Fyctia
Baby, it's cold outside 3
Il y avait quelque chose dans sa voix, une sincérité qui me toucha plus que je ne l’aurais cru. Pour la première fois depuis longtemps, je me sentais vue. Pas en tant que mère, pas en tant que femme qui gère mille responsabilités, pas en tant que manager d’une chaine de restauration qui pallie tous les problèmes, mais juste… moi.
L’atmosphère se fit plus douce, plus intime. Les conversations aux tables voisines s’effacèrent peu à peu, ne laissant que la chaleur diffuse des bougies et la présence troublante de Baptiste en face de moi. Son regard s’attarda sur moi plus longtemps que nécessaire, et je sentis une légère chaleur monter le long de ma nuque.
— Tu sembles… différente, lâcha-t-il après un moment.
Je haussai un sourcil, amusée.
— Différente comment ?
Il fit tourner son verre entre ses doigts, réfléchissant.
— Moins… sur tes gardes. Plus… toi-même.
Je mordis ma lèvre inférieure sans même m’en rendre compte. Il avait raison. Pour la première fois depuis longtemps, je me sentais légère, comme si j’étais redevenue cette adolescente insouciante qui flirtait juste pour le plaisir du jeu. Alors que nos verres touchaient à leur fin, je fis discrètement signe au serveur.
— Une autre bouteille ? demanda Baptiste, amusé par mon initiative.
Je hochai la tête, parcourant rapidement la carte des vins avant de faire mon choix.
— Une bouteille de Sainte-Croix-du-Mont s'il vous plait, annonçai-je en levant les yeux vers le serveur. Quelque chose de subtil, un vin complexe avec une belle rondeur, alliant douceur et une touche fraîche d’acidité.
Baptiste esquissa un sourire appréciateur.
— Je crois que tu ne cesses de me surprendre, souffla-t-il. Encore un excellent choix.
Je haussai une épaule, faussement modeste, tandis que le serveur repartait avec un hochement de tête approbateur.
— Disons que j’ai un peu d’entraînement, admis-je.
— Ah oui ?
Son regard se fit curieux, et pour la première fois de la soirée, je laissai tomber la carapace qui me séparait un peu du monde, et me laissai aller à parler d’un pan de ma vie que je ne dévoilais pas souvent.
— J’ai travaillé en tant que commerciale pour un négociant en vins de luxe, expliquai-je. Une expérience de quelques années qui m’a permis de goûter des crus exceptionnels et d’apprendre à décrypter l’âme de chaque vin. C’est un univers fascinant, celui de l’élégance et du raffinement.
Baptiste s’adossa à sa chaise, captivé.
— Ça explique beaucoup de choses, nota-t-il en souriant. Et tu as continué après ça ?
Je pris une gorgée de mon verre avant de répondre. S’il savait…
— Pas de manière professionnelle, non. Mais j’ai continué à me former à l’œnologie en amateur. J’aime comprendre ce que je bois, sentir comment un vin peut évoluer, s’exprimer différemment selon son terroir, son élevage… Chaque bouteille est une histoire en soi. C’est presque une forme de poésie.
Baptiste me regarda un instant, comme s’il lisait quelque chose de plus dans mes mots, son sourire s’adoucissant.
— J’aime la façon dont tu en parles, dit-il doucement. Ce n’est pas simplement technique. C’est un voyage à part entière, une émotion.
Je sentis un frisson me parcourir. Il avait raison. Pour moi, le vin n’était pas juste une boisson. C’était une exploration des sens, une danse de saveurs et d’arômes.
— Peut-être bien, soufflai-je.
Le serveur revint à cet instant avec la bouteille que j’avais choisie. Il la présenta avec respect, puis la déboucha lentement avant de verser un fond dans mon verre. Je portai le verre à mon nez, en inspirant profondément. La chaleur subtile du Sainte-Croix-du-Mont, ses arômes d’abricot confit et de miel, me captivaient déjà. J’en savourai une gorgée.
