Catherine Domin même pas en rêve Chapitre 12 - Sortie nocturne

Chapitre 12 - Sortie nocturne


Lui :


vendredi 15 mars 2024


Cette fois-ci, elle a dépassé les bornes !


Elle, c’est Alice ! enfin « Miss Marple ».


Voilà comment ça s’est passé. Nous avions discuté la veille des trois meurtres qui avaient été commis dans notre immeuble. Et c’est vrai que nous n’avions pas de nouvelles de Lavergne. Silence radio ! Mais je ne voulais à aucun prix m’en mêler. Même si je suis un ancien flic, je n’ai aucune légitimité pour enquêter là-dessus.


Mais voilà qu’elle a eu une conversation ce matin, avec Mme Bignolles, notre concierge, la bien nommée. Il y a des boulangers qui s’appellent « Pain», des pâtissiers qui s’appellent « Croissant », des botanistes qui s’appellent « Dujardin », des philosophes qui s’appellent « Grossetête », etc.

Cela s’appelle des « aptonymes ».


Et notre Mme Bignolles, est concierge, comme « bignole » en argot, qui veut dire la même chose.

Celle-là, je la retiens, la mère Bignolles !


Bien entendu, elle ne peut pas déroger aux principes bien connu des concierges. Sans vouloir tomber dans le cliché, celles-ci racontent souvent, à tout le monde, sous le couvert d’un prétendu « secret », d’ailleurs rapidement éventé, toute la vie de chacun d’entre nous.

Par conséquent, chacun est au courant de détails parfois croustillants concernant la vie du voisin. Déjà que le vieux Dubus était toujours à l’affut à nous espionner et à noter tous nos faits et gestes. Et il l’a payé cher. Très cher ! D’ailleurs, son cahier rempli de nos faits et gestes soigneusement notés était toujours entre les mains du Capitaine Lavergne.


Je n’avais pas réalisé, jusque-là, à quel point nous vivions dans un nid d’espions ! On se croirait au KGB, ou alors dans un village dans un coin reculé où tout se sait.


D’ailleurs, je me demande bien ce qu’on peut dire sur moi, l’ancien flic. Les habitants de l’immeuble m’évitent sûrement, pensant que je les soupçonne de tout et n’importe quoi, alors que je me fous royalement de leurs faits et gestes. Enfin… pas totalement ! Tant qu’ils restent dans la légalité.


Et voilà que la mère Bignolles lui a dit que Lebreton et Guillou étaient amants, depuis des années. Elle les aurait surpris, plusieurs fois en train de se rouler un patin dans l’entrée de l’immeuble.


Bien entendu, elle a demandé à Miss Marple de ne le répéter à personne, et elle-même ne l’aurait soi-disant pas révélé à la police.


Et pourquoi la mère Bignolles révélerait maintenant ce détail à Miss Marple ?

Et si c’était elle qui avait mis le mot sur le paillasson ?


L’instinct du « poulet normand » que je fus commence à se réveiller un peu plus.


Et la miss me l’a répété, à moi. Vaut mieux que ce soit à moi qu’à quelqu’un d’autre, et je lui ai dit de tenir sa langue et de ne pas colporter des ragots. J’étais inquiet pour elle. Je ne voulais pas qu'elle en sache trop.


— Ce genre de confidence n’intéresse personne ! lui avais-je répondu.

— Ça peut intéresser la police ! m’avait-elle dit. Voilà le lien qu’il y a entre les deux !

— Bof ! n’importe quoi.

— Mais si ! Supposons que quelqu’un ait pris ombrage de cette relation, pour une raison quelconque.

— Mais on ne tue pas pour ça ! Pourquoi voulez-vous que quelqu’un s’en soit offusqué. Tout le monde a droit à une vie sentimentale, même entre deux hommes ou deux femmes. Vous savez que l’homosexualité n’est plus un délit depuis la loi du 4 août 1982.

— Vous semblez être bien renseigné.

— Vous oubliez que je suis un ancien flic et que je pouvais être concerné dans le cas de certaines enquêtes. Par conséquent, je me dois d’être au courant des changements concernant le code pénal. Et cette loi est sortie juste au moment où je commençais ma carrière.

— Ah bon ! dit-elle d’un air goguenard. J’ai eu peur !

