Fyctia
Je ressens la même chose.
ETHAN
Quatre ans plus tôt ...
Ce fut comme une apparition. Elle était assise au milieu de ce café, toute seule, ou du moins je n'avais distingué personne d'autre dans l'éblouissement que m'avaient envoyés ses yeux.
Je m'étais même risqué à laisser glisser mon regard le long de son corps tout entier, détaillant chaque centimètre de sa peau que laissait apparaître son débardeur noir. Son short, beige en dentelle, laissait découvrir de longues jambes légèrement hâlées, montées sur une paire de sandales à talons compensés. Ses cheveux, blonds foncés, retombaient avec légèreté sur ses épaules dénudées. Waouh.
Cette fille n'était ni vulgaire, ni distinguée, elle était simplement elle. Ce n'était pas le genre de fille que j'avais l'habitude de croiser, car les filles qui traînaient aux mêmes endroits que moi étaient plutôt grossières, maquillées comme autant de bagnoles volées et avec des allures de prostituées.
Mais elle ne l'était pas ; elle était si jolie, et tellement belle je dirais même. Elle était magnifique, et même si je n'en laissai rien paraître j'étais subjugué, comme si je n'allais jamais m'en remettre.
Son regard croisa le mien un quart de seconde, mais ce fut suffisant pour qu'il revienne à moi et s'accroche au mien avec une curiosité mêlée de douceur. Elle ne me souriait pas, d'ailleurs elle n'avait pas l'air très en forme, plutôt perdue et triste, et je songeai qu'elle avait dû être abîmée par un mec, peut-être plusieurs même, et qu'inconsciemment elle devait se punir pour ce qu'il s'était passé. Mais même sans la connaître, je restai persuadé que ce n'était pas sa faute. Rien ne pouvait être la faute de cette fille-là. Je devinai en elle une beauté et une gentillesse infinie, et sans comprendre pourquoi, quand ses yeux s'attachèrent aux miens je me sentis soulagé. C'était comme si le poids qui avait pesé sur moi durant toute mon existence s'était évaporé parce qu'elle était là.
Aujourd'hui ...
Évidemment je ressens la même chose. La revoir … c'est à la fois bien pire et plus merveilleux que tout ce que j'ai pu imaginé.
Elle ne répond pas et me fusille violemment du regard.
Elle est si belle. Laïa n'est plus l'adolescente de dix huit ans que j'ai connu, douce et craintive comme un chaton effrayé. J'aimais cette adolescente et plus je la regarde plus je remarque qu'elle en a malgré tout gardé quelques traits.
Aujourd'hui elle est toujours belle et effrayée à mon contact – quoique un peu en colère –, mais c'est une femme. Pourtant elle n'a pas changée plus que ça, ses long cheveux cuivrés aux reflets miel retombent sur ses épaules en cascade comme la première fois que je l'ai vue, quatre ans plus tôt. Ses yeux me jettent des éclairs mais le lien qui nous unit est toujours là, palpable, inévitable. Et c'est pourquoi, à peine l'ai-je revue que je me suis promis de ne plus jamais repartir.
Je l'ai aimé plus profondément que n'importe qui d'autre dans ma vie, mais un jour j'en suis arrivé à vouloir qu'elle me prouve son amour de toutes les façons possible. Quitte à souffrir.
Mais je ne la méritais pas, Laïa a toujours été trop bien pour moi et même aujourd'hui elle l'est encore.
C'est la raison pour laquelle j'ai décidé de la quitter. Et c'est pourquoi elle ne m'a jamais revu. Loin de moi l'idée de ne plus penser à elle, bien au contraire. Plus j'étais loin et plus les sentiments que j'essayais d'étouffer étaient là, si près de moi, martelant ma cage thoracique.
Chaque jour qui était passé nous avions souffert d'avantage l'un pour l'autre, mais elle plus que moi. Ma punition a été de la quitter et de vivre ce qu'il y a de pire ; la solitude, le manque et l'absence qui vous torture. Et ma plus belle preuve d'amour était de ne plus jamais la laisser me revoir.
LAIA
- Écoute Ethan je … je dois rentrer chez moi.
- Non.
- Comment ça, « non » ?!
- Viens marcher avec moi.
Évidemment je devrais dû dire non. Le gifler peut-être même, pour faire bonne mesure. Mais c'est bien connu, avec Ethan dans les parages je ne fais jamais ce qu'il faut.
Alors je dis oui.
Accepter cette balade avec lui à peine une demie-heure après son retour fait peut-être de moi une fille faible, mais après tout c'est peut-être ce que je suis. Une fille faible et amoureuse.
Alors voilà comment je me suis retrouvée à marcher dans les rues de Fargues avec l'amour de ma vie.
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