La douceur enveloppante du vin, avec sa belle acidité et ses touches florales, glissa sur ma langue comme une caresse délicate. Je levai mon verre vers Baptiste, un sourire aux lèvres.
— Tu vas voir, c’est une merveille.
Il me suivit dans le rituel, prenant le temps d’observer la robe dorée du vin avant d’y goûter. Lorsqu’il reposa son verre, un sourire sincère éclaira son visage.
— D’accord, je crois que je vais devoir officiellement t’accorder ma confiance en matière de vin.
— Seulement maintenant ? fis-je mine de m’offusquer.
Il rit doucement, et il joua distraitement avec le pied de son verre, son regard ancré au mien. L’intensité de son attention me fit frissonner.
— Je crois que je pourrais t’écouter parler de vin toute la soirée, dit-il en se penchant légèrement vers moi. C’est captivant de voir quelqu’un parler d’une passion avec autant de lumière dans les yeux.
Je haussai un sourcil, amusée.
— Tu trouves que j’ai de la lumière dans les yeux ?
— Sans aucun doute, murmura-t-il. Et pas seulement quand tu parles de vin.
Mon souffle se bloqua un instant. J’étais rarement prise au dépourvu, mais la façon dont il me regardait me donna l’impression que l’air autour de nous se chargeait d’électricité. Je pris une gorgée de vin pour masquer mon trouble, mais même le liquide frais ne parvint pas à apaiser la chaleur qui montait en moi.
— Et toi, alors ? demandai-je pour détourner l’attention. Il y a quelque chose qui te fait briller comme ça ?
Il sourit, prit son temps avant de répondre, comme s’il pesait soigneusement ses mots.
— Peut-être. Mais ce soir, ce n’est pas ce dont j’ai envie de parler.
Le ton de sa voix, légèrement plus bas, fit naître un frisson le long de ma colonne vertébrale. Son regard descendit subtilement vers ma bouche avant de remonter vers mes yeux. Je me mordis la lèvre, instinctivement, et il le remarqua.
Il ne dit rien, mais un sourire en coin vint éclairer son visage. Un sourire qui me fit perdre pied une seconde de plus.
— Tu es dangereux, Baptiste, soufflai-je finalement.
Il haussa un sourcil, feignant l’innocence.
— Moi ? Je suis parfaitement inoffensif.
— C’est bien ça, le problème.
Le silence qui suivit était chargé de tension, de non-dits, d’envies suspendues dans l’air. Et pourtant, nous n’en disions pas plus. Pas encore. Je jetai un regard rapide vers la porte, pensant brièvement à Mia, puis me recentrai sur Baptiste. Après tout, Mia savait se défendre. Et moi… Moi, j’avais envie de profiter de cet instant.
— Peut-être que c’est l’effet du vin ? répondis-je, taquine.
— Ou peut-être que c’est l’effet d’une bonne compagnie, répliqua-t-il du même ton.
Je ris doucement, légèrement déstabilisée par l’intensité de son regard. Mon cœur battait plus vite, mon souffle se fit plus court. Baptiste se pencha légèrement vers moi, son sourire plus tendre, plus confidentiel.
— Tu sais, Agathe… Je crois que ça faisait longtemps que je n’avais pas eu une conversation aussi agréable.
Je hochai la tête, incapable de détourner les yeux. Moi non plus. Je sortis mon téléphone presque machinalement et jetai un coup d’œil à l’écran. Aucun message. Ni de Luna, ni d’Arthur, ni de Mia. Un léger pincement de culpabilité me traversa, mais il s’effaça aussitôt sous le poids du moment. Baptiste, qui m’observait du coin de l’œil, esquissa un sourire amusé.
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Mapetiteplume
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Il y a 8 jours
loup pourpre
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Il y a 9 jours
Zebuline
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Il y a 11 jours
Astrid.D
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Il y a 13 jours
KoalAline
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Il y a 13 jours
Bérengère Ollivier
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Il y a 13 jours