Fyctia
Cancún
Krystal Hôtel, Cancún, 15 mars 2023.
La chaleur éreintante de ce début d'après-midi m'épuise. Dans ma Bretagne profonde, je ne suis pas habituée à supporter ce genre de température. Chez nous c'est plutôt la pluie à toute saison.
Je suffoque, mais quelle idée d'être venue me perdre ici ?!
Je quitte l'aéroport et dans un espagnol totalement approximatif, je demande au chauffeur de me conduire au Krystal Hôtel.
Il ne semble visiblement pas comprendre et me montre du doigt mon téléphone à la main.
Ah oui ! Quelle idiote ! Je peux rentrer l'itinéraire sur mon smartphone. Merci à l'inventeur de ces petites merveilles !
Après plusieurs minutes de route, nous longeons une route bordée de dizaines d'hôtels sur la gauche et d’une plage à perte de vue sur notre droite. Les palmiers qui défilent à travers la vitre m'offrent un spectacle apaisant. Je me demande ce qui m'a pris de faire onze heures de vol pour atterrir dans un pays inconnu en pleine période de Spring Break où débauche, beuverie et sexe sont les principales activités de la semaine pour la plupart des voyageurs échoués ici.
Arrivée devant l'hôtel, je me prends une claque. Waouh ! Impressionnant ! De tout en haut, on doit avoir une vue imprenable sur la ville et la mer.
Je m'engouffre par les portes automatiques et me dirige vers l'accueil. Je donne mon nom au réceptionniste qui semble tiquer.
Je commence à m’impatienter après une dizaine de minutes quand l'un de ses collègues nous rejoint et me donne la carte de ma chambre. Top ! 12e étage ! Je vais profiter de la vue.
Dans l'ascenseur, je me concentre sur les chiffres qui défilent, pour ne pas déclencher ma claustrophobie.
Arrivée devant la porte, je passe la carte magnétique dans la fente et pénètre dans la pièce. Dès l’entrée, il y règne un bazar sans nom. La chambre sent la distillerie à plein nez !
Je me déplace jusqu'à la fenêtre, évitant les cadavres de bière et les vêtements épars jonchant le sol, et tire les rideaux avant de me tourner vers le lit, où… ma mère encore habillée est allongée à côté d'un bel inconnu, torse nu !
— C’est pas vrai ! Eteins cette lumière Nathalie ! grommelle le mec sans même se tourner vers moi avec un accent trop sexy.
— Ce n'est pas moi ! bafouille ma mère, l'air totalement hagard et ses yeux bleus similaires aux miens, vitreux.
Mon sang ne fait qu’un tour.
— Mais c’est quoi ce cirque ? Toi, tu prends tes affaires et tu te casses immédiatement Don Juan, je tonne, excédée, en lui balançant son tee-shirt en pleine face.
Le mec se retourne brusquement aveuglé par la lumière.
Ah ouais ! Ma mère ne s'emmerde pas ! Il est pas mal !
Il se relève et s'assied sur le lit, les muscles de ses biceps se contractent, puissants. J'aperçois ses pectoraux bien dessinés et ses abdominaux tendus rouler sous l'effort.
Punaise ! Il est bien sculpté en plus ce petit con !
En plein brouillard, le regard dans le vague, il me dévisage, perdu.
Je suis bluffée par la couleur unique de ses yeux, marrons tachetés de points dorés avec une auréole verte autour de ses pupilles.
— Tu vas quitter la chambre de ma mère, Toy boy, je reprends. TOUT DE SUITE !
Le mec stupéfait, oscille entre ma mère et moi, en lui lançant des appels à l'aide du regard.
— Ma puce, ce n'est pas ce que tu crois. C'est un ami !
Je lui coupe la parole, exaspérée. Cette situation me dégoûte.
— Papa ne mérite vraiment pas ça…
Voulant échapper au règlement de comptes, le mec enfile son tee-shirt et se dirige vers la sortie sans demander son reste.
Brave garçon !
