Fyctia
Chapitre 8.1
— C’est simplement que la vérité dérange, glisse Anissa d’une voix calme.
Je reste bouche bée face à son culot, par contre ma cousine est rouge de colère. Elle se lève d'un bond de sa chaise puis agrippe une côtelette de son assiette et, sans hésitation, la balance à la figure d’Anissa. Pauvre côtelette.
Les autres sont choqués par son geste, pour ma part, je me retient de rire. C’est cruel, mais… bien fait pour elle.
— Mais tu es complètement folle ! rugit Anissa en s'essuyant sa joue pleine de gras.
Sana plisse les yeux et se tient devant elle, les mains sur les hanches.
— Répète ! hurle-t-elle.
Elle fait un pas de plus, prête à lui sauter dessus, mais son frère intervient. Il l’attrape par les épaules et la tire en arrière.
— Tu est contrariée parce que j'ai dit la vérité, ajoute Anissa.
— Mais de quelle vérité tu me parles !
Et là, c’est parti. Elles se lancent dans une série d’insultes, en arabe, comme si ça allait leur donner plus d’impact. Les cousins essaient de les calmer, mais moi, je reste figée à ma place, spectatrice de ce foutoir. À mes côtés, Zaïm croque tranquillement dans son sandwich, comme si de rien n’était.
— Je vais te sortir une vraie vérité sur toi, tu vas voir, crache Sana soudainement.
Non, il ne faut pas qu'elle révèle ça devant tout le monde ! À mon tour, je me lève d’un bond, traverse la table et place ma main sur sa bouche avant qu’elle ne dise un mot de plus. Il ne faut pas non plus qu'elle aille loin, à la base ça concerne uniquement moi.
— Sana, ne fais pas ça ! Pas devant tout le monde.
— Hmm...
Elle essaye de dire quelque chose, mais ma main l'empêche et son frère la retient encore.
— S'il te plaît, ne te rabaisse pas à son niveau, elle n’en vaut pas la peine.
Elle finit par hocher la tête par dépit et retire lentement ma main.
— Lâche-moi, s'écrie-t-elle en s'adressant à Nadir.
Il la libère et quitte en entrant dans la maison.
— Mais qu'est-ce qui se passe, bordel, soupire Anas, exaspéré.
— Girls problem, commente enfin Zaïm, pour ensuite donner un gros croc dans son sandwich.
J'hallucine. Mon coco, tu sais que ça te concerne aussi !
Anissa s’éloigne à son tour, je lui adresse un regard plein de mépris pour son attitude vicieuse.
— Maria ! Qu'est-ce qu'il lui arrive à ma sœur, elle pète les plombs.
— Rien.
À présent, j'offre mon plus beau regard plein de reproches à Zaïm. Il est bien conscient de ce qui se passe, mais il reste indifférent face à cette situation. Qu'il règle son putain de problème avec Anissa et sur leur couple en carton, pour qu'elle arrête de mettre la faute sur moi. Je n'ai rien demandé, encore moins faire partie d'une ridicule histoire.
Je me retire dans ma chambre pour me calmer. Je n'aime pas m'énerver inutilement. Toutefois, la prochaine fois, je ne la laisserai pas s'échapper ! Je suis grave déçu d'elle, je la croyais plus posée, mais j'ai découvert ses vraies couleurs. Tout ça pour un homme, c'est stupide.
...
Je repense à la journée d'hier, c'était un non-sens. Des vagues d'émotion. Dès le matin ça n'allait pas, l'après-midi c'était cool à la fois intense, mais le soir, limite on allait assister à un catch. J'ai encore une fois mal dormi, depuis mon arrivée, je n'ai pas pu avoir un sommeil stable et paisible, il fait très chaud la nuit et je ne supporte pas. De plus, il n'y a ni climatiseur, ni ventilateur, donc je peux aller me faire voir et souffrir en silence.
