Fyctia
Chapitre 3
Non mais je rêve ! Je fouille dans le reste du linge au fond du sac, je vérifie ce qui est déjà étendu et... Je peste, me remémore la succession de mes actions, vérifie encore puis jette le sac à mes pieds. Je suis pourtant certaine d'avoir tout mis à laver ! J'enrage ! Je comprends mieux désormais le soi-disant bug de la machine ! Quelqu'un a volontairement arrêté le cycle en plein lavage pour me piquer mes soutien-gorges et strings en dentelle. Plus aucun sous-vêtement ! Même les basiques culottes en coton ont disparu ! Je me sens... Je me sens... Je ne sais pas exactement comment je me sens parce que je suis trop en colère pour le moment ! Puis je réprime un haut-le-coeur quand je percute. Il ne s'agit pas d'un banal vol, de quelqu'un dans le besoin qui se serait servi dans mes affaires pour les utiliser à son tour, comme il l'aurait fait d'un vélo. Non, ceci est l'oeuvre d'un pervers. Zieuter les sites porno ou acheter de la lingerie jamais utilisée ne devait pas être suffisant, il lui fallait du porté, imprégné d'essence de femme. Attendez une minute... De n'importe quelle femme ou de moi précisément ? Quelle horreur ! Je suis de plus en plus mortifiée. Impossible de ne pas faire le parallèle avec le sentiment d'être observée et suivie qui m'a envahie la veille. Cependant, que puis-je faire ? Porter plainte ? Je n'ai rien de précis, rien de concret, qu'un vague malaise et la disparition de mes sous-vêtements qui aurait pu tomber sur n'importe qui. Peut-être n'est-ce qu'un hasard, un coup de pas-de-bol. Imaginer que je ne suis pas personnellement visée me frustre et m'apaise également.
Je réussis à me calmer un peu et reprends mon étendage en vérifiant, par acquis de conscience, l'état de propreté de mes vêtements. Après tout, le linge n'avait pas été rincé, avait-il eu le temps d'être lavé ? Je décide que ça fera l'affaire et reprends le cours de ma journée aussi sereinement qu'il m'est possible de le faire étant donné les circonstances.
C'est la tête ailleurs que je me rends chez Soline, ma meilleure amie, avec tous les ingrédients nécessaires à notre préparation culinaire pour la soirée à venir. Nous sommes un groupe de six potes à nous voir régulièrement. Une fois par mois, on organise un vrai dîner, pas juste le banal apéro dînatoire. Ça change de nos classiques sorties en boite de night ou dans un bar à faire une (douze) partie de billard. Et pour rendre ça fun, on effectue des tirages au sort pour former des duos et définir qui fera quoi. Aujourd'hui, je suis avec mon binôme favori (mêmes goûts, même façon de faire) et on a en charge la préparation du dessert. Ce qui est parfait parce qu'en tant que bec sucré, j'ai un tas de recettes en stock. Le plus dur étant de choisir, vu qu'on ne sait pas ce que les autres nous réservent... On s'est déjà retrouvés à ne pas pouvoir finir le dessert tellement l'entrée et le plat avaient été copieux, et inversement, à devoir ouvrir quelques paquets de biscuits pour compléter quand le dîner avait été trop light ou trop raté. On est pas tous des cordons-bleus dans le groupe alors quand deux bras-cassés se retrouvent en duo et doivent gérer le plat de résistance, ça pique un peu.
Je suis à la porte de son bâtiment, m'apprêtant à entrer le digicode, quand mon smartphone se manifeste dans mon sac à main. J'attrape l'appareil des fois que ce soit important mais, pressée d'entrer et de me décharger de mes courses, je ne prends pas le temps de vérifier l'identité de l'appelant avant de répondre. Personne au bout du fil pendant dix secondes puis ça raccroche. Surement un faux numéro. Je ne me formalise pas plus que ça, même si c'est impoli. Je range mon téléphone et n'y pense plus.
Notre gâteau au chocolat sent divinement bon. Il me met l'eau à la bouche et semble réussi bien que notre attention ait été, disons, aléatoire. Pendant la préparation, j'ai raconté mes mésaventures à Soline, ce qui nous a fait perdre le fil de la recette à plusieurs reprises. Au final, on a dû mettre un oeuf de trop et oublié le sachet de sucre vanillé, mais visuellement et olfactivement, il tient la route ! J'espère que le goût sera à la hauteur du reste, sinon, les autres n'ont pas fini de se foutre de nous. Si les deux plus gourmandes du groupe ne sont pas foutues de préparer un gâteau, où va-t-on ? Nous nous installons sur le canapé pour discuter le temps de le laisser refroidir avant de pouvoir l'emporter chez Stéphane, qui nous reçoit tous ce soir. A peine posées, mon téléphone vibre une nouvelle fois. Là encore, je décroche et, là encore, un silence pesant me répond. Je mets fin à la non communication et reste bête quelques secondes à regarder l'appareil que je garde en main. Soline lève un sourcil interrogateur, son verre de jus de fruits en suspend devant ses lèvres. Nous avons décidé de ne pas commencer l'apéro avant l'heure, j'ai pourtant l'impression de ressentir les premiers effet d'un alcool que je n'ai pas encore consommé : j'ai un coup de chaud, tout à coup ! Comme un mauvais pressentiment, aussi. Ma BFF (Best Friend Forever) me change bien vite les idées et, à l'heure prévue, nous nous mettons en route, direction chez Stéphane.
La soirée se termine un peu après 1h du matin. Je suis soulagée que Mathieu me raccompagne en voiture avant de rentrer dans sa banlieue. Mon téléphone s'est rappelé à moi un nombre incalculable de fois et je n'ai jamais eu personne au bout du fil, si bien que j'ai fini par l'éteindre. Je m'engouffre dans le hall de mon appartement avant même que Math n'est eu le temps de redémarrer. Je gagne mon studio, ferme la porte à clé derrière moi et enclenche le verrou, chose que je fais rarement. Certaine d'être en sécurité, je m'adosse à la porte et lâche un long soupir avant d’ôter mes chaussures et mon manteau. Je commence tout juste à me détendre quand mon smartphone me fait sursauter. Je l'avais rallumé dans la voiture, un peu soulagée de ne trouver aucun message, aucune notification indiquant qu'on avait cherché à me joindre. Le palpitant prêt à sortir de la poitrine, je choppe l'appareil et y jette un œil, pleine d'espoir. Évidemment, à près de 2h du matin, dans la nuit du samedi au dimanche, ça ne risquait pas d'être ma mère. Je prends mon courage à deux mains et fais glisser l'icone verte sur le côté. Réalisant que rien ne peut m'arriver par téléphone, à part peut-être me faire insulter, je lance un « Allô » plein d'assurance et de défi, seulement, au bout du fil, ce n'est ni une connaissance, ni un simple silence.
28 commentaires
Sonyawriter
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Il y a 4 ans
Angèle G. Melko (ColibriJaune)
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Il y a 4 ans
Ashley Moon
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Il y a 4 ans
Angèle G. Melko (ColibriJaune)
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Il y a 4 ans
cedemro
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Il y a 4 ans
Samara Alves
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Angèle G. Melko (ColibriJaune)
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Il y a 4 ans
FleurDelatour
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Il y a 4 ans
Angèle G. Melko (ColibriJaune)
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Il y a 4 ans
Suji.P
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Il y a 4 ans