Fyctia
1-2 Présent (Evangéline)
C’est une blague, me dis-je, tandis que je contemple ledit présent de noël. Entre mes mains, je tiens un sablier. Qui a eu l’idée du siècle de m’offrir un cadeau aussi peu original ? Pour l’effort que cette personne s’est fournie, je vais tout de même l’observer d’un peu plus près.
Dubitative, je tourne l’objet qui est assez lourd. L’armature en bois est finement travaillée et une gravure est inscrite sur le dessus Les ouvriers du temps. Mais ce qui me foudroie le plus, c’est l’intérieur. Contrairement à ce qu’on peut voir d’habitude dans un sablier, il ne contient pas du sable, mais des flocons. Oui, mesdames et messieurs, des flocons de neige. Parmi eux, sont piégés d’autres houppettes plus énormes. Je secoue le sablier pour les libérer. Il y en quatre pour être plus exactes. Les yeux plissés, je déchiffre les inscriptions sur chacune d’entre elles : La Chute, L’Épreuve, La Renaissance, L’Envol.
Bien, bien… je n’ai aucune idée de ce que ça peut bien signifier. Je ne suis pas une littéraire comme Alexis et je me sens comme une parfaite bourrique à la recherche d’un quelconque symbole. Je fais appel à mes lointaines connaissances du lycée, mais c’est peine perdue.
Peut-être internet m’aidera à lever le voile sur le sujet obscure. Avec frénésie, je tape les mots, mais rien de bien intellectuel en ressort. Finalement, je cherche Les ouvriers du temps. Bim ! Un site internet et même un numéro de téléphone s’affiche. Apparemment c’est une entreprise spécialisée dans les cadeaux personnalisés.
Vu l’heure tardive, je ne pense pas qu’elle sera encore ouverte. Qui aurait l’idée de bosser le 22 décembre à 23h00 tapantes ? Je rentre les chiffres et décide de laisser un message vocal.
— Les ouvriers du temps, bonsoir, Mindy à l’appareil, comment puis-je vous aider ?
— Euh… navrée, je ne pensais pas que vous alliez décrocher. Euh… voilà, j’ai reçu un cadeau apparemment de votre entreprise, par une personne qui désire restée inconnue.
— Ah, c’est le but, oui. À la demande des clients, on étudie les personnes pour qui ils veulent offrir le cadeau afin d’élaborer quelque chose de particulier. Est-ce que le vôtre vous a plu ?
— C’est… inattendu ! Enfin… un sablier, c’est tout de même un peu bizarre, non ? Vous avez une idée du message qu’on a voulu me faire passer ?
— Aucunement !
Donc, c’est à moi d’en découdre.
— Mince alors ! Vous avez combien d’employés au fait ?
— Deux. Mon mari et moi.
La belle affaire !
— Mindy, il faudrait revoir le look vestimentaire de votre… époux. Il m’a fichu une de ces frousses, osé-je. Si vous avez besoin d’aide, faite appelle à moi.
— Je n’y manquerai pas, mais mon pauvre mari est une vraie tête de mule. Il tient à conserver son côté énigmatique. Bon eh bien, je dois vous laisser. J’espère que vous finirez par saisir le message caché.
— Merci, euh… joyeux noël.
— Joyeux noël à vous aussi, conclut-elle.
Je dépose mon portable sur la table basse et retourne le sablier, mais surprise, le cadeau ne semble pas fonctionner. Aucun flocon ne désire faire son chemin jusqu’en bas, comme bloqué vers le haut. Génial !
On verra ça demain, il est grand temps de dormir.
Je suis réveillée par un baiser. Tendre. Doux. Un peu piquant aussi.
— Mmmmm…
— Allez, marmotte !
— Trev, laisse-moi dormir. Je reprends le travail le 2 janvier, j’aimerais autant profiter de mes vacances.
