Fyctia
Qu'est-ce qui nous rendra heureux ?
- Vous ne vous en voulez plus de penser à Ethan, à présent ?
Je secoue la tête en me triturant les mains.
- Je me laisse souvent aller à penser à lui. J'ai compris que ça ne servait à rien d'essayer de combattre ça.
- Et cela vous fait-il du bien ?
- Ça dépend des fois. Parfois oui car ça me rappelle que j'ai vécu de belles choses avec lui, mais d'autres fois … j'en sais rien. J'ai l'impression de penser à quelqu'un qui ne pense jamais à moi.
- Comment pouvez vous le savoir ?
- Parce que je lui ai dis mes sentiments, et il est partit. C'est que ça ne devait pas être réciproque.
- Je ne pense pas comme vous, mais ce n'est que mon avis.
- Et qu'est-ce que vous pensez ?
- Ethan a été présent dans votre vie pendant un temps court mais très intense. Il me semble difficilement possible que ça n'ai été que dans un sens et que vous vous soyez imaginé ses sentiments vers vous. Je veux dire, avec vous il avait un comportement étonnant, non ?
- Oui. Ça ne collait pas à sa réputation. Ethan … il pouvait être agressif et violent avec les gens, et très impulsif. Avec moi il était doux et attentionné. Mais il a été odieux aussi ! Et méchant. Et il est partit sans se retourner.
Pour la première fois depuis notre séance elle pose son carnet sur la table, décroise ses jambes et remonte ses lunettes sur sa tête.
- Je pense, très sincèrement, qu'il avait de réels sentiments pour vous. Mais que ça a pu lui faire peur.
- Et ça sert à quoi les sentiments si on les montre jamais ?
- Ça c'est une bonne question, mademoiselle.
Elle reprend son carnet, écrit quelques notes en bas de la page puis nous nous saluons et je pars. C'est vrai. Tout le monde m'a dit que j'avais changé Ethan, dans le bon sens du terme, et qu'il ne s'était jamais montré ainsi avec personne. Donc il devait avoir des sentiments pour moi.
Mais à quoi ça sert si c'est pour les garder pour soi ? Telle est la question. Puisqu'il est partit. Qu'il n'a plus jamais cherché à me revoir.
Cette fois je ne longe pas la plage pour rentrer chez moi mais le bord de la route en continuant de réfléchir à toute blinde. A partir de quand ai-je commencé à mentir à Zac ? Depuis quand ne suis-je plus heureuse de rentrer chez moi ? L'ai-je déjà été un jour ? Depuis quand n'ai-je pas été contente de le voir ? De partager un repas avec lui ? Depuis quand est-ce que je me force ?
Et quand je lui dis que je l'aime, est-ce que je le pense encore ?
Une voiture me double et vient se garer à quelques mètres devant moi. Lorsque je passe près de la vitre baissée je jette un coup d’œil à l'intérieur et vois que ce n'est que Valentin, mon ami d'enfance.
- Monte ! me dit-il.
J'obtempère et lui fais la bise.
- Qu'est-ce que tu fabriques là toute seule ?
Valentin ne sait pas que je consulte un psy. Seules Carole et Enora le savent. Pourtant aujourd'hui je n'ai plus envie de lui cacher ça.
- Je … euh je …
Son regard se fait plus insistant et il hausse les sourcils.
- Je sors de chez le psy, en fait.
Je vois à l'expression de son visage qu'il ne sait pas si c'est du lard ou du cochon et je le comprends. Pour autant il choisit de prendre pour compte ce que je viens de dire.
- Tu vois un psy ? Mais depuis quand ?
- Un mois. Peut-être deux.
- Mais … pourquoi ?
- J'avais besoin de parler de … ma vie. De ma vie ratée.
- Je ne comprends pas Laïa …
- Je dois te dire quelque chose Val … je …
Je respire un grand coup.
- Je ne suis plus vraiment amoureuse de Zac. Et j'ai de plus en plus de mal à supporter ma vie. Ma vie toute entière. Je n'ai jamais rêvé d'une vie comme ça à vingt deux ans.
- Tu penses encore à lui, c'est ça ?
Je cache ma stupéfaction. Visiblement je n'ai plus vraiment de secrets pour mes amis. Je hoche doucement la tête.
- Un peu.
- C'est quoi, un peu ?
- Un peu le matin, un peu le soir … un peu entre les deux.
Il soupire et se passe une main sur le visage.
- Comment j'ai pu passer à côté de ça ?
- Parce que je l'ai caché.
A mon tour j'enfouis mon visage entre mes mains. Valentin entoure mes épaules et me fait doucement basculer vers lui.
- Depuis quand nos vies sont devenues comme ça, hein ? On avait tout prévu pourtant, tu te rappelles ?
Il hoche la tête.
- Il y a quatre ans tout semblait si évident. Conquérir le monde, le sauver, se marier, avoir beaucoup d'enfants et être heureux. C'était à portée de main ! Mais qu'est-ce qui te rendra véritablement heureux, Val ? Tu y as déjà réfléchis ? La voiture que tu conduis, les réceptions auxquelles tu te rends, ton apparence ? J'en sais rien … la popularité ? L'argent ? Des employés de maison ? Parce que j'ai tout ça, et pourtant je pense pas que ça soit suffisant.
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