Sylvie Marchal Marie Chapitre 52

Chapitre 52

Les lumières bleues des gyrophares illuminent à intervalles réguliers les visages des pompiers qui s’affairent autour du véhicule de Pascal. Le chef d’agrès, radio à la main, dirige les opérations de désincarcération, tandis que les gendarmes tentent de rétablir une circulation alternée sur la route.


La curiosité naturelle des automobilistes les incite à ralentir à hauteur de l’accident, à se tordre les cervicales quand ils passent près de l’habitacle de la 306. Le drap blanc tendu en guise de paravent ne suffit pas à masquer le triste spectacle. Les énormes tenailles de métal croquent, bout après bout, des morceaux de carrosserie pour libérer une victime qui ressemble à un insecte violemment enserré au cœur d'une plante carnivore.


La victime est inconsciente, elle a perdu beaucoup de sang. Une partie de son crâne scalpé saigne abondamment, ne laissant plus guère deviner les traits de son visage. Sa respiration est rapide, superficielle. Son pouls est rapide, filant. Son état général inquiète sérieusement les soldats du feu qui n’ont eu d’autre choix que d’appeler le SAMU en renfort, afin de médicaliser au plus vite le malheureux conducteur.


– Allez Adrien ! Bouge-toi, coupe-moi le toit de cette caisse, qu’on puisse au moins lui passer un peu d’oxygène !

– Je fais le max, chef ! Mais vu comment la bagnole s’est enroulée autour du tronc, on en a encore pour quelques instants !

– On n’a pas le temps ! Le doc devrait arriver avec son équipe dans deux à trois minutes, débrouille-toi comme tu veux, mais tu m’ouvres cette fichue boîte de conserve !


Adrien remotive ses hommes, les galvanise. L’homme dans la voiture semble avoir leur âge, il a sans doute, lui aussi, une femme et des enfants qui l’attendent quelque part.


À force de persévérance, son corps devient enfin accessible.


Au même moment, le deux-tons du véhicule du SAMU se fait entendre et soulage l’ensemble des pompiers, conscients que le médecin aura toute sa place sur cet accident.


Une jeune femme au chignon blond saute par la portière passager et atterrit lestement sur le bitume :

– Qu’est ce qu’on a, chef ? Accident de la voie publique, une seule victime, c’est bien ça ?

– C’est ça, Doc ! Il devait rouler sacrément vite, le gars, pour louper son virage et finir enroulé comme ça ! Inconscient, il a perdu beaucoup de sang mais je soupçonne aussi une hémorragie interne, parce que ses constantes sont vraiment dans les choux !


Le médecin se dirige près de l’amas de tôle, effectue un premier bilan puis donne ses consignes. On pose un collier cervical à Pascal, on le perfuse, on lui injecte des anti-douleurs et enfin, commence le lent travail d’extraction de cette gangue de métal.


Quand il est installé dans le camion blanc, Pascal n’est pas encore en état d’être transporté. Son cœur est si faible qu’il faut déjà le stabiliser avant de prendre la route. Hors de question de risquer un arrêt cardiaque sur la rocade de Bordeaux !


Quarante longues minutes plus tard, le convoi médical s’ébranle avec lenteur, aussi précautionneux que s’il transportait un nouveau-né.


Après ce départ, les services techniques de la commune de Libourne s’affairent à rendre la route praticable, balaient les débris de verre qui stagnent sur le bitume, retirent les morceaux de métal, un à un. Au même moment, les gendarmes vérifient que la plaque d’immatriculation corresponde bien aux papiers d’identité trouvés sur la victime. Quitte à aller prévenir une famille qu’un malheur vient d’arriver, autant ne pas se tromper d’adresse !


Quand un équipage de gendarmes se présente devant chez Pascal et Marianne, en fin d’après-midi, ils trouvent porte close. La voisine, inquiète, pointe le bout de son nez :

– Bonjour Messieurs, permettez-moi de vous demander si je peux vous aider ?

– Avec plaisir, Madame, nous cherchons les habitants de cette maison ! répond le plus grand des deux, de manière évasive.

– Marianne, elle doit être à son travail, au bureau de poste de Libourne, je pense. Son mari et la petite, aucune idée !


D’un regard, les deux soldats de la loi se sont mis d’accord. Ils remercient la vieille femme et tournent les talons pour se rendre sur le lieu de travail de l’épouse à laquelle ils apportent de sombres nouvelles.


Quand son chef de bureau la fait venir dans l’arrière-salle, Marianne ne s’attend pas à y trouver deux hommes en uniforme, le visage grave :

– Messieurs ? lance-t-elle, déstabilisée, la voix pincée.

– Madame, asseyez-vous, nous sommes porteurs d’une nouvelle difficile ! répond le plus jeune en poussant une chaise vers elle.

– Mon Dieu ? Ma fille ? Il est arrivé quelque chose à ma fille ? siffle Marianne, en panique.

