Fyctia
5- Eva
Quelques heures plus tôt…
H-10 avant la nouvelle année…
— Allô ?
— Papa ?
— Cookie, est-ce que tout va bien ? C’est rare que tu appelles si tôt.
Papa me flaire à des kilomètres à la ronde. De manière générale, je les appelle rarement. Comment suis-je censée leur annoncer la nouvelle ? Enfin devrai-je plutôt dire les nouvelles. Parce que je n’ai pas d’autre choix que de rentrer. Parce que peut-être que j’ai changé d’avis. Peut-être que je vais garder cette chose qui gravite dans mon ventre. Je navigue dans l’épais brouillard des doutes. Le pire dans cela, c’est que mes parents sont de la vielle école. Un bébé, selon eux, doit avoir lieu dans le mariage.
— Tu es encore là, Cookie ?
— Hein, euh, oui… en fait j’ai quelque chose à vous annoncer.
J’avale ma salive et balance ma première bombe avant qu’il ne devine l’autre raison.
— Je rentre à Blueberry.
— C’est vrai ? Wow, c’est super ! Combien de temps tu comptes rester ?
— Je rentre pour de bon, papa.
— Pour de bon ? T’veux dire pour toujours toujours ?
— Yep !
— Mais ton travail ?
— Bah, j’ai été virée. Hier.
— Mon petit chou, ne t’inquiète pas, on sera toujours là pour toi. Ta chambre est toujours libre. Tu arrives quand ?
— Eh bien, le 1er, le temps de faire mes cartons.
Heureusement que l’appartement de Trevor est un meublé, je n’aurai plus qu’à emballer les décorations pour… pour en faire quoi d’ailleurs ? Je suis enceinte et ce n’est pas avec un mioche que je vais pourvoir me dégoter un travail et donc un appartement.
— C’est rapide ! Parfait ! Je préviens ta mère dès qu’elle rentre du travail. T’sais comment elle est, elle voudra sûrement nettoyer de fond en comble ta chambre.
— Ok papa, je te laisse, j’ai encore beaucoup à faire pour préparer mon retour.
La vérité est tout autre. Je préfère fuir toute conversation qui me conduirait à pleurnicher comme une adolescente. Je raccroche et, par chance, l’équipe des déménageurs arrivent pour empaqueter mes affaires. Une terrible distraction. Abasourdie, je les observe mettre deux ans de ma vie en cartons. Deux années de dure labeur rangées dans des boîtes. Une bassine sur mes genoux, je vomis mon maigre déjeuner sans embarras d’être entendue. Je suis dans un état second. Ma vie se désagrège devant moi, sans que je n’ai le moindre contrôle sur ce qui se passe. J’ai tout foiré : ma vie sentimentale, ma carrière, mes relations, mes rêves. Comment en suis-je arrivée là ?
Mon portable vibre. Tel un pantin, je sens ma main qui décroche. J’écoute sa voix. Ses douces paroles qui raisonnent dans mes oreilles. Ses interrogations. Je réponds laconique :
— Oui, j’ai été virée.
Je lui tais la raison de mon véritable échec.
— Non, je vais bien.
— Tu vas pouvoir te concentrer sur l’essentiel, Red.
— Qui est ?
— Ta famille. Te trouver un mari, m’expose mon frère comme si j’avais besoin d’explication pour me remettre sur les rails.
Selon lui, j’ai dérivé.
— Tu vas même pouvoir revoir Jules.
Un nœud se forme dans ma gorge.
— Je ne sais pas. Ça se trouve il ne voudra même pas me voir. J’ai été dégelasse avec lui… je suis partie sans lui laisser la chance de me dire au revoir.
— Ce n’est pas à toi d’en juger ! J’le connais sister, il t’a déjà pardonné, tu sais.
Un membre de l’équipe m’appelle pour savoir l’adresse à laquelle ils doivent envoyer tous les cartons. Je remplie le formulaire, le téléphone collé à l’oreille.
— De toute façon, Jules et moi, on ne pourra jamais plus avoir la même relation, il est avec Vanessa.