Trevor est mon petit ami du moment. Depuis huit mois. Un record. Ce qui m’ait apparu comme une simple aventure s’est éternisée en… en je-ne-sais-pas-trop-quoi. Il est plus âgé que moi. Tandis que je frôle la trentaine, lui, en revanche effleure farouchement la quarantaine. Au début, je suis sortie avec lui par pur intérêt. C’est qu’il est le propriétaire des lieux, un énorme avantage. Il est assez souple sur le loyer quand je suis au bord du gouffre financier. Non pas que je sois fauchée, mais je suis dépensière. Est-ce que notre relation perdurera ? Pour l’instant, j’apprécie vivre au jour le jour. Je suis encore jeune, jolie, indépendante et me caser pour l’éternité ne me semble pas au programme. La vie est courte, j’aime autant savourer ma jeunesse, qui n’est pas éternelle, n’est-ce pas ?
De toute manière, je ne suis pas certaine qu’il finira par quitter sa femme pour moi. S’il le faisait, serais-je prête ? En ai-je seulement le désir ? J’ai fait la colossale erreur d’en parler à mon frère. De toute mon existence, je n’ai jamais pris une telle rouste. Ses mots raisonnent encore en moi : Eva, tu es ma sœur, mais là, franchement tu vas trop loin. Je ne te reconnais plus.
En même temps, ça fait onze ans—depuis l’incident majeur— que le papillon que j’étais, s’est transformé en une vicieuse fourmi rouge. Je suis sur la défensive, j’attaque et je mords dès qu’on parle de mon passé. Celui que j’ai fui. Celui pour lequel je fais tout pour oublier.
Mais, ne parlons pas de choses qui fâchent. Demain c’est le réveillon, je le fêterai dignement avec mon amie, Gabriela, une new-yorkaise pure souche, avec un cœur en or.
Les lèvres de Trevor s’abattent à nouveau sur les miennes, cette fois avec plus d’ardeur. J’ouvre les yeux péniblement. Mon amant repousse les draps pour s’y engouffrer.
— Je suis venu pour le petit-déjeuner, grogne-t-il, les yeux luisants de plaisir. J’ai ramené de la chantilly et des fraises.
— Petit coquin, va !
À mesure qu’il m’embrasse, je respire sa nouvelle eau de toilette, sûrement offerte par sa femme. Mais, ça ne me dit rien qui vaille. Ça me dégoûte même. Un haut-le-cœur me prendre à la gorge. Je quitte le lit, non sans tomber par terre et cours à la salle de bain pour vomir. J’écoute mon amant se lever, babiller des mots de réconforts alors que je me vide encore un peu plus.
Mon front est perlé de sueurs, ma bouche sèche, mon teint livide.
— Eh bien mon ange, je ne t’avais encore jamais fait cet effet-là ! plaisante-t-il, posté contre la porte.
— C’est le moins qu’on puisse dire.
Je grimace de douleur. À mesure que je me mets debout, Trevor, lui s’éloigne à pas feutrés.
— Mon ange, tu ferais mieux de te reposer. Je passe te voir demain, ça te va ? Vers 14 h ?
— Mmmph…
Je passe de l’eau sur mon visage, me rince la bouche avant de chercher Trev. Avec lenteur, je me dirige vers mon salon, mais il ferme la porte d’entrée dans un grand fracas. Eh bien, on dirait que je l’ai fait fuir. Purée, il a même embarqué la chantilly et les fraises. Il aurait pu me les laisser.
Avec désespoir, je me laisse choir dans le canapé, les yeux arrimés sur le sablier, d’où se tient un unique flocon au le fond du sablier.
La Chute, je lis. C’est ironique ! Je récupère le présent et comme par magie, les autres minuscules houppettes se mettent à dégringoler vertigineusement. À l’exception des trois autres.
**Coucou, restez connectées pour voir comment notre Eva va évoluer. Des bisous et n'hésitez pas à me dire ce que vous aimez ou pas ! ** Marie
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Fanny, Marie Gufflet
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Sandelina Antowan
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Claire Lossy 01
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Fanny, Marie Gufflet
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Lindsay Hardy-Mussard
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Sylvie De Laforêt
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Birdie
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