Fyctia
Chandelier de l'âme 12
Camille et Léandre échangèrent un regard. Ils savaient que le moment était venu de confronter la véritable nature de leur quête, mais l’idée d’entrer dans ce labyrinthe les pétrifiait.
— « Nous n’avons pas fait tout ce chemin pour reculer, » déclara Camille, sa voix tremblante mais déterminée.
Léandre hocha la tête. Il sentit un poids invisible sur ses épaules, mais une étrange sérénité l’habitait.
Le sol s’ouvrit, dévoilant une porte ornée de symboles lumineux. En traversant, ils furent enveloppés par une obscurité totale, où seule une fine lumière, émanant des cristallins, leur permettait de distinguer le chemin tortueux devant eux.
Les murs du labyrinthe étaient faits de miroirs, reflétant non pas leurs visages, mais leurs peurs les plus profondes. Camille vit une version d’elle-même, figée dans un éternel silence, oubliée par le monde. Léandre, quant à lui, se vit dévoré par sa propre ambition, transformé en une ombre vide et sans âme.
Des murmures emplissaient l’air, des voix qu’ils reconnaissaient : celles des personnes qu’ils avaient aimées et perdues, celles de leurs propres pensées inavouées.
— « Tout cela n’est qu’une illusion, » tenta de se convaincre Camille, mais les voix semblaient gagner en intensité.
Une ombre immense surgit alors devant eux, prenant la forme d’une créature aux yeux d’un blanc pur, comme si elle voyait à travers eux.
— « Vous ne pouvez avancer sans abandonner ce qui vous lie encore au passé, » dit-elle d’une voix résonnante.
La créature tendit une main griffue, et une lueur apparut dans son creux : deux objets brillants, chacun correspondant à un symbole qu’ils portaient depuis leur passage dans le sanctuaire.
— « Vous devrez choisir ce qui compte le plus : la mémoire ou l’éveil. »
Léandre sentit son souffle s’arrêter. Comment pouvaient-ils choisir entre deux vérités qui semblaient indissociables ? Camille, cependant, s’avança, le regard fixé sur les yeux de la créature.
— « Nous ne choisirons pas, » déclara-t-elle. « Parce que l’une ne peut exister sans l’autre. La mémoire sans éveil est un poids mort. L’éveil sans mémoire est une lumière sans source. »
La créature parut hésiter, ses yeux s’illuminant d’un éclat plus intense. Puis, dans un grondement, elle disparut, laissant derrière elle une clé forgée en lumière.
— « Nous avons réussi ? » demanda Léandre.
— « Non, » répondit Camille en serrant la clé. « Le vrai test ne fait que commencer.
Le labyrinthe des âmes s'effondra dans un éclat de lumière aveuglante. Camille et Léandre se retrouvèrent dans une salle immense, bordée de statues colossales, chacune représentant une figure humaine tenant un objet sacré : des plumes, des miroirs, des livres gravés de symboles anciens. Au centre trônait un autel de pierre, où une cavité ronde et délicatement sculptée semblait attendre un assemblage précis.
Les sept cristallins, comme animés d'une volonté propre, lévitaient autour d’eux, émettant une mélodie profonde et harmonieuse. Chaque fragment scintillait avec une intensité particulière, réfractant des couleurs qui semblaient contenir des mondes entiers.
— « Nous sommes au bout du chemin, » murmura Léandre, ses doigts tremblant légèrement lorsqu’il toucha l’un des fragments.
— « Pas encore, » répondit Camille en posant sa main sur l’autel. « L’accomplissement ne vient jamais sans une ultime épreuve. »
L’autel vibra sous leurs doigts. Des runes dorées jaillirent des gravures sur la pierre, formant une spirale ascendante. Une voix, douce mais infiniment puissante, emplit la salle :
« Assemblez les cristallins et dévoilez la vérité cachée. Mais sachez ceci : ce qui sera révélé changera votre essence pour toujours. Votre âme ne pourra plus revenir à l’ignorance. »
Camille et Léandre prirent chacun un fragment, guidés par une intuition presque surnaturelle. Les cristallins semblaient vibrer en résonance avec leur souffle. Lorsqu’ils les placèrent un à un dans la cavité de l’autel, un éclat d’énergie divine jaillit à chaque insertion.
Lorsque le dernier cristallin fut posé, un vortex lumineux s’ouvrit au-dessus d’eux. Il n’était ni une porte, ni une fenêtre, mais un regard dans l’infini. À travers, ils pouvaient percevoir des myriades de galaxies, des fragments d’âmes et d’histoires, et une entité colossale qui semblait les observer.
Léandre tomba à genoux, submergé par la vision. « C’est… trop grand, Camille. C’est… l’Innommable. »
Camille, les larmes aux yeux, fixa le vortex avec une détermination farouche. « Ce n’est pas seulement une vision, Léandre. C’est une invitation. »
Alors qu’ils contemplaient la lumière infinie, une ombre apparut à leurs côtés. C’était un être indistinct, ni humain ni divin, mais d’une présence écrasante.
— « Vous cherchez l’éternité dans l’art, dans l’inspiration, mais l’éternité n’existe que dans l’imperfection. »
Léandre, toujours agenouillé, murmura : « Alors pourquoi cette quête ? Pourquoi nous pousser à chercher ? »
— « Parce que l’imperfection humaine est le reflet le plus pur du divin. C’est dans vos doutes, vos échecs, vos chutes que la lumière véritable se trouve. Les cristallins ne sont pas la fin de votre quête, mais le début de votre compréhension. »
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