Fyctia
Ça gaze à tous les étages
Françoise relut la lettre deux fois, elle ne savait pas que faire. Prévenir Miel était impossible avant deux jours, aucune de ses deux amies infirmières n'étant de garde avant ce délai. Il fallait donc qu'elle décide elle-même de la conduite à adopter. Elle était en face d'une balance et devait charger elle seule les plateaux. Son esprit oscillait entre deux solutions : soit elle attendait que ça se passe et remettait la lettre aux poulets et là, Claire aura certainement disparu, soit elle allait tout de suite chez les flics leur cracher le morceau mais dans ce cas, elle pouvait faire coincer Claire. Pas de la tarte ce boxon !
Elle réfléchit un moment, l'essentiel était de sortir Miel de ce merdier, ça oscillait encore dans son cerveau : Claire arrêtée/ Miel libéré- Claire morte/ Miel encore enfermé ! Pire encore : Claire morte/ Miel réellement fou ou mort !
Elle n'hésita plus une seconde, elle se rendit à la P.J et demanda à voir Desnos. Elle ne voyait rien d’autre à faire.
Claire, avant de rentrer chez elle, passa à sa banque. Elle retira l'argent de son compte en totalité. Elle se rendit chez l'armurier de la Porte des Lilas et acheta deux énormes bombes de produit incapacitant à 4O% ainsi qu'un fusil à pompe et des munitions. Elle expliqua au vendeur que c'était pour équiper une résidence secondaire, celui-ci ne lui en demandait pas tant, tout était en vente libre et sa cliente avait l'air de ne pas chicaner devant les prix. Elle choisit des cartouches avec du gros plomb, elle lui demanda le plus gros possible et se fit décrire la gerbe de plomb que celui-ci devait produire. Elle paya en liquide et se fit emballer le tout dans du carton. Elle déposa le colis chez elle et ressortit faire d'autres emplettes : un jerrican en plastique qu'elle fit remplir d'essence à la station-service où elle acheta un petit cric hydraulique. Ce dernier mesurait trente centimètres de haut et pouvait soulever six tonnes. Elle posa le tout chez elle, loua une voiture pour la journée et se rendit à la poste. Elle rédigea un mandat d'un montant équivalent aux trois-quarts de l'argent restant qu'elle envoya à Françoise avec la mention : “ Pour Miel.”
Elle chargea la voiture et se rendit à Malakoff. Elle rangea la voiture en un endroit d'où on pouvait voir la maison de Lagarde, à cinquante mètres à peine, sans attirer l'attention. Elle attendit la tombée de la nuit et se rendit à pied vers la maison. Elle en fit le tour rapidement, il y avait un garage avec une porte coulissante, elle ne s'était pas trompée. Passant dans la petite rue donnant sur l'arrière de la maison, elle vit de la lumière au premier étage. Elle alluma un des joints que Françoise lui avait donnés et le fuma avec délice en rassemblant tous ses esprits. Elle regagna sa voiture et en deux voyages amena son matériel. Elle se glissa sur le côté de la maison, elle était à l'abri des regards extérieurs, elle regroupa silencieusement son matériel a deux mètres à peine de la porte du garage qu'elle essaya d'ouvrir. Elle était fermée de l'intérieur.
Claire eut un sourire douloureux : ou le garage s'ouvrait et communiquait avec le reste de la maison ou elle avait mal anticipé et il lui fallait trouver autre chose. Elle prit le cric et eut un instant de jubilation, elle pouvait exactement coincer ce dernier entre la poignée et le mur. Elle pompa en le maintenant en place et a la troisième manœuvre, la serrure céda sans trop de bruit. Claire se retira avec le cric sur le côté de la maison et attendit un instant puis elle essaya d'ouvrir la porte, c'était sans problème, elle avait décollé de cinq centimètres du mur, la serrure était morte. Elle retourna au coin du mur, ouvrit son sac, remplit ses poches de cartouches, prit le fusil, le chargea et alla le déposer à l'intérieur du garage. Elle revint chercher l'essence et mît les deux bombes dans son blouson. Dans le garage, elle trouva la porte qui donnait sur le couloir qui descendait à la cave où elle avait été séquestrée. Elle alluma un deuxième joint, son cœur battait un peu vite et la fumée entrant dans ses poumons lui procura une sensation de bien être.
Le couloir était sombre, aucune lumière ne filtrait sous la porte. Elle l'ouvrit doucement entrevit sur sa gauche la descente de la cave. Sur la droite elle pouvait apercevoir la porte d'entrée et au-dessus de sa tête l'escalier qui montait au premier, il était en bois. Elle réfléchit un instant et retourna dans le garage. La voiture de Lagarde était au beau milieu de la pièce. Elle entendait les bribes d’une discussion animée venant du dessus et en conclut qu'ils étaient plusieurs occupants dans la maison. Il fallait absolument qu'elle passe rapidement à l'action avant que l’un des fachos descende.
Elle hésita un moment et eut réellement peur de ce qu’elle allait faire, elle ferma les yeux et vit Miel qui lui souriait.
Elle n’hésita plus un instant, prit le jerrican d'essence, ouvrit la voiture de Lagarde et renversa au moins trois litres de carburant à l'intérieur. Elle laissa une coulée d'essence sortir de la voiture et lui fit suivre le chemin du couloir. L'essence commençait à couler sur les marches de la cave, elle posa le bidon en haut de l'escalier, sous celui en bois qui montait au premier, bien au centre de la flaque d'essence. Elle descendit quelques marches son fusil a la main et le posa contre le mur. Elle remonta rapidement dans le garage et trouva un robinet d'eau. Elle mouilla sa cagoule, la passa, fit de même avec son écharpe qu'elle mît devant sa bouche. Elle arrosa copieusement ses vêtements et mit les lunettes de ski qu’elle avait dans sa poche. Elle sortit ses deux bombes de son blouson et après avoir refermé la porte du garage elle vida ses bombes dans le couloir.
Le gaz malodorant montait dans l'escalier, elle n'attendit pas vraiment que les bombes soient vides et battit en retraite dans l'escalier de la cave. Le gaz la faisait pleurer malgré sa protection mais elle résista. Elle sortit son briquet, un mouchoir en papier qu'elle enflamma et jeta sur l'essence. La flamme courut dans le garage et le bidon resté en haut de l'escalier projeta des flammes qui léchèrent rapidement l'escalier du premier. Claire entendit une cavalcade au-dessus de sa tête, le feu était lui aussi assez bruyant. Elle arma son fusil et s’accroupit dans le bas des escaliers de la cave. Un premier homme était parvenu en bas de l'autre côté des flammes, elle tira dans sa direction sans vraiment viser, il s'écroula et essaya de regagner les marches. Claire le voyait distinctement, il avait pris la décharge de plombs dans les jambes et ne pouvait pas se remettre debout. Il ne pouvait plus ouvrir les yeux à cause du gaz et commençait à suffoquer.
Un autre homme apparut et essaya de lui tendre la main pour l'aider à remonter l'escalier. Claire tira une fois dans sa direction et il tomba à la renverse dans l'escalier.
0 commentaire