Bérengère Ollivier Nos coeurs sous la neige Baby, it's cold outside 1

Baby, it's cold outside 1

Agathe


Mia tournait son verre de vin entre ses doigts, le regard perdu dans les flammes qui dansaient dans la cheminée du chalet. Je l’observais en silence, attendant qu’elle se décide à parler. Depuis son retour, elle était ailleurs, visiblement troublée par sa rencontre avec Gabriel.

— Tu veux en parler ? demandai-je finalement.

Elle haussa une épaule, comme si ça n’avait pas d’importance, mais je n’étais pas dupe.

— C’était bizarre, lâcha-t-elle enfin. Le revoir comme ça, après tout ce temps… Je ne sais pas, j’ai eu l’impression qu’il me détestait et qu’en même temps… il attendait encore quelque chose de moi.

Je hochai la tête.

— C’est compréhensible. Vous aviez une histoire forte, non ?

Elle pinça les lèvres avant de soupirer.

— Oui. À l’époque, j’étais sûre qu’on allait finir ensemble. On parlait de voyages, de projets, de tout ce qui nous attendait… Et puis j’ai paniqué. Il voulait du concret, je n’étais pas prête. Alors, j’ai fui. Comme une lâche.

Son ton était amer, et je compris qu’elle s’en voulait encore.

— Peut-être que tu devrais lui expliquer, maintenant que vous vous êtes revus ?

Mia éclata d’un rire sans joie.

— Expliquer quoi ? Que j’ai brisé son cœur parce que j’étais trop terrifiée pour envisager un avenir avec lui ? Il ne veut pas entendre ça, Agathe. Il veut juste que je paie pour l’avoir laissé en plan. En plus, je viens de le baratiner en lui disant que j’ai deux enfants et il les a vus. Et accessoirement, ces enfants sont les tiens.

Je n’eus pas le temps de répondre qu’effectivement, elle s’était mise dans un sacré merdier et que j’aurais désiré qu’elle en extirpe la prunelle de mes yeux que son téléphone vibra sur la table basse. Mia jeta un coup d’œil à l’écran et souffla.

— Un message de Baptiste.

Je souris en coin, ne comprenant pas pourquoi je sentis mes oreilles chauffer d’un coup. Mia resta un instant silencieuse, le regard songeur fixé sur l’écran. Puis, elle poussa un soupir et me lança un regard incertain.

— Baptiste propose qu’on dîne dans ce nouveau resto dont il nous a parlé ce matin. Tu en penses quoi ?

Je haussai un sourcil.

— C’est une vraie question ou tu espères secrètement que je dise non pour t’éviter de réfléchir ?

Elle fit une moue incertaine et passa une main dans ses cheveux.

— Honnêtement, j’hésite. Avec tout ce qui s’est passé aujourd’hui, je ne suis pas sûre d’être d’humeur à socialiser.

Avant que je ne puisse répondre, Luna, qui traînait dans le salon en feuilletant un magazine, leva les yeux vers nous.

— Vous devriez y aller. Moi et Arthur, on peut très bien se débrouiller. Je nous ferai des coquillettes et Netflix sera notre baby-sitter. Et puis, s’il y a un problème, je t’appelle, maman.

Mia et moi échangions un regard. Elle savait que j’hésitais toujours à laisser les enfants seuls, même s’ils étaient assez grands pour gérer une soirée tranquille au chalet.

Je levai un sourcil amusé, et Mia m’adressa un regard incertain.

— Qu’est-ce que tu en dis ?

— Le resto est juste à côté, raisonna Mia.

— Oh, c’est bon maman. On ne va pas se volatiliser d’ici là. Et puis franchement, vous avez l’air de bien avoir besoin d’une soirée détente, enchérit ma fille d’un ton blasé.

Je croisais les bras, faussement réprobatrice.

— Depuis quand tu es la voix de la raison ?

Luna sourit, malicieuse.

— Je suis beaucoup plus grande que tu crois, maman !

Mia lâcha un soupir, mi-amusée, mi-résignée. Je pris un instant pour réfléchir. Sortir nous ferait du bien. Rester enfermées à ressasser chacune notre passé ne nous aiderait pas.