— Mais de quoi tu parles ? Pour une fois que je m'amuse. Et ton père, laisse-le où il est ! Mais qu'est-ce que tu fais là d'ailleurs ? m'attaque-t-elle.
— À ton avis ? Papa et Chloé t'attendent depuis une semaine. Tu manques à ta fille ! Tu te souviens, une petite blonde de dix ans qui fait des cauchemars depuis ton départ.
— Oh non, mon amour ! Mais pourquoi elle ne m'a pas appelé en Facetime pour que je la rassure ?
— On l'a fait maman ! Mais tu ne réponds jamais.
Un bruit de chasse d'eau nous interrompt subitement.
Sérieux, il est parti pisser cet abruti ?!
La porte des toilettes s'entrouvre laissant apercevoir une touffe de cheveux bruns hirsutes.
— Continuez, faites comme si je n'étais pas là, intervient-il, juste avant de quitter la chambre pour de bon.
Tout en le foudroyant du regard, je me retourne vers ma mère.
—Bref, aboyé-je, Maman, tu t'habilles et on va prendre des billets d'avion pour rentrer immédiatement.
D’un geste rageur, je commence à balancer ses affaires en vrac dans sa valise lorsqu'elle se met soudainement à pleurer.
Entre deux sanglots, elle commence maladroitement à bredouiller des excuses qui ont le don de m'exaspérer.
— Arrête maman, je ne suis pas d'humeur. Non mais vraiment, c'était qui ce mec, un Escort boy ?
Outrée par ma remarque, elle cesse immédiatement de pleurer et redresse les épaules :
— Lola Dupuis, je ne te permets pas de me parler comme ça et d'insinuer des choses aussi ignobles !
— Alors explique-moi pourquoi je te retrouve avec un Apollon de vingt ans de moins dans ton lit !
Visiblement furieuse à son tour, elle se lève et part en direction de la salle de bain.
Non mais où elle va comme ça ?!
Sa dernière fringue balancée dans la valise, je la rejoins et me plante bras croisés au milieu de la pièce, bien décidée à obtenir des explications.
— Écoute, sache que j'ai déjà pris mon billet d'avion retour… mais dans cinq jours, m'annonce-t-elle, déterminée, tout en se séchant.
— Quoi, tu te fous de moi ! Je ne reste pas cinq jours ici. J'ai horreur des Spring Break et j'ai un partiel important la semaine prochaine… Je rate des cours pour venir te retrouver je te signale… Mince maman, arrête d'être égoïste pour une fois !
— Quoi ! Moi égoïste ? J'ai tout donné pour vous, j'ai mis ma vie entre parenthèses pour vous élever et être la parfaite ménagère qu'on attendait de moi. Tout ça pour finir par faire partie des meubles. J'ai le droit de profiter maintenant !
Elle semble tout d'un coup tellement vulnérable… ça me fend le cœur.
— Mais Maman, explique-moi en quoi fuir à l'autre bout du monde signifie « profitez de la vie » ?
Tu te comportes vraiment comme une gamine !
— Écoute, on discutera quand nous serons toutes les deux calmées ! En attendant reposes-toi, moi je pars à la plage ! dit-elle en claquant la porte et me laissant planter là.
Alors là c'est la meilleure ! De colère, je me laisse tomber sur le lit. Elle se paye vraiment ma tête !
J'ai besoin d'un remontant là… Ni une ni deux, j'ouvre la porte du minibar et lorgne sur les mignonnettes de rhum. Allez ! J'en engloutis deux, cul sec, le liquide me brûle immédiatement la gorge.
Tu me dois des explications Maman ! ruminé-je en absorbant une troisième dose, puis une quatrième.
Pas mauvais leur tord-boyau !
Je me lève, bien déterminée à la rejoindre mais je sens que je vacille dangereusement. L'alcool et le décalage horaire ont raison de moi et je sombre dans un profond sommeil, et m'étale sur le lit, tout habillée.
10 commentaires
Salma Rose
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Il y a un an
Lhana1709
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Il y a un an
Itz_Josiane
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Il y a un an
Seph
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Il y a un an
Lhana1709
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Il y a un an