LolaB Ne plus jamais te dire au revoir Attends, Laïa !

Attends, Laïa !

Ethan.

Il se tient devant moi, immobile. Parmi les centaines de façons dont j'ai déjà imaginé notre rencontre, parmi tous les scénarios que je me suis inventé, aucun ne ressemble à celui-ci.

A l'intérieur, je suffoque. Le revoir … c'est plus fort que je ne l'ai jamais imaginé. Il ouvre la bouche puis se ravise, tandis que j'essaie de me reprendre, mais mes efforts sont vains. Je sens mon sang se précipiter dans mes veines, mon cœur faire des embardées. Mais ce n'est pas une crise de panique, c'est autre chose.

Ethan.

J'ai passé tellement de nuits à essayer de ne pas penser à lui, à essayer de ne pas l'imaginer. Et aujourd'hui il est là, devant moi, enfin.

J'observe son corps, long, souple et musclé, ce corps que j'ai étudié plus attentivement que quoique ce soit d'autre dans ma vie. Son regard est toujours le même, suppliant et douloureux, animal, aimant. Peut-être un peu plus tanné par les épreuves de la vie. Il me regarde bien en face et je sens quelque chose monter en moi. Ses cheveux, ses yeux, ses lèvres, son corps tout entier … la manière dont il bouge. Il me trouble, m'attire, éveille en moi une mémoire ancienne.

Je me retourne brutalement vers le coach et l'attrape par le bras sans ménagement.

- Je ne peux pas me mettre avec lui, je m'étrangle, c'est impossible ! Oh vous m'entendez ?! Je ne peux pas me mettre avec lui !

Il me lance un regard sévère, lorsqu'une voix, celle que j'ai imaginé tant de fois dans ma tête, impose le silence autour de moi.

- Je … j'ai fais une erreur. Je n'aurais pas dû venir. Je m'en vais.

Mon cœur est remonté dans ma gorge et l'obstrue. Je devine qu'il a tourné les talons et qu'il s'en va. Je me retourne brusquement, incertaine de ce que je dois faire.

- Non attends …

Ma voix n'est qu'un murmure mais c'est suffisant pour qu'il l'entende, s'arrête et se retourne. Ses biceps saillent sous son tee-shirt en coton noir. Il est toujours mince et ferme, mais plus fort aujourd'hui.

Sa présence submerge tout et j'ai l'impression que plus rien n'existe, même pas la salle.

- C'est bon, tu peux rester …

- Bien ! rugit le coach Durham. On peut commencer ! Allez ! Les filles une jambe en l'air, on s'étire et les garçons on rattrape !

J'attends un instant, incapable de détacher mes yeux des siens. Ethan est un homme à présent. J'ai gardé en mémoire le jeune homme qu'il était, mais il n'a plus rien dans le regard de cette lueur d'ado espiègle. Il n'a plus rien d'un adolescent mais paradoxalement, il est toujours celui que j'ai connu. Je sais qu'il est toujours le même, à l'intérieur.

Je me place parallèlement à lui, encore tremblotante. J'ancre une jambe dans le sol et balance l'autre en l'air. Il la rattrape sans effort mais ce contact, aussi bref est-il, envoie dans tout mon corps une décharge électrique. Le courant entre nous est bel est bien là, comme une surtension électrique qui déferle entre son regard et le mien. Je vacille un instant et, encore sous le choc de cette apparition, me tords la cheville et m'effondre au sol. Quatre paires d'yeux se tournent vers moi mais je les ignore. A la place, je me lève en trombe et me rue hors du gymnase, morte de honte, un flot amer de larmes me brûlant la gorge.

Je pousse les portes battantes d'un grand coup et cours jusqu'à l'arbre le plus proche, ignorant ma cheville douloureuse. Là je m'effondre contre le tronc, enfouissant ma tête dans mes mains. Je ne comprends pas ce qui a pu se passer, là-bas, pour que je me désintègre comme ça après un seul regard.

Au loin, les portes s'ouvrent, se referment. Je lève les yeux discrètement.

Ethan approche.

- Je peux regarder ? demande t-il doucement.

Je ne réponds rien.

- Je … je pensais que tu répondrais à mon appel.

Je lui lance un regard foudroyant et explose soudainement.

- Non mais pour qui tu te prends Ethan ! Tu es partis ! Tu ne m'as jamais appelé, jamais écris, jamais cherché ! MERDE !

- Je sais.

A mon grand étonnement, il ne cherche pas à s'expliquer ni à se trouver des excuses.

- Et tu te permets de revenir ici, la bouche en cœur, comme si jamais rien ne s'était passé ! je fulmine en me relevant.

Je pars en direction de la route, il me rattrape.

- Attends Laïa !

- Quoi attends ! j'aboie. Putain je peux pas croire que tu sois là ! J'ai essayé de t'oublier, Ethan, je te le promets ! J'ai tout fais pour t'oublier. Je me suis répétée, jour après jour, que tu ne m'aimais pas, que tu n'en avais rien à fiche de moi ! Je me suis fiancée à Zac, j'ai emménagé avec lui, j'ai essayé de l'aimer ! J'ai vraiment essayé … et toi … toi tu débarques dans ma vie comme une fleur, comme si t'en avais rien à faire de moi !

Quelque part dans mon discours, quelque chose l'a touché. Ethan s'est figé, il ne bouge plus, me fixe simplement. Je suis haletante, écumant de colère, d'incertitude et d'amour trop longtemps contenu.

- Tu es … tu es fiancée ?

Je jette un coup d’œil rapide à son annulaire gauche, dépourvu d'une quelconque bague. Il le remarque.

- Non, non, non ! J'aurais jamais fais ça Laïa, putain !

Il se retourne et donne un violent coup de pied dans la poubelle la plus proche. Des débris volent et atterrissent tout autour de nous.

- Je croyais qu'il y avait quelque chose entre nous !

Je claque ma langue, exaspérée. Je ne peux pas croire que tout cela est réellement en train de se passer. Après quatre ans de silence, comment se peut-il que nous nous retrouvions ici à parler de tout ça en se criant dessus ?

- Moi aussi, Ethan ! Moi aussi je pensais qu'il y avait quelque chose entre nous et puis tu te rappelles ? Je t'ai dis que je t'aimais, et toi tu es partis ! Tu m'as laissé tomber ! Tu m'as brisé le cœur !

Un éclair de douleur passe sur son visage en même temps que sa main. Puis il s'approche de moi subrepticement

- Je suis désolé Laïa.

Sa proximité me met mal à l'aise, me gêne, m'attire. Je dois résister. Je suis fiancée à présent, je ne suis plus l'adolescente qu'il a connu. Cette fille n'est plus là et je suis bien différente. Je ne suis plus disponible, j'ai des plans d'avenir et il n'est pas comprit dedans.

- Tu crois que je ne sais pas ce que tu ressens, là, maintenant ?

Je déglutis à grand peine, ne réponds rien.

- Je sais qu'en me revoyant, tous nos souvenirs t'ont sauté à la figure … je sais que ça te bousille de me voir et même de m'entendre ! Mais je sais aussi que tu l'as ressentis. Allez, tu sais de quoi je parle. Ce sentiment de soulagement … comme si ton monde se remettait à tourner dans le bon sens.

Je recule d'un pas en secouant la tête, en proie aux larmes. Ses yeux me dévorent. J'ai l'impression qu'il peut voir au plus profond de mon âme.

Et il le peut.

- Je le sais parce que je ressens la même chose.

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