Fyctia
Chapitre 26 🌜💞🤫⌛️
— Élisa… tu es inespérée pour notre communauté, me confie-t-il, sincère. Cependant, sans indiscrétion, pourquoi accepter de remplacer un petit médecin de campagne ?
Lui parler de Louis ? Je n'en ai pas forcément envie.
— Alors déjà, pour être honnête avec toi, j'ai été plutôt surprise d'arriver à Châtelet-plage… Ce n'était pas ce que je m'imaginais.
— Marion m'a dit, oui… plaisante-t-il. C'est pas Le Touquet ici !
Je défie le regard profond de Simon et mon cœur s'arrête l'espace d'un court instant. Le clair de lune plus intense ce soir rend sa beauté d'autant plus renversante. Le vent s'amuse avec ses cheveux mi-longs et ce dernier ne cesse d'essayer de les remettre en place de sa main droite. Quelque chose de sexy émane de sa personne et je tombe sous le charme, malgré moi.
— Tout le monde a entendu l'histoire de la naissance du veau de Robert… s'amuse-t-il. C'est épique !
— Robert et Jeanne-Marie sont des amours. Ils forment un couple extra.
— Je te l'ai dit… Les gens à Châtelet ont tous un petit truc unique. Et si tu es arrivée ici, c'est que tu possèdes aussi ce petit truc !
Ses yeux dévient vers le lointain. Simon n'est pas du genre à tourner autour du pot et n'est pas avare en compliments. Compliments dont la sincérité ne peut être remise en question.
— Merci Simon…
— Je t'en prie… Mais… tu n'as pas répondu à ma question initiale !
— C'est juste que…
— Tu as voulu t'éloigner de quelqu'un ?
— J'ai un… un ex… et il fallait que je mette un peu de distance entre nous pour notre bien à tous les deux.
— C'est souvent le cas avec les ex…
Simon perd tout à coup de sa luminosité intérieure comme si mon aveu le dérangeait, je ne saurais vraiment dire. Il embraye aussitôt sur un autre sujet.
— Parle-moi un peu plus de toi. Je suppose que la médecine occupe une grande partie de ta vie. Tu as tout de même le temps pour faire des activités ?
Je souris. Partager ma passion avec autrui est une de mes plus grandes fiertés. Et souvent, les actes sont plus éloquents que les belles paroles, j’ose une petite démonstration. Je me lève du banc et sors mon téléphone de ma poche. Je lance ma playlist en mode aléatoire et tombe sur une irlandaise : Pot of Gold.
Debout face à lui, mes premiers pas sont hasardeux, l’instabilité du sol n’aidant pas. Concentrée, je persévère même si la tâche est ardue. Mes pieds s'emmêlent et je manque de trébucher. J'ignore par quel miracle mais je parviens à me rattraper juste avant de me retrouver les quatre fers en l'air. Je galère.
— Je suis ridicule ! me moqué-je soudain.
— Absolument pas…
Une idée surgit de mon esprit. Mes bras dans sa direction, j'invite Simon à venir me rejoindre. Son sourire se transforme en une grimace de dégoût.
— C’est quoi cette tête ? Allez, lève-toi. Suis mes pas.
— Non, non, sans façon, répond-il en s'accrochant aux lames de bois. Je préfère rester assis et te regarder.
— T’as peur de quoi ?
— La dernière fois que j’ai dansé, c’était à la kermesse en CM2. Je n’avais pas le choix mais c’était une torture pour moi. T’imagines même pas ! Tu vas rire…
— Non, promis. Je t’écoute, dis-je en me pinçant les lèvres.
— Je me suis mélangé les pinceaux, j’étais perdu dans la chorégraphie. Au milieu de la danse, tous mes camarades de classe sont partis d’un côté et moi, je suis resté planté là. Je me rappelle d’une chose : les rires du public. J’ai vu la honte dans le regard de mes parents. Le pire dans tout ça, c’est que personne n’a pu relever le niveau de la famille après moi. Je suis fils unique.
