Fyctia
… POUR MIEUX SAUTER
Huit mois, cinq jours et vingt heures qu’ Il était entré dans ma vie par une belle journée de mai. Enfermée dans une camisole dont j’étais la seule à détenir les clefs, le temps était venu de me libérer.
Je ne pouvais pas le faire plus tôt. J’avais d’abord un combat à mener. Contre Lui. Contre moi. Mais le gong avait retenti et l’heure du dernier round avait sonné.
— Allo, Maman. C’est moi.
— Oh ma chérie. Comment tu vas ?
— Bien, bien. J’ai rendez-vous chez le médecin ce matin.
À mon annonce. Il y a un blanc. Je savais que ma mère avait en horreur mes rendez-vous médicaux. Ils étaient pourtant vitaux.
— C’est encore à cause de Lui ?
— Maman…
J’ai tenté de la rassurer. Il ne m’avait pas frappé au ventre depuis plusieurs semaines. Mes cheveux commençaient à repousser et notre ménage n’était plus aussi étouffant. Mon tortionnaire me laissait reprendre mon souffle, plus souvent.
— D’accord ma chérie, je te crois. Mais tiens-moi au courant.
J’ai raccroché, un sourire aux lèvres.
Ma toute petite maman, je t’en ai fait baver ces derniers mois, mais c’est bientôt terminé. Il va sortir de nos vies.
Direction la salle de bain. J’ai redessiné mes sourcils avec un crayon brun, appliqué une ombre rose sur mes paupières et mis un peu de gloss irisé sur mes lèvres. J’ai caressé mon crâne avant d’y ajuster un foulard coloré.
En me dirigeant vers la porte de l’appartement, je me suis arrêtée devant le miroir du couloir pour m’assurer que tout était juste et parfait, mais en lieu et place de mon reflet, c’était Lui qui m’observait. Son regard noir m’a aspiré et pendant un instant, il m’a emporté dans son néant.
Coincée dans une tornade grise, j’ai croisé mes souvenirs. Notre rencontre, le premier coup qu’il m’a porté, mes cheveux arrachés... Je tournoyais sans pouvoir m’arrêter quand, de cet enfer, a émergé une main. Je l’ai agrippée et j’ai repris pied. Retour à la réalité. J’ai un rendez-vous à honorer.
Au moment où je suis sortie de chez moi, j’ai cueilli une larme du bout du doigt.
Sur le trajet, mes pensées se sont envolées jusqu’ à ce jour de mai où nous nous étions rencontrés.
— Adénocarcinome.
C’est comme ça que le Doc Gyneco l’avait appelé.
Pour moi, c’était LUI. J’aurais pu l’affubler d’un petit nom, Crabus, Crabe ou même Bernard puisqu’il avait fait de mon corps sa coquille, mais je ne voulais pas lui donner une identité pendant qu’Il me volait la mienne.
Après une opération et des mois de traitement, il était temps de faire le point avec mon médecin.
— Alors, que donne la dernière IRM ?
Je tremblais à l’idée qu’Il ait été plus fort que l’armée de chimiothérapie qui avait accompagné ma chevauchée de walkyrie.
Derrière ses petites lunettes rondes, le praticien a souri.
— Il n’y a plus rien. Plus de tumeur. C’est terminé. Enfin presque.
— Presque ?
— Vous allez partir pour cinq ans d’hormonothérapie. C’est le traitement... standard… bouffées de chaleur...peau sèche
Je ne l’entendais plus que de loin. Je peinais à réaliser. C’est terminé.
Après un peu plus de huit mois, huit rounds, je venais de Le cueillir d’un uppercut à la pointe du menton. IL était au tapis. L’arbitre pouvait commencer le décompte.
Un… Deux… Trois...
8 commentaires
Azilizaa
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Il y a 4 ans
havez
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Il y a 4 ans
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cedemro
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Il y a 4 ans
Philippe Brient
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Sonyawriter
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Il y a 4 ans
OPHELIE
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Il y a 4 ans
Sonyawriter
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Il y a 4 ans