Fyctia
Chandelier de l'âme 1
Au sommet d’une montagne oubliée des cartes, où les vents portaient encore les murmures du passé, s’élevait un temple taillé dans la roche. Les murs du sanctuaire étaient gravés de runes lumineuses, émettant une lueur dorée qui dansait dans l’obscurité. À l’intérieur, une assemblée silencieuse se tenait autour d’un chandelier monumental, ses sept branches illuminées par des flammes qui ne vacillaient jamais, même sous les souffles les plus violents.
Ils étaient les Gardiens du Chandelier de l’Âme, une société secrète dédiée à la préservation d’une lumière ancestrale, celle qui, selon les légendes, était le premier souffle de la création. Leur rôle : veiller sur l’équilibre entre l’humanité et l’infini, préserver l’étincelle divine dans un monde en constante déchéance.
Au centre de la salle, une femme âgée, connue sous le nom de Mère Clymène, ouvrit un grimoire ancien aux pages d’or terni. Ses mains tremblaient légèrement, mais sa voix, lorsqu’elle parla, portait une autorité indiscutable.
— « Le temps est venu », déclara-t-elle. « Les étoiles le murmurent, les ombres le redoutent. Un Témoin et un Guide s’élèveront, porteurs de la lumière cachée et de la vérité oubliée. »
Un silence lourd s’abattit sur l’assemblée. Les membres, vêtus de robes ornées de symboles complexes, échangèrent des regards inquiets.
— « Qui seront-ils, Mère ? » demanda un homme au visage grave, connu sous le nom de Frère Caelum, gardien des flammes. « Et comment les reconnaîtrons-nous ? »
Mère Clymène tourna une page du grimoire, révélant une illustration étrange : deux silhouettes, l’une baignée d’une lumière douce et l’autre entourée d’une aura éclatante, presque aveuglante.
— « Le Témoin portera en lui un pouvoir latent, une lumière voilée par les ombres de son propre doute. Ce sera un esprit capable de percevoir l’éternité mais incapable, au début, de la toucher. »
Les mots résonnèrent dans l’esprit des Gardiens. L’image de Camille s’imposa, bien que son nom leur fût inconnu.
— « Et le Guide ? » demanda une voix hésitante parmi les rangs.
Mère Clymène ferma les yeux un instant, récitant les mots gravés dans sa mémoire :
— « Le Guide manifestera son pouvoir en actes. Il tracera un chemin à travers les ténèbres, rassemblant les fragments de l’âme universelle. »
À des milliers de kilomètres de là, Camille se tenait près de sa fenêtre, le regard perdu dans l’obscurité de la nuit. Elle sentait une agitation intérieure qu’elle ne pouvait expliquer. Depuis leur dernier voyage, une étrange énergie semblait grandir en elle, comme une présence qu’elle ne pouvait identifier.
De son côté, Léandre travaillait frénétiquement dans son atelier, ses mains créant des œuvres qui semblaient échapper à sa propre compréhension. Les sculptures et peintures semblaient animées d’une vie propre, comme si une force extérieure guidait chacun de ses gestes.
C’est alors qu’il remarqua une chose étrange : une lumière faible émanait de ses doigts lorsqu’il touchait ses œuvres. Une lumière qui, bien que discrète, semblait contenir une essence familière.
Dans leur temple, les Gardiens observaient à travers des reliques sacrées, des miroirs enchâssés dans des cadres de cristal qui reflétaient les mouvements de l’énergie divine.
— « Le Témoin est révélé, » murmura Mère Clymène, fixant une image floue de Camille. « Et le Guide… il est en marche. Mais comprendront-ils leur rôle avant que les ténèbres ne les engloutissent ? »
Frère Caelum, toujours sceptique, prit la parole.
— « S’ils échouent, le Chandelier perdra sa flamme. Les ombres dévoreront tout. Ne devrions-nous pas intervenir ? »
Mère Clymène secoua la tête.
— « Leur chemin ne peut être dicté. Mais lorsque le moment viendra, nous les guiderons. Pour l’instant, ils doivent marcher seuls. »
Inconscients de l’existence des Gardiens, Léandre et Camille poursuivaient leurs vies, chacun hanté par des visions inexplicables. Mais dans les recoins sombres de la réalité, des forces commençaient à se mobiliser.
Les Ombres Déchues, des entités nées de l’ambition humaine démesurée, se réveillaient. Leur but : éteindre la lumière avant qu’elle ne puisse révéler la vérité ultime.
Camille sentit leur présence pour la première fois une nuit, alors qu’elle écrivait. Une ombre passa furtivement dans son champ de vision, et un froid glacial envahit la pièce.
De son côté, Léandre fit face à une perturbation étrange : ses œuvres, habituellement lumineuses, semblaient s’assombrir, comme si quelque chose en aspirait la vie.
Camille posa sa plume, le souffle court. La lueur de la lampe sur son bureau vacillait, bien qu’aucun courant d’air ne fût présent. Elle sentait une présence, invisible mais pesante, comme si un œil inconnu la scrutait depuis un endroit qu’elle ne pouvait atteindre. Elle ferma les yeux et récita une prière qu’elle avait apprise dans un vieux manuscrit. Les mots, bien qu’oubliés de tous, portaient une résonance familière, une mélodie qui calma son esprit un instant.
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