— D’accord. On y va, tranchai-je, c’est aussi mes vacances au final. Mais si je reçois un appel paniqué dans l’heure qui suit, on rentre immédiatement.

Luna leva les yeux au ciel avec un sourire satisfait.

— Promis, maman poule.

Mia sourit avant de reporter son attention sur son téléphone afin de confirmer notre venue à son ami par retour de message.


Le restaurant était un établissement moderne, élégant, à la décoration inspirée des chalets alpins, mais avec une touche contemporaine. Des lumières tamisées, une grande baie vitrée donnant sur la place enneigée, et une odeur enivrante de fromage fondu et d’herbes de montagne emplissaient l’air. Baptiste nous attendait déjà à l’entrée, nous accueillant avec un sourire chaleureux, mais toujours avec cette retenue polie qui le caractérisait.

— Bonsoir, mesdames. J’espère que vous êtes prêtes à découvrir une nouvelle adresse. On dit que leur cuisine est excellente.

Je ressentis immédiatement la chaleur de son regard lorsqu’il posa ses yeux sur moi. Une chaleur qui m’atteignit bien plus que je ne voulais l’admettre. Il dégageait une assurance tranquille, une sorte de magnétisme naturel qui me troublait plus que de raison. Nous prîmes place à une table près de la fenêtre, offrant une vue imprenable sur la station illuminée.

— Merci de nous avoir invitées, répondis-je en m’asseyant en face de lui.

En parcourant le menu, Mia et moi hésitions longuement.

— Je ne sais pas quoi prendre, soufflai-je. Tout a l’air bon.

— Idem, confirma Mia en fronçant les sourcils. Entre la fondue, la raclette et la tartiflette, je suis perdue.

Baptiste esquissa un sourire amusé.

— Pour quelqu’un qui se plaint de ne pas savoir quoi choisir, tu cites uniquement des plats à base de fromage, Cara Mia.

— Eh bien, c’est la montagne, répondit-elle, faussement défensive.

Après une dernière hésitation, je tranchai :

— Allez, je vais prendre une tartiflette.

À ma grande surprise, Baptiste eut un léger éclat de rire avant de poser ses coudes sur la table et de me regarder avec amusement.

— Tu sais que la tartiflette n’est même pas un plat traditionnel savoyard ?

Je haussai un sourcil.

— Comment ça ?

Il prit une gorgée de vin avant d’expliquer :

— En réalité, c’est une invention marketing des années 80, créée par un syndicat de fromagers pour écouler leurs surplus de reblochon. À la base, il existait bien un plat paysan appelé la « péla », mais sans lardons ni vin blanc. Ils ont pris cette recette, l’ont transformée, et maintenant tout le monde pense que la tartiflette est un vieux plat de grand-mère savoyarde.

Je clignai des yeux, légèrement décontenancée.

— Attends, tu es en train de me dire que toute ma vie est un mensonge ?

Mia éclata de rire, tandis que Baptiste hochait la tête, faussement désolé.

— J’ai bien peur que oui.

Je laissai échapper un soupir dramatique avant de sourire.

— Eh bien, tant pis. Mensonge ou pas, ça a l’air délicieux.

Baptiste me regarda un instant, un éclat malicieux dans les yeux.

— Bonne philosophie.

Je sentis mon cœur battre un peu plus vite sous son regard, mais je me contentai de fixer le menu, tentant de masquer mon trouble. Mia roula des yeux en me retirant le menu des mains.

— Si tu veux vraiment me faire plaisir, laisse-moi choisir mon plat sans commentaires gastronomiques de ta part, Bapt’.


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7 commentaires

Mapetiteplume

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Il y a 8 jours

Des petits signes de romance pointe le bout de son nez🥰

Natia Kowalski

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Il y a 14 jours

Je like pour l'instant, mais je passe te lire dès que je peux ✨ Ma PAL est pour le moment très chargée, mais j'aime découvrir de nouvelles plumes !

Bérengère Ollivier

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Il y a 14 jours

Oh merci beaucoup Natia 🙏🏻
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