— Elle l’a quitté.
— Ah bon ?
— Il y a deux ans de cela.
— Mince ! Tu sais pourquoi ?
— Apparemment, elle avait un amant.
J’ai dû mal à imaginer Jules, divorcé. Tandis que je raccroche, je me remémore nos conversations au lycée. Il appartenait à cette rare catégorie de jeunes hommes qui attendaient le mariage pour perdre leur virginité. Oui, mon Jules, était un spécimen en voie de disparition. Je croyais qu’il n’y parviendrait pas, mais maman m’a vanté ses mérites quand elle m’a annoncé ce mois-là qu’il se mariait. Vierges tous les deux à 23 ans. Qui de nos jours l’est encore à cette âge-là ? Je me souviens aussi avoir pouffé de rire avec Caleb, lui disant « mais comment ils vont s’en sortir tous les deux le soir de la noce ? ». Ce à quoi il a répliqué :
— T’inquiète pas, personne n’a besoin d’une carte pour trouver un vagin. Même pas ton Jules.
Une partie de moi avait alors ressenti une vive douleur. Une douleur que j’ai préféré ignorée. Après tout, j’avais fui. Je l’avais rejeté, lui et sa demande en mariage. Oui, parce que mon Jules m’avait fait sa demande juste avant que je ne prenne la poudre d’escampette pour une raison qui nous dépassait tous les deux.
Voilà qu’aujourd’hui mon plus-vraiment-meilleur-ami avait été abandonné par la femme qu’il avait épousé. S’il y a bien une personne qui méritait le bonheur, c’est lui. Pourquoi le sort s’acharnait-il contre lui ? Moi, j’avais mérité ce qui m’arrivait. J’avais menti de mon plein gré. Le retour de bâton était inévitable.
Mais, j’en ai ma claque de tous ces gens qui abusent de la confiance des autres. Je me sens trahie. Salie et sale à la fois. Soudain, prise par un désir de vengeance sans précédent, je compose le numéro de fixe de Trevor.
— Allô, clame une voix féminine que je reconnais pour l’avoir entendue bon nombre de fois.
— Bonjour, vous ne me connaissez pas, mais vous devriez savoir que votre mari a une liaison avec moi.
SA femme réprime un sanglot.
— Je suis navrée. Sincèrement pour avoir tenue ce mauvais rôle, mais vous devriez savoir que votre époux est une ordure ! Il m’a fait un enfant qu’il renie sous prétexte qu’il en a déjà deux.
Sur ces entrefaites, je raccroche avant qu’elle ne pose davantage de questions. Le mal est fait. Mais, je me sens soulagée d’enlever ce poids de ma conscience. De libérer la vérité. De mettre cette dame au courant des mauvais agissements de son abruti de mari.
J’ouvre la porte d’entrée pour laisser passer les hommes et les cartons. Puis, je file dans ma chambre, entre dans le lit et me roule en boule avec un immense vide dans la poitrine. Malgré moi, je pose les mains sur mon giron. Même si je ne sens pas encore l’intrus bouger en moi, je perçois sa présence si infime. Et je repense à tout. Tout ce qui m’a fait souffrir. Tout ce dont j’ai fui pendant toutes ces années. Je revois mon Jules, un genou par terre me faire sa demande en mariage.
** Rhooo je fonds avec Jules... et vous ? Un petit retour en arrière dans le prochain chapitre, mais pour cela, il faut attendre demain. Que pensez-vous de nos héros ? Avez-vous des suggestions ? idées ? critiques ? Je suis open !!! Sinon, merci à Solange, Thalyssa, Sylvie et les autres fidèles lecteurs. Marie **
18 commentaires
Sandelina Antowan
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Il y a 6 ans
Fanny, Marie Gufflet
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Il y a 6 ans
Sandelina Antowan
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Fanny, Marie Gufflet
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Elton Lost
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Fanny, Marie Gufflet
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Zalma
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Claire Lossy 01
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Fanny, Marie Gufflet
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Émilie Parizot
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