Fyctia
XXI : Rapprochement
Au bout d'une heure, je décide qu'il est temps de faire une pause. Je prépare un café à Roméo et sors les tartelettes du réfrigérateur. Ensuite, je m'installe à ses côtés et nous discutons d'autre chose que des cours :
- Tu t'es remise de notre soirée ? demande-t-il sérieusement.
- Oui, je vais beaucoup mieux, c'était flippant mais ça va maintenant. Et toi ? Tu as toujours mal ?
- Non, ça va aussi, mais j'aimerais bien que tu me promettes d'arrêter de faire ça.
- De faire quoi ?
- Partir, seule, la nuit, y'a rien de plus dangereux, surtout pour une femme. C'est malheureux mais les risques sont trop gros, tu ne peux pas faire ça à chaque fois.
- Je sais, je suis désolée.
- Ne t'excuse pas, contente-toi de ne plus le refaire, ok ?
- Oui.
Tendrement, il me prend dans ses bras, je lui rends son câlin, il me sert si fort que j'en ai presque mal au dos, mais je comprends rapidement que cette étreinte a pour unique but de me montrer à quel point il tient à moi.
Après quelques secondes, il me relâche et se tient face à moi, me regardant dans les yeux. Je ne suis pas à l'aise avec le regard des autres. De manière générale, je peux tenir trois secondes au jeu du regard, pas plus. Ensuite, je me sens terriblement gênée et mes yeux dérivent vers un autre point :
- Pourquoi tu as arrêté de me regarder ?
- Je sais pas trop, ça me gêne un peu.
- C'est quoi qui te gêne exactement ? Que je te regarde ? Ou que tu me regardes ?
- Les deux, je crois.
- Comment ça se fait ?
- Tu sais, je me trouve pas particulièrement jolie. Quand quelqu'un me regarde, j'ai souvent l'impression que c'est pour me juger ou se moquer de moi, je n'arrive pas à imaginer une seule seconde qu'on puisse me trouver attirante.
- T'insinues que j'ai de mauvais goûts ? demande-t-il en riant.
Je ris également :
- Non, pas du tout, c'est juste que, enfin, voilà...
Je ne sais plus comment me justifier mais je n'en ai pas le temps puisque Roméo attrape mon visage et le rapproche du sien. En une seconde, nos lèvres se retrouvent collées l'une à l'autre et très vite, nous nous prenons tous les deux au jeu.
Je lui rends son baiser avec passion. Cette fois c'est certain, notre relation est sur le point d'éclore.
Après notre baiser, je ne sais plus où me mettre. Roméo me regarde et de mon côté, je fixe le sol. Je triture nerveusement mes doigts, je ne sais pas quoi dire ni quoi penser, où aller ni quoi faire. De son côté, Roméo est silencieux, je sens son regard sur moi et je sais qu'il me fixe avec insistance. Peut-être qu'il attend quelque chose de ma part mais je n'arrive pas à savoir quoi.
Finalement, il brise le silence :
- Est-ce que ça va ? me demande-t-il timidement.
Doucement, je relève la tête et m'oblige à le regarder dans les yeux :
- Oui, très bien, réponds-je à demi-voix.
- T'es sûre ? T'as l'air un peu triste, j'ai fait quelque chose de mal ? J'ai cru que toi aussi tu voulais... Enfin, je pensais que...
Je constate que Roméo commence à paniquer, il a la sensation de m'avoir obligé à avoir ce baiser et je ne me vois pas le laisser s'imaginer une telle chose :
- T'en fais surtout pas, je suis juste un peu sonnée, ça me fait bizarre de t'embrasser, je pensais pas que c'est ce que tu voulais.
- C'est-à-dire ?
- J'ai du mal à accepter que je puisse te plaire, j'arrive pas à y croire.
- Pourquoi ?
- Tu peux avoir toutes les filles que tu veux, tu es gentil, beau, bienveillant, intelligent, tu as toutes les qualités pour faire chavirer le cœur de n'importe qui, je ne comprends pas que tu te rabattes sur un laideron comme moi, c'est impensable.
Le visage de Roméo se ferme, ai-je dit quelque chose de mal ? Il détourne son regard de mon visage et fixe le sol quelques instants avant de répondre :
- J'aime vraiment pas que tu parles de toi comme ça. Je te trouve magnifique, tu me plais depuis le premier jour, c'est comme ça. Ton visage me plaît, ton corps aussi, ton sourire, tes mimiques, tout chez toi me plaît.
Je ne sais pas quoi répondre, sa déclaration est touchante mais une petite voix dans ma tête me crie qu'elle n'est pas honnête. Cette voix qui passe son temps à me pourrir la vie, qui m'empêche d'avancer, de faire confiance et de vivre pleinement mes relations.
Désemparée, je le regarde, les larmes aux yeux :
- Je suis tellement désolée, je m'attendais pas à ce que tu m'embrasses. Je voulais t'embrasser, bien sûr, mais dans ma tête c'était comme un rêve inaccessible, une partie de moi voulait se persuader que tu me voulais simplement comme amie.
- C'est pas le cas, je pensais le montrer assez clairement, j'aurais probablement dû être plus démonstratif.
Je culpabilise à l'idée qu'il puisse s'en vouloir. Je suis seule fautive dans cette histoire, j'ai mis mes œillères habituelles et ai fait comme si je ne voyais rien, j'ai voulu me persuader que nous étions simplement amis alors que n'importe quelle autre fille à ma place aurait constaté depuis le début cette attraction mutuelle.
Nerveusement, je pose une main sur la jambe droite de Roméo. Ce dernier relève la tête pour me fixer à nouveau. Son regard est plus sombre, son visage fermé, il semble triste et bouleversé.
Soudainement, je réalise que je n'ai pas envie de le perdre, je ne veux pas passer à côté d'une belle histoire simplement parce que je crains de ne pas être à la hauteur.
Timidement, j'approche mon visage du sien et dépose un tendre baiser sur ses lèvres. Il me répond par un sourire apaisé :
- Alors tout va bien ? me demande-t-il.
- Oui, tout va bien.
Je n'ose pas lui demander ce que nous sommes l'un pour l'autre. Je ne lui ai pas encore fait part de mes sentiments. De son côté, même s'il m'a clairement montré son attirance, il ne l'a pas verbalisée pour autant. Malgré ces deux baisers, notre relation n'a pas de mot.
Suis-je en couple ?
4 commentaires
Carl K. Lawson
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Il y a un an
Leonie Lonval
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Il y a un an
KBrusop
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Il y a un an
Léonie Césarine
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Il y a un an