MélineDarsck Miss ni oui ni non 05. Jane – Être présentable

05. Jane – Être présentable

Je suis à la fois soulagée de l’arrivée de Floriane et frustrée. J’avais l’impression de vivre un moment un peu magique. Sans doute uniquement dans mon imaginaire, vu son mouvement de recul, mais tant que Flo n’était pas présente, je restais la seule nana de la pièce. Là, forcément avec sa crinière blonde dont les boucles tombent avec élégance au milieu de son dos, son décolleté généreux et sa jupe virevoltant autour de ses jambes interminables…


Et cela ne manque pas. Le photographe scrute mon amie de la tête au pied, et le sourire se dessine peu à peu aux coins de ses lèvres. Je le connais par cœur, ce sourire. Entre « carnassier » pour celui qui va plonger sur sa proie et le « satisfait » qui ne bougera pas le petit doigt, mais simplement heureux du spectacle qui s’offre à lui.


Pierre embrasse sa cousine et propose à Quentin un tour de l’appartement.


— La cuisine, peut-être, grommelle son pote.


Grognon ? Non moqueur ! L’espace de quelques minutes, j’ai totalement oublié mon apparence et surtout celui de la pièce mentionnée. Je secoue la tête :


— Il y a eu un accident. Flo, tu les emmènes au salon, j’arrive !


Je me précipite vers ma chambre, puis rebrousse chemin. Autant nettoyer le plan de travail alors que je suis dans un triste état et me changer après. Je me pince les lèvres en voyant l’étendue des dégâts, baisse les yeux une seconde, puis attrape l’essuie-tout et commence à rendre la cuisine à nouveau présentable.


Le bouchon du flacon d’essence de fleur d’oranger m’échappe et roule sous le bar. Je me penche jambes tendues au moment où j’entends un raclement de gorge derrière moi. Je me redresse brusquement et mon crâne frappe violemment la planche en marbre. Le bruit m’effraie plus que la douleur. Mes jambes lâchent et je me retrouve à moitié assommée, sur les genoux, me tenant la tête entre les mains.


— Oh merde ! Pardon ! Je voulais pas te surprendre. Désolé, dit Pierre en se précipitant pour me venir en aide.


Je relève les yeux sur lui, puis analyse la situation et éclate de rire. Forcément, entre mon cri, le boum et maintenant mon imitation de petits cochons d’Inde en guise de fou rire, les deux autres restés loin de ma pièce préférée, nous rejoignent. D’abord inquiète, Flo se penche vers moi, puis fait écho à mon hilarité. Seule la gravure de mode semble imperturbable. Je vais pas m’amuser souvent avec lui !


Une fois calmée, Pierre m’aide à me relever, expliquant qu’il était simplement venu chercher un verre d’eau. Flo propose un café, les hommes acceptent et moi je m’éclipse dans la salle de bain.

Je me suis pas loupée, je vais avoir une sacrée bosse. J’ai un de ces mal au crâne ! Pas sûr que j’arrive à faire bonne figure. Pourtant… il le faut.


Mais j’oublie vite cette douleur lancinante en apercevant mon reflet dans le miroir. Je commence à comprendre pourquoi les mecs se sont montrés réticents. J’ai des traces de farine, de chocolat et même de pâte à choux sur les joues, le cou et dans les cheveux ! Quand je me couvre de ridicule, je fais rarement les choses à moitié… et là encore une fois… Le photographe n’oubliera pas de sitôt notre première rencontre : lui, sapé comme pour se rendre à un mariage, arrivant chez une fille parsemée de nourriture. Et si pour certains, ça pourrait être érotique, dans ces circonstances, le désir était très très loin de son expression.


La douche s’impose. Mais une douche rapide, je vais pas les laisser poireauter sans moi. Pire… seuls avec ma coloc ! Elle est capable de leur proposer les pâtisseries avant que je puisse leur en faire l’article.


Cette idée me booste et ni une ni deux, je me retrouve au salon, fraiche, un p’tit peu essoufflée, mais au moins, je ne porte plus aucune trace de ma mésaventure.


— On peut commencer ? demande Quentin, un peu froidement.


Oh ! Mec ! T’es pressé ?


Ma phrase ne s’est pas contentée de rester tranquillement dans mon esprit, elle a franchi mes lèvres avant que je puisse analyser.


— Oui, je ne me suis pas vêtu de cette manière juste pour parler pâtisseries. Je suis attendu !

C’est quoi ce dédain pour mes gâteaux ? Je me renfrogne !

— Je ne vais pas pouvoir tout vous expliquer en deux minutes. Combien de temps avez-vous ?

— Vous avez besoin d’aide pour apporter vos créations ici ? lance-t-il sans prendre la peine de me répondre.


Au moins, il a utilisé un joli terme pour décrire mes gourmandises. Il se rattrape un petit peu. Mais un tout p’tit peu. Et son sourire pour s’excuser aussi. Il est vraiment… à tomber !


Merde ! Ressaisis-toi, Jane !


— SI vous veniez à la cuisine ? Ça sera plus simple.

— Mais dangereux ! complète le photographe.


Je fais volte-face et répète :


— Dangereux ? Dangereux pour qui ?


Son regard passe de mes yeux à mon front où une bosse commence à apparaître. Une fossette se dessine au milieu de sa joue, juste avant qu’il se mette à sourire. Je ferme les yeux et complète sa pensée en tiquant :


— Je la connais bien, ma cuisine. Je ferai attention.


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