– Non Madame. Nous sommes ici pour votre mari. Il a eu un sérieux accident de voiture, à quelques kilomètres d’ici. Il a été transporté vers le CHU de Bordeaux et ses blessures sont importantes. Il était inconscient et apparemment il avait perdu pas mal de sang.


Sonnée, Marianne ne répond pas. Au moins, il est vivant. Il est à l’hôpital. Tout va s’arranger, il sera opéré si besoin, mais il s’en sortira.

Devant son état de sidération, l’homme en uniforme reprend :


– Y a-t-il quelqu’un qui puisse vous conduire auprès de lui ? On préférerait savoir que vous ne prenez pas le volant sous le coup de l’émotion !

– Ma sœur ! Quelqu’un peut la prévenir ? Elle va venir me chercher, elle va m’y amener !


Comme un robot, Marianne se lève, va jusqu’à son vestiaire ou elle attrape un petit répertoire, dans son sac à main. Son chef de bureau, qui comprend ce qu’elle attend de lui, opine du chef et y recherche le numéro de Marie.


Quarante minutes plus tard, les deux sœurs sont assises dans la salle d’attente des urgences de Pellegrin, serrées l’une contre l’autre. Une infirmière est venue à leur rencontre, en coup de vent. Elle a pris quelques informations sur l’état de santé de Pascal avant qu’il ne soit conduit au bloc. Présente-t-il des allergies ? Souffre-t-il d’une maladie chronique ? La piste de l’hémorragie interne est confirmée, il n’y a pas une minute à perdre.


Toujours sous le coup de la sidération, Marianne a les yeux perdus dans le vague et parle d’une voix monocorde :

– Et Méline ? Il faut absolument qu’elle soit prévenue, qu’elle me rejoigne ici, pendant que son père se fera opérer. Il faut qu’on rentre chez moi, elle est peut-être revenue de son shopping, elle va s’inquiéter de ne pas me voir rentrer du travail, je dois…

Marie sert avec force la main de sa cadette :

– Stop! Toi et moi, on ne va nulle part ! Tu as raison, il faut prévenir Méline, mais nous, on reste au plus près de Pascal. Je vais à la cabine, j'appelle Manu et je lui demande d'aller chez toi. C’est un super tonton, il saura lui annoncer ça avec toutes les précautions possibles et ensuite, ils nous rejoindront ici. Et on attendra que Pascal se réveille, ensemble. On sera tous à ses côtés.


Marianne acquiesce d’un signe de tête, des larmes plein les yeux.




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12 commentaires

cedemro

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Il y a 2 ans

Le drame ne pouvait pas être plus intense pour cette famille déjà affaiblie par son passé. J'en ai le coeur douloureusement serré. J'espère sincèrement que Pascal s'en tirera, mais surtout que Méline ne succombera pas aux mensonges de Marthe. Je n'ose imaginer ce qu'elle va ressentir en apprenant ce qui est arrivé à son père, par sa faute malheureusement...

George Clooney

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Il y a 2 ans

Bonjour Sylvie, vous vous doutez bien que je ne suis pas George Clooney le vrai, mais mon prénom était déjà pris, j'ai suivi la mouvance ! Je viens de découvrir votre roman, j'ai tout de suite accroché et lu les 50 chapitres quasiment sans interruption. Belle plume, mais quelle histoire, dure, noire, ça m'a vraiment remué. J'ai vraiment hâte de découvrir la suite.

Sylvie Marchal

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Il y a 2 ans

Merci très cher Georges ! Quelle que soit votre véritable identité , je vous remercie de suivre l histoire de Marie. J’ai bien perçu la mouvance américaine de certains pseudos et j’avoue qu’entre deux chapitres un peu denses à écrire (euphémisme !) , cette petite note de mystère et d’humour a eu le don de me faire sourire ! Merci pour ça ! J’espère qu’à la fin du concours, vous m’enverrez un message privé pour me relever votre véritable identité ? Amitiés, Sylvie

Patrick Swayze

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Il y a 2 ans

C'est l'ascenseur émotionnel cette histoire ! J'adore !

Karen Kazcook

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Il y a 2 ans

Je le demandais comment tu allais le faire disparaitre... Mais ça se trouve c'est pas encore le moment et tu joues avec mes nerfs lol. Vite la suite !

Monica Bellucci

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Il y a 2 ans

Pascal is dead in the second chapter... I'm very sad for him and his family.

Hélène77

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Il y a 2 ans

Waouuuuu J'ai du mal a respirer tellement je suis sous le choc ....

Brad Pitt

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Il y a 2 ans

Bradley, qu'est-ce que tu attends pour liker ???

Mage

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Il y a 2 ans

Je suis encore sous le choc... Complètement bouleversé par ce chapitre... Mais ça y est j'ai liké !!

Bradley Cooper

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Il y a 2 ans

C'est fait !!! I live this book!!!
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