Il est encore tôt, tout le monde dort, je descends pour me faire un bon petit déjeuner. Espérons qu'il reste des choses à manger, parce qu'avec ces gros dalleux, il n'y a rien qui reste longtemps dans cette baraque.
J'entre dans la cuisine et je tombe sur Zaïm. Quelle joie de voir son visage du bon matin ! C'est ironique bien sûr. Je ne peux pas être seule un seul instant. Je me répète, encore une fois, il est partout où je vais.
Je rentre dans la cuisine et ce que ça sent mauvais ! Une cigarette à la main comme à son habitude. Il mourra jeune à force de fumer.
Je ne lui accorde même pas un regard et je prépare mon petit dej' comme je l'ai prévu. Je sens son regard sur moi, mais j'essaye de ne pas faire n'importe quoi pour lui montrer qu'il ne me déstabilise pas du tout, ce qui n'est pas le cas.
— Bonjour, c'est pour les chiens ? m'adresse-t-il.
— Non, vu que t'en es un.
Je l'ai sorti tellement instantanément que je suis moi-même surprise. Je suis dos à lui, je n'ai pas pu voir sa réaction.
— De mauvaise humeur à ce que je vois.
Je ne sais pas comment il peut garder son calme alors que je viens tout juste de l'insulter gratuitement.
Je n'arrive toujours pas à m'habituer à son léger accent, néanmoins ça le rend charmant. Étant un Québécois, sa façon de parler est presque identique à la nôtre. Il n'a probablement pas vécu longtemps là-bas.
— Maintenant que nous sommes enfin seuls, nous pouvons profiter de ce moment... Toi et moi, il ajoute.
Je ne devrais pas être seule avec lui, mais la faim avant tout.
— Je ne veux pas te parler.
— Si, assieds-toi avec ton thé et nous allons discuter tranquillement.
— Bon ok ! On va discuter une bonne fois pour toutes alors.
Il fallait bien qu'on discute, comme il l'a si bien dit. Je vais lui demander de régler son problème de couple, comme ça, c'est fait et plus de soucis. Je m'assois en face de lui avec mon thé que je viens tout juste de préparer, ainsi que des biscuits et de la confiture que j'ai posée sur la table.
— Je t'écoute, déclaré-je tout en tartinant mon biscuit.
— Les dames d'abord, en m'arrachant mon biscuit à moitié tartiné.
Je pointe le couteau dans sa direction et lui ordonne de me rendre mon biscuit.
— Il me donne envie, lâche-t-il avant de le manger d'un trait.
Quel ogre !
— Et ce n'est pas correct de pointer le couteau sur quelqu'un comme tu le fais, il baisse le couteau avec son doigt.
J'ai pu remarquer qu'il porte des bagues en argent aux doigts, deux chevalières et une en particulier qui est véritablement belle. Un "S" est inscrit dessus. Cependant, mon attention revient rapidement sur lui.
— Con... Je me tais, je vais rester respectueuse, c'est mieux.
— Quoi ? Vas-y fais-toi plaise, insulte-moi, avec un sourire en coin.
Connard !
— Parle, on n'a pas toute la journée.
— Toi, parle, si tu es si pressé, je lui réponds sèchement.
— Quel est ton souci avec moi ?
— Règle ton problème avec ta meuf.
Il hausse un sourcil, comme si je venais de lui parler dans une langue étrangère.
— Ta copine m'a insultée.
— Je n'ai pas de meuf, Maria.
Il a insisté sur mon prénom. Et cette fois, il ne m'a pas appelé "ma belle" comme il le fait souvent.
— Anissa, ce n'est pas ta petite amie, tu vas me dire ?
— Non, c'est elle qui me tourne autour c'te pute, dit-il avec un ton froid.
Au moment où j'étais sur le point de lui répondre, j'entends un bruit provenant de la porte de la cuisine. Mes yeux errent au son de celui-ci et j'aperçois Anissa appuyée contre l'encadrement de la porte.
— Tu insultes de qui de pute ?!
Le problème est de retour.
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