Fyctia

Ezra

Ce matin, je n'ai pas vraiment réussi à travailler de manière efficace. J'ai dû remplir de nombreux dossiers, mais aucun d'entre eux ne m'a semblé intéressant. D'ordinaire, je suis le premier à me réjouir d'avoir de nouveaux projets.

Ce midi, je déjeune avec Ulysse. Il m'a envoyé un message ce matin pour me faire savoir qu'il souhaitait me parler, et j'ai immédiatement accepté. Je ne peux pas rester fâchée contre lui, et d'ailleurs, je ne comprends pas pourquoi je le serais.

Après tout, il fait ce qu'il veut avec Hanna…

Il est 11h45 et j'entends la secrétaire rire aux éclats, c'est probablement mon frère qui est dans les parages. Elle est complètement sous le charme, et il sait très bien en jouer. Je lui dis souvent de cesser de la faire rire, sinon elle risque de lui sauter dessus directement sur le bureau d'accueil.

Lorsqu'il pénètre dans mon bureau, il se montre tout de même un peu couillon.

— Salut, frangin, comment ça va ?

— Ça va, et toi, Ulysse ?

— Oui, j'ai la dalle, qu'est-ce qu'on mange ? dit-il en se tenant le ventre.

— Qu'est-ce que tu me proposes ?

— Pas un de ses restaurants haut de gamme, en tout cas, j'ai envie de bouffer gras.

— Alors, allons déguster un kebab, d'accord ?

— Parfait, cela me convient, s'empresse-t-il de dire en se dirigeant vers la porte en me faisant un signe de la main pour que je le rejoigne.

Une fois arrivés au restaurant Épice d'Or, nous commandons chacun un kebab andalouse, nos goûts étant parfaitement alignés, comme vous allez le constater bientôt...

— Ezra, il faut que je te parle de quelque chose, commence-t-il en jouant nerveusement avec ses doigts.

— De quoi s'agit-il ? lui réponds-je, perplexe.

— J'aimerais aborder le sujet d'Hanna. Je ne l'ai rencontrée qu'une seule soirée, mais elle m'a vraiment beaucoup plu, et j'aimerais savoir ce que tu lui as proposé...

Je ressens une certaine anxiété, et comme je l'ai mentionné, nos goûts sont vraiment similaires... Il se trouve que, malgré mes réticences, Hanna possède un charme indéniable.

— Il est impensable qu'on vous voie ensemble, Ulysse. Elle doit jouer le rôle de ma petite amie devant Elena…

— Donc, c'est pour cela que je devrais renoncer à elle, n'est-ce pas ?

Je préfère savourer mon repas et prendre une longue gorgée de soda avant de lui répondre.

— Tu t'en remettras, Ulysse ! Tu ne la connais même pas.

— NE ME DIT PAS QUE TU AS AUTANT CRAQUÉ POUR ELLE QUE MOI ??, s'écria-t-il, attirant tous les regards sur nous.

— Non, enfin je ne sais pas, peut-être. Quoi qu'il en soit, entre toi et elle, cela ne peut pas fonctionner... Ne gâche pas cela, s'il te plaît, quand Elena verra la beauté de Hanna, elle sera complètement déstabilisée.

— En fait, tu te sers d'elle ! Mais tu te perds dans ton propre jeu parce que tu l'apprécie vraiment.

— Pas du tout ! Il est hors de question qu'une femme se mette en travers de ma route ! m'énervé-je.

Nous terminons notre repas, puis réglons l'addition. Ulysse s'avance devant moi, visiblement agacé lui aussi.

— De toute façon, elle m'a demandé de venir ce soir pour dîner avec vous, elle prépare des lasagnes maison, je te dis à ce soir.

Il ne me laisse même pas le temps de répondre qu'il traverse la rue. Mais d'où sait-il mieux que moi ce que nous allons manger ce soir ? Est-ce qu'ils échangent vraiment autant par message ?

Mon après-midi se déroule aussi mal que ce matin, je peine à réfléchir et je ressasse sans cesse les paroles de mon frère durant la pause déjeuner. Je ne sais pas vraiment comment aborder cette situation. Je ne suis même pas totalement honnête avec moi-même. Je m'étais promis de ne plus avoir de compagne, et pourtant, je ressens une forte jalousie envers le lien qu'ils partagent. L'idée qu'il puisse se passer quelque chose entre eux est inacceptable pour moi.

Enfin, l'heure de rentrer est arrivée. Je choisis d'y aller à pied pour profiter de l'air frais. Mi-novembre, les décorations de Noël commencent à apparaître, et les vitrines des magasins sont déjà joliment ornées. Quelques flocons tombent sur le sol de New York. Bien que je n'apprécie pas particulièrement cette période depuis le départ d'Elena, je dois admettre que c'est magnifique. J'apprécie également le style décalé de Hanna, avec ses nombreuses tenues de Noël, toutes plus éclatantes les unes que les autres, cela lui va à merveille.

En franchissant le seuil de la porte, j'entends des éclats de rire entre mon frère et Hanna, tandis que Lili-Rose semble particulièrement amusée par la scène.

— Arrête, Ulysse ! Tu vas me mettre de la sauce tomate sur ma robe ! s'exclame-t-elle en riant aux éclats.

— Si je t'attrape, tu en auras sur tout le corps, rétorque-t-il.

— Eh bien, tu viendras me nettoyer, répond-elle avec vivacité.

À ce moment-là, je juge qu'il est temps d'intervenir pour mettre fin à leur petit jeu de séduction.

— Tout va bien ici ? dis-je d'un ton sec.

— Papa !!! Regarde, tonton taquine Hanna, c'est trop drôle !

— Hum, viens dans mes bras, mon petit poussin, j'invite Lili-Rose à se précipiter vers moi, ce qu'elle fait sans hésiter.

Une tension palpable s'installe immédiatement, le silence règne et personne n'ose prendre la parole. Je choisis alors d'intervenir pour alléger l'atmosphère.

— Avez-vous passé une agréable journée, les filles ?

— Oh oui, ce matin, j'ai dégusté un petit déjeuner délicieux. À midi, Hanna m'a préparé une purée avec de la viande hachée. Elle m'a expliqué que cela s'appelait un hachis parmenter, s'exclame ma fille, les yeux brillants d'enthousiasme.

— On utilise le terme "parmentier", ma chérie. Je me redresse en direction d'Hanna pour lui exprimer ma gratitude. Nous prenons place autour de la table, Lili-Rose s'asseyant à mes côtés. Ulysse, quant à lui, se précipite pour s'installer près d'elle, ce qui m'irrite profondément. Je lui ai pourtant clairement indiqué de ne rien tenter avec elle.

— Bon, tu devais me parler de notre contrat, Ezra, interrompit-elle le silence.

— Oui, c'est exact. Je te laisse d'abord signer la charte de confidentialité dont je t'ai déjà parlé. De plus, je souhaite que nous soyons clairs : pour l’instant, toute relation amoureuse avec quelqu'un te sera interdite. Il est essentiel que tout le monde pense que nous sommes en couple. Elena viendra le 25 décembre dans l'après-midi pour remettre les cadeaux à Lili-Rose, et j'aimerais que tu sois présente.

— D'accord, et j'en fais quoi de ma famille ?

— Tu peux très bien passer le 24 avec eux, Hanna. Ne complique pas les choses, s'il te plaît.

Ulysse me lance un regard qui pourrait me tuer, si ses yeux étaient des armes à feu, je serais déjà mort.