Fyctia

Erssie était plus détendue; elle avait l’impression de s’être fait une amie; la présence de Nathalie est rassurante, et même reposante. Elle se sens a présent en confiance, et petit à petit se livre à cette femme, qu’elle connais a peine:

-Pourquoi es-tu dans cet avion? demanda Nathalie. les études?

-J’aurais voulu que ce ne soit que ça, elle soupire. Mais non, non… je viens d’être diplômée de mon BTS en commerce et.. j’ai fui ma famille.

un moment de silence suivit des paroles, avant que Nathalie ne reprenne:

-Tu..Tu as fui ? Sont-ils au courant?

Erssie hoche la tête.

-Bien sûr! Ils n’en n’ont juste rien à faire, et c’est tant mieux, j’ai envie de dire.

D’un air désolé, qu’elle transforma en une certaine admiration, Nathalie complimenta Erssie sur son courage, car selon elle, il en faut beaucoup pour prendre une telle décision si jeune. Celle ci balaya ses compliments d’un sourire gêné, argumentant que ce n’était pas si extraordinaire que cela.

-Je devais le faire, ajouta t-elle. Je n'avais pas le choix. C'est aussi pour qu'il ne sois plus seul, tu vois?

-Il? Qui es donc ce "il"? demanda Nathalie, qui avait déjà une petite idée en tête.

Erssie alluma son portable, un iPhone 12 tout neuf, et montra son fond d'écran à sa nouvelle amie: il s'agissais d'un beau jeune homme, avec de longs cheveux noir de jais, un regard profond et une peau matte. Il semblait être indien, si l'on en jugeais par sa tenue traditionnelle. Ses vêtements, et les tâches de poudre de couleur dont étaient recouverts ses cheveux et sa peau, suggéraient que la photo avait été prise le jour de la fête des couleurs, le Dipavali.

-C'est ton petit ami? demanda Nathalie. Il est vraiment très beau!

Erssie rougit:

-Oh, Nathalie! C'est plus que mon petit ami. Il s’appelle Panayotis.

Ce garçon est ma raison de vivre. C'est pour lui que je prends l'avion ce soir, tu sais!

Nathalie hocha la tête:

-Tu dois beaucoup l’aimer, alors! Que fait-il de beau, en Métropole?

Erssie expliqua:

-Il es parti il y a cinq mois, il est en école d'ingénieur à Toulouse. Il ne sais pas que je viens, par contre… J'aimerais le surprendre, tu vois? Lui prouver que je suis capable de tout, pour qu’on ai notre vie à deux!

Elle releva sa manche, pour montrer le bracelet brésilien bleu attaché à son maigre poignet:

-On a le même! je le lui ai offert avant qu'il parte de la Réunion, expliqua t-elle.

Nathalie affichait maintenant perplexe:

-Le.. surprendre?

-Oui! s'exclama Erssie, aussi fort que sa voix le lui permettait. Je sais où il habite! Ok, c'est un peu creepy dit comme ça, rigola t-elle. On s’envoie beaucoup de lettres par la Poste, c'est pour ça que je connais son adresse; et puis, c'est mon copain, donc je trouve ça normal. Ces derniers jours, on a plus du tout communiqué ensemble; ma mère a cassé mon téléphone, ça doit faire un mois ou un mois et demi qu'on s'est pas parlés car elle a aussi vendu mon ordi…

-Pourquoi ta mère a t-elle fait une chose pareille?

Erssie hocha les épaules :

-Je ne sais pas, des fois, il n’y a pas de raisons…

Un court silence suivit ces paroles, avant que Nathalie ne demande doucement:

-N'as tu pas pu envoyer de lettres à ton petit ami?

-Non.. Il.. enfin.. il... Il y a eu un gros malentendu entre nos deux familles et.. il ne me parle plus car il a été dit que je voulais le quitter... C'est faux! Je n'aime que lui... je n'avais pas de téléphone et d'ordi pour démentir ce qui a été dit, et quand aux lettres que j'ai envoyées...

Erssie soupira, et tristement, sortit de son sac un paquet assez conséquent d'enveloppes brunes, toutes tamponnées de la mention "retour a l'expéditeur". Nathalie les prit entre ses mains.

-Tu en as écrit beaucoup, fit- elle remarquer, avant de lire le nom du destinataire:

-Pa..Panayotis.. Kanda...Kadama...

Erssie se mit a rire:

-Kandassamy! Panayotis Kandassamy! Si on a bien un point en commun, c'est l'originalité de nos prénoms, a tout les deux.

Tristement, elle prit une des enveloppes.

-Il n'y a pas que des lettres, dedans: je mets aussi des petits cadeaux fait main, des photos ou des stickers, des pins ou des porte clés que je fais moi même. Mais il ne les a même pas reçues, j'ai peur de comment il va réagir en me voyant… Mais c'est la seule manière que j'ai trouvé pour lui prouver que tout ce que nos familles ont dit a mon sujet est complètement faux, que je l’aime, et que je donnerais ma vie si ça pouvait prouver quelque chose... J'ai même eu mon permis il y a trois jours, et il ne sais rien!

-Et tu prends l'avion ce soir, pour aller le retrouver et lui dire? s'étonna Nathalie.

-Non, non! j'y vais pour vivre avec lui! j'ai économisé assez d'argent, et j'ai un contact en France qui m'as trouvé un poste dans une boutique de savons artisanaux.

Nathalie reprit un air admiratif:

-Je suis sûre qu'il sera content de te voir!

- J'adore l'artisanat, explique Erssie. et j'ai su me débrouiller pour tout planifier avant de partir. Pany n'aura pas à trop s'occuper de moi, je sais qu'il est très occupé déjà, avec ses études.

-tu as l’air d’une jeune femme très débrouillarde, commenta avec enthousiasme Nathalie. je suis sûre que ça va aller, et pour le mieux!

Erssie sourit aux paroles de sa nouvelle amie. Oui, ça ira pour le mieux, et ça sera toujours mieux que ce qu’elle a connu sur son île, son île qu’elle aime tant.

-Tu as raison, Nathalie. Il faut parfois dire au revoir à son monde d’avant, pour découvrir le nouveau… et mon monde à moi, c’est Panayotis…