Fyctia
Chapitre 2 - Lui
Ce matin, j’ai fait les courses au supermarché du coin, comme tous les samedis.
Je sais, je suis retraité et je devrais faire mes courses en semaine, afin de laisser les braves travailleurs faire leurs achats ce jour-là. Mais, c’est une vieille habitude que j’ai prise quand je me suis retrouvé à la retraite avec ma femme, et comme on le sait, les habitudes ont la vie dure ! Et puis, tant mieux si ça embête les gens ! C’est vrai, je suis un vieux ronchon, un vieil emmerdeur, je le reconnais.
En fait, quand j’étais actif, je ne faisais jamais les courses. C’était ma femme qui les faisait. Je n’avais pas le temps ! J’étais appelé à tout bout de champs pour mon travail. De jour comme de nuit. J’exerçais alors le beau métier d’officier de police.
Beau métier ! Beau métier ! Fichu métier oui ! Pas toujours géniaux, les réveils nocturnes.
Souvent, lorsque je dormais, exténué, comme une souche, c’est ma femme qui répondait au téléphone. Puis, elle me donnait un grand coup de coude dans les côtes pour me réveiller et me passait le combiné. Elle était excédée et avait fini par perdre le sommeil à la longue. Si cela continuait, elle me menaçait de faire chambre à part. En fait, elle n'a jamais mis sa menace à exécution.
Et tout cela a duré vingt cinq ans !
Et il n’y avait pas encore le portable à l’époque. Je répondais alors d’une voix embrumée, les yeux collés par le sommeil et les cheveux en bataille. Et, comme d’habitude, j’apprenais qu’un homicide venait d’être commis et qu’il fallait que je me rende dare-dare sur les lieux du crime.
Le commissaire y était déjà ! Il ne dormait jamais celui-là. Ou c’était un surhomme ou il prenait des amphétamines. Je crois plutôt qu'il en prenait car il était excité comme une puce, remonté comme un réveil !
Et, bien évidemment, cela ne pouvait attendre. Je me levais en soupirant, et après une rapide douche froide pour me réveiller, je prenais mon véhicule comme un somnambule et je me rendais là où on m’attendait. Le commissaire m’accueillait généralement par un « C’est pas trop tôt ! » et je le maudissais intérieurement, tout comme je maudissais le meurtrier qui me tirait de mes rêves roses et bleus et de mon lit douillet.
Et combien de nuits hachées ai-je passées au cours de ma carrière ! Heureusement, j’ai mis les voiles à 57 ans. Je pouvais partir à 52 ans, mais j’ai fait quelques années de rab pour avoir une meilleure retraite. Et puis aussi parce qu’on manquait de bras. Alors, puisqu’on m’a demandé de rester, j’ai continué. Jusqu’à l’usure. Parce que, malgré tout, je l'aimais ce fichu métier !
Un policier ne devrait pas se marier. Sa vie est bien trop compliquée. On le voit bien dans les séries policières dont on nous abreuve continuellement à la télé. Je ne les regarde jamais ! J’ai à chaque fois l’impression de retourner au boulot !
Néanmoins, je me suis marié quand même et j’ai réussi à avoir deux enfants. Et puis, avoir une famille, même si on la voit en pointillés, cela fait une heureuse diversion par rapport à un travail stressant. Car voir des meurtres à longueur de temps, ça use. On est souvent confronté au pire de l’être humain.
Puis, au moment où je pouvais profiter pleinement de ma vie conjugale, ma femme est morte d’un cancer. Je n’ai rien vu venir. Jamais je n’aurais envisagé que cela pouvait arriver. J’ai été complètement assommé, laminé, dévasté. Heureusement, mes enfants m’ont soutenu. Maintenant, c’est derrière moi. C’était il y a quatre ans.
Maintenant, je suis un papy heureux. Un "papy gâteau". je vois souvent mes enfants et mes petits-enfants que je garde de temps en temps et cela suffit à mon bonheur. Je ne demande rien à la vie que de finir mes jours dans la paix et l’harmonie.
Enfin zen !
Et voilà qu’une sacrée bonne femme déboule dans ma vie !
Comme ça, sans prévenir !
Une vieille fille en plus ! La pire des engeances féminines. Je sais, je suis le cauchemar des vieilles filles, des féministes et des chiennes de garde. Ma femme me l'a souvent dit.
Je suis macho et bourré de préjugés, mais c'est comme ça ! Un vieux mec ronchon !
Et elle a tout chamboulé en deux temps, trois mouvements ! Une sacrée emmerdeuse en vérité !
12 commentaires
Gwenaële Le Moignic
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Il y a un an
ZELI
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Il y a un an
Catherine Domin
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Il y a un an
Alexandra G
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Il y a un an
Clém
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Il y a un an
Jeanne Carré
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Il y a un an
Emeline Guezel
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Il y a un an
chiara.frmt
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Il y a un an
Catherine Domin
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Il y a un an