Je comprends son ressenti. De telles péripéties ne permettent pas de prendre confiance en soi. Selon l’adage, quand on tombe de cheval, il faut remonter en selle immédiatement. Proverbe qu’il n’a pas suivi à la lettre. Je vais m’atteler à le faire sortir de sa zone de confort afin qu’il puisse apprécier les choses simples de la vie.
— Ça fait des lustres Simon. On va y aller doucement, insisté-je en réitérant ma proposition.
Simon refuse de nouveau. Je décide alors de le titiller un peu.
— Les chiens ne font pas des chats ! J’en ai la preuve là.
Silencieux, il finit par se mettre debout et se place à mes côtés. Surprise mais heureuse qu’il accepte, je tente de le détendre.
— Ah enfin ! Tu vas être mon cobaye à défaut d’être un cow-boy, ris-je de ma bêtise.
— Non je peux pas, se dégonfle-t-il aussitôt. Vraiment. Et puis je suis maire.
— Et alors ? T’es maire oui. Un maire n’a pas le droit de danser ? T’es barman aussi. Alors oublie ta casquette de maire. Arrête de te poser des tas de questions. Je croyais que tu voulais profiter de l’instant présent. T’es prêt ?
— Non… enfin oui. Je te préviens, j’ai pas le rythme dans la peau.
— On s’en fiche. On va faire celle que j’ai apprise à Marion le soir de la fuite de gaz.
— Ah oui, quand tu étais déguisée en lapin de Pâques ?!
— C’était pas un déguisement mais un pyjama. Hyper douillet en plus. Allez, talon gauche, pose, deux fois, talon gauche, pose, talon gauche, quart de tour, hitch.
Les derniers enchaînements posent problème à Simon. Alors, on recommence. Après quelques tentatives, Simon se moque de ses propres prouesses. Le voyant rire, je l’imite.
— Tu vois, je ne suis pas doué.
Il se rassied sur le banc, pose une main sur celui-ci pour que j’en fasse de même. Je m’exécute.
— Ça ne te manque pas depuis que tu es à Châtelet ?
— Oh si. Mais c'est comme ça. Je savais qu'en venant ici, je devrais renoncer pendant quelques semaines à ma passion. J'ai essayé de m'entraîner mais ce n'est pas pareil. Tu l'as bien vu à l'instant.
Mon corps se refroidit rapidement. Je frissonne. Simon le remarque et sort de son sac à dos un plaid qu'il pose avec délicatesse sur mes épaules. Il a vraiment pensé à tout ce soir.
— Il se fait tard. Je te propose de rentrer si tu veux.
Nous nous levons simultanément et empruntons le chemin balisé. Faiblement éclairé par la lune, celui-ci reste dangereux. Il me tend donc son bras auquel je m’accroche.
— Si le cœur t’en dit, on organise de temps à autre des lotos et des tournois de belote. Tu pourrais revoir quelques-uns de tes patients dans d’autres circonstances. L’ambiance est conviviale.
— Mais pas des cours de danse, affirmé-je, dépitée.
— Le budget de la mairie ne me permet pas de recruter quelqu’un pour donner des cours. Et je ne serai pas prof de danse, non plus, je te vois venir. J'ai mis en place à mon arrivée pas mal de choses qui ne demandent aucune contrepartie financière. Nous avons uniquement besoin de la salle des fêtes.
Jusque-là hors de notre champ de vision, les lampadaires du village se rapprochent de plus en plus. Nous sommes à une centaine de mètres de notre point d’arrivée. Cette magnifique soirée se termine et je ne suis pas prête. Je ralentis le pas comme pour retarder l’échéance.
— Sinon… que penses-tu de Châtelet ? Tu t'y plais maintenant ?
Seulement à cette dernière interrogation, je crois bien n'avoir aucune réponse à lui apporter. En tout cas, aucune qui, pour l'instant, irait dans son sens.
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Patricia Eckert Eschenbrenner
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Il y a 2 ans
Maddy Son
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Rose Foxx
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mariecolley
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clecle
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Maddy Son
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