poitrine. Ils allaient bien. Après avoir refermé la porte sans bruit, je me dirigeai vers la chambre de Mia et l’entrouvris légèrement. Elle était affalée sur son lit, un masque de nuit sur les yeux, respirant avec un léger ronflement. Un rire silencieux me secoua. Elle ne souhaitait sans doute pas être dérangée. Refermant la porte sans faire de bruit, je rejoignis enfin ma chambre, me glissant sous les couvertures avec un soupir. Mais le sommeil refusa de venir. Car tout ce que je voyais, c’était le regard de Baptiste. Et tout ce que je ressentais, c’était l’écho de son “demain” qui résonnait en moi comme une promesse.


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7 commentaires

Mapetiteplume

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Il y a 8 jours

Il y a quelques phrase avec plusieurs que dedans et quelques répétitions que tu pourrais facilement gommer. Utilise les synonymes ☺️ J'aurai tellement voulu qu'elle l'embrasse 😭

Bérengère Ollivier

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Il y a 8 jours

Oui, c'est la version premier jet. Pour le bisous, wait and see

Bérengère Ollivier

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Il y a 8 jours

Je m'occupe de Clara pendant l'après-midi ;)

Zebuline

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Il y a 11 jours

Je le demande bien ce que ça a donner la conversation avec Gabriel

Bérengère Ollivier

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Il y a 10 jours

Hehe, surprise à venir lire bientôt

Beryl L

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Il y a 13 jours

Il me manque quelques likes aussi pour débloquer mon chapitre. Bonne chance à toi pour la suite, ton histoire a l'air chouette!
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