— Peur de quoi ? Que j’aie viré ma cuti moi aussi ? Très peu pour moi. Et puis épargnez moi ce genre d’allusion très peu flatteuse. Et je pourrai, moi aussi, avoir des doutes aussi en ce qui vous concerne.

— Comment osez-vous !

— Rien qu’à votre allure… A votre façon de vous habiller, je me suis demandé…


J’ai vu que j’étais allé trop loin. Elle semblait vexée. Et resta coite. J’étais sûr qu’elle faisait la tête.

— Bon, allez ! Je déconne ! Je suis sûr que vous n’êtes pas… dis-je, un peu honteux de ma goujaterie.


En fait, je m’étais mépris sur son silence. Elle ne m'avait même pas écouté. En réalité, elle réfléchissait. Ses petites cellules grises fonctionnaient à toute allure. Mais je ne le compris que bien plus tard.


— Et si c’était un autre amant jaloux ? reprit-elle au bout d’un moment.

— Un crime passionnel ? Quand même, vous y allez un peu fort.

— Ou un crime crapuleux.

— Cela m’étonnerait moins.

— Vous manquez totalement d’imagination, pour un ancien flic !

— J’ai appris, lors de mes études à l’Ecole Nationale de Police, qu’il fallait un faisceaux d’indices probants, avant de conclure quoi que ce soit. Avons-nous un faisceaux d’indices probants ?

Non ! Alors ?

— Je n’ai que des présomptions.

— Ce n’est pas suffisant !

— Pfff ! fit-elle, l’air boudeur.


Puis elle ne dit plus rien de la soirée. Muette comme une carpe. Un silence inquiétant, la connaissant.


En fait, j’ai bien fait de m’inquiéter.


Cette nuit-là, j’ai été réveillé par un bruit bizarre. Comme quelqu’un qui marchait dans le couloir. Le plancher crissait légèrement.


Cela doit être encore la miss qui va faire pipi. Elle peut toujours me taquiner au sujet du fonctionnement de ma prostate ! Mais j’ai cru entendre la serrure de la porte d’entrée. Bizarre ! bizarre !


Je me suis levé, j’ai enfilé mon peignoir, sans allumer. Puis, enfournant mes pieds dans mes savates, je suis allé voir si elle dormait. Et le lit était vide.


— Nom de dieu ! Qu’est-ce qu’elle a encore inventé !


Alors, je me suis aventuré sur le seuil de mon appartement. La porte d’entrée était restée grande ouverte. Comme ça, les cambrioleurs peuvent entrer à leur guise !


Avant de sortir, j’ai attrapé mon trousseau de clefs sur la tablette près de la porte, car je ne voulais pas, si la porte se refermait, me retrouver en pyjama dans l’escalier pendant tout le reste de la nuit. Je ne me voyais pas attendre le lendemain pour aller voir la concierge, en pyjama, afin de récupérer chez elle le double de mes clefs.


Je serai ridicule et ensuite elle dirait à qui veut l’entendre que le flic de l’immeuble mène une vie dissolue.


J’ai donc refermé la porte précautionneusement et je suis descendu jusqu’au rez-de-chaussée, jusqu’à l’appartement de Lebreton.


Bon sang de bonsoir ! les scellés étaient brisés.


C’est du Miss Marple tout craché ça !


Bon sang ! Elle va m’entendre !


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9

9 commentaires

Emeline Guezel

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Il y a un an

À jour 🥰

Seb Verdier (Hooper)

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Il y a un an

Quelques likes de soutien ;)

Catherine Domin

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Il y a un an

Merci ! J'espère que tu as aimé ce chapitre

Jeanne Carré

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Il y a un an

Qu'a-t-elle bien pu inventer ? 🌸

Catherine Domin

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Il y a un an

ha ha ! tu le sauras lors du prochain épisode... Merci pour le commentaire !

Gwenaële Le Moignic

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Il y a un an

;-) Au plaisir de se suivre et de se lire !! Belle journée !

Catherine Domin

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Il y a un an

Bonjour GWenaelle, Merci beaucoup. Je continue à aller dans ton histoire, très intéressante

François Lamour

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Il y a un an

Like du "Connard romantique" 😁

Catherine Domin

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Il y a un an

Merci ! il faut vraiment que j'aille dans ton histoire...
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