Fyctia
Quête de l'infini 7
Non loin de là, Camille atteignit un lac immobile au milieu du désert. L’eau, d’une clarté irréelle, reflétait non seulement son image mais aussi des visions d’un autre monde. À chaque pas qu’elle faisait autour du lac, une nouvelle scène apparaissait : des artistes en plein travail, des visages déformés par l’angoisse, des mains tendues vers une lumière qu’ils ne pouvaient atteindre.
Elle s’agenouilla et plongea ses mains dans l’eau. Une onde se propagea, brisant les reflets, et la muse lui apparut à nouveau, son regard perçant et insondable.
— « Pourquoi insistes-tu à vouloir comprendre ? » demanda la voix de la muse.
Camille répondit sans hésiter :
— « Parce que l’inspiration n’est pas un choix. C’est un appel. Si je ne le poursuis pas, je mourrai vide. »
Le lac se troubla, et une image claire se forma : la Crypte d’Orion, illuminée par une lumière dorée. C’était un signe.
Léandre et le Cercle, après avoir surmonté les premières énigmes, se trouvèrent à une jonction marquée par une sculpture ancienne. Elle représentait une femme au visage voilé, tenant une plume et une torche.
— « C’est elle, » murmura Léandre, frappé par une reconnaissance instinctive.
Au même moment, Camille, loin de là, approchait des mêmes ruines depuis une direction opposée. La plume dorée qu’elle avait vue dans sa vision semblait flotter dans son esprit, la guidant à chaque pas.
Leurs quêtes se rapprochaient inexorablement, et il ne restait plus qu’une question : que se passerait-il lorsque ces âmes obstinées se retrouveraient face à face ?
Léandre et le Cercle arrivèrent enfin à l’entrée d’un canyon étroit, bordé de falaises qui semblaient gravées par une main divine. Les symboles anciens qui ornaient les parois brillaient faiblement dans la lumière du crépuscule, projetant une lueur irréelle sur leurs visages fatigués. Carthos Jo s’arrêta net, contemplant les gravures avec une intensité qui trahissait une crainte mêlée d’admiration.
— « Nous sommes proches, » déclara-t-il finalement. « Mais il reste un dernier passage à franchir avant d’atteindre la Crypte. »
Jenny s’avança timidement, sa voix tremblant d’excitation.
— « Vous sentez cela ? Comme si l’air lui-même était vivant… »
Christopher fronça les sourcils, mais il ne trouva rien à dire. Même lui, le sceptique endurci, sentait une énergie inhabituelle autour d’eux, comme si la terre retenait son souffle.
Au même moment, Camille émergeait de l’autre côté du canyon. Elle avait suivi les indices laissés par la carte, et chaque pas l’avait rapprochée de cet endroit précis. Lorsqu’elle aperçut les gravures sur les parois rocheuses, une vague de reconnaissance la traversa. Elle avait vu ces symboles dans ses visions.
— « C’est ici, » murmura-t-elle pour elle-même. « Je le sais. »
Au détour d’un coude dans le canyon, Léandre et Camille se retrouvèrent face à face. Pendant un instant, le temps sembla suspendu. Léandre, qui avait cru Camille perdue à jamais, sentit un mélange de choc et d’émerveillement en la voyant. Elle paraissait changée, son regard plus profond, son visage marqué par les épreuves de ses années de quête.
— « Camille… » souffla-t-il, incapable de prononcer autre chose.
Elle le dévisagea, son expression oscillant entre la surprise et une étrange sérénité.
— « Léandre, » répondit-elle enfin. « Je savais que nos chemins se recroiseraient. »
Les membres du Cercle, fascinés, observaient en silence cette réunion inattendue. Jenny sentit un frisson lui parcourir l’échine, comme si cet événement avait été écrit depuis longtemps dans les étoiles.
Carthos Jo s’avança, scrutant Camille avec un mélange d’intérêt et de méfiance.
— « Vous êtes une alliée, ou une rivale ? » demanda-t-il avec calme, mais une pointe d’autorité dans la voix.
Camille soutint son regard sans vaciller.
— « Ni l’un ni l’autre. Je suis ici pour la même raison que vous : pour comprendre. »
Malgré les tensions initiales, il devint évident que Camille possédait des informations cruciales pour avancer. La carte qu’elle avait trouvée contenait des annotations absentes de celle de Carthos. Ces détails révélaient une série de pièges et d’épreuves à venir avant d’atteindre la Crypte.
Autour du feu, cette nuit-là, Camille partagea ses découvertes avec le groupe. Elle raconta ses années d’errance, ses visions et les indices qui l’avaient menée jusqu’ici.
— « La Crypte n’est pas qu’un lieu, » expliqua-t-elle. « C’est un passage. Une frontière entre ce que nous pouvons comprendre et ce que nous devons accepter. Ceux qui y entrent sans être prêts risquent de ne jamais en ressortir. »
Ses paroles jetèrent un froid. Même Bill, habituellement insensible à tout ce qui relevait du mysticisme, sentit une pointe d’inquiétude.
— « Et toi ? » demanda Christopher, brisant le silence. « Es-tu prête ? »
Camille haussa les épaules.
— « Personne ne l’est jamais totalement. Mais j’ai accepté que certaines réponses nécessitent des sacrifices. »
Le lendemain, ils reprirent leur marche, cette fois en tant qu’un groupe élargi. La présence de Camille apportait une étrange dynamique. Léandre retrouvait en elle l’écho de son ancienne gloire, un rappel de ce qu’il avait autrefois cherché avant que la muse ne devienne une obsession.
En approchant de l’entrée de la Crypte, le groupe fut confronté à une première épreuve : un labyrinthe d’ombres mouvantes. Chaque mur semblait projeter des silhouettes qui imitaient leurs gestes mais les déformaient, comme si leurs propres âmes les testaient.
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