Fyctia

@YorlLeSiko

Blanc. Blanc. C’est excitant.

Pas pour moi. Non, pas pour moi.

Les yeux dans la vague, je me noie dans un kaléidoscope de couleurs.

Accoudé à un duveteux coussin, j’oscille comme un benêt sortant de sa boîte.

Je ne sens plus mon corps, prostitué par une douce drogue éphémère.

Je suis cotonneux comme un nuage. Vaporeux, je me prends à la houle.

La bite d’amarrage saillante a fait céder le cordon qui me liait à la terre.

Putain ! Je crois que je suis devenu un hippie qui se la fume.

Ting !

C’est quoi ça ? L’angélus ?! Quelqu'un a sonné mon glas ou c’est moi qui suis devenu cloche.

Pouvant à peine bouger la tête, mes yeux papillonent dans le vide. Je ne vois aucune silhouette bouger dans mon champ périphérique.

Tout à coup, un lutin des neiges apparaît des brumes artificielles, me donnant un grand froid dans le dos.

— Bonjour !

C’est qu’il s’est téleporté d’une soucoupe volante ou quoi ? Pour apparaître si brusquement, il se l’ait certainement joué à la Houdini. Ou c'est tout simplement qu’il est bas de plafond et que je ne l’ai pas vu déambuler.

— J’espère que je ne vous dérange pas.

À peine. Je suis entre le petit pot de bébé et me baver dessus. Dieu que la bouffe d’hôpital est dégueulasse. Surtout quand on se fait gaver par une armoire à glace et seringuer à tour de bras.

De ma voix pâteuse et fébrile, j’annonce :

— Pardon. Qui êtes-vous ?

Il me fixe intensément puis se rembrunit, ne sachant pas quoi faire ou dire.

Pendant ce temps, ça mouline dans mon cerveau sous chimie qui ne va pas tarder à imploser.

C’est qui déjà ce nain de jardin ? Un rouquin flamboyant aux yeux de jungle, ça ne s’oublie pas. Et surtout de ce format-là.

Il me faut une éternité pour tilter et me souvenir de l’instant où il m’a emmené à l’hôpital.

— Vous êtes mon ... sauveur. Celui qui m’a défendu contre un vilain dragon.

Il m’observe d’un air inquiet et éberlué à la fois, et, se dirige vers l’entrée de ma chambre.

Non, pas le médecin ! Pas de piqûre ! Et encore moins le gorille qui me sert de nounou !

— Pour votre information, je vais bien. N’appelez personne !

Je mets le holà, levant les mains de barrage et de concert. Comme si ça pouvait me protéger de l’assaut d’un caïd.

— Je me souviens de vous. Vous êtes le petit gars qui m’a emmené dans cet Enfer sur Terre. Je ne vous dis pas merci.

L'air outré d’une Castafiore, il fronce le nez et entonne son cantique :

— Je vous ai quand même secouru. Vous vous êtes pris le mur de ma maison. Ayant une grosse bosse au front, vous déliriez. Votre vie était en danger.

En effet, c’est du délire. À se prendre un truc dans la face, j’aurais préfére autre chose.

Je me fais une figure de gai diablotin, souriant à pleines dents, narquois.

— Ouais. Ce devait être grave. Qui craint de la mort. Je me vidais de mon sang et étais sur le point de mourrir. C’est ça ?

L’autre pousse un soupir qui aurait fait trembler les maisons des trois petits cochons. Vu sa face d’ange, je doute encore une fois. A-t-il au moins vu le loup ?

— Non, quand même pas. Vous exagérez, dis donc ! Cela fait-il parti d’un des traits de votre personnalité ?!

Difficilement, je me mets assis sur le lit. M’affichant la face pincée telle une épingle, je m’accroche au dossier de ma couche pour ne pas tanguer.

— Pur cas de jurisprudence. Je ne répondrais pas ...

— Vous plaidez donc coupable de votre bêtise et avouez que je vous aie été secourable, petit bandiyouss.

— La seule culpabilité, c'est de voir que vous m’astiquez le bourgeon sans pouvoir en faire autant pour vous.

Il rougit comme un pivoine et essaie d’argumenter. Tellement il est troublé, les seuls bruits qui sortent de sa bouche sont des babillements.

Ingénu comme un minot.

Il commence à me plaire celui-là.

Sa bouche béait tellement...

Fais gaffe ! Tu vas avaler des... mouches.