Fyctia
Chapitre 5-1
Gabriel
Le délai est écoulé. Le Prince n’a pas daigné regarder les vidéos envoyées, laissant à Thomas le soin de faire le tri des potentielles candidates.
Assis à son bureau, il observe les photos de son enfance, placardées sur le mur, tel un mémorial à ses années d’insouciance. Il contemple le visage rond de sa mère, dépourvu de rides à cette époque-là, ses joues étaient pleines, ses boucles retombaient en cascade sur ses épaules. Catherine était en déplacement en Afrique, accompagné de son époux et de ces deux jeunes fils. Sur ce cliché, elle était aux cotés d’une femme noire, la guide touristique, qui par la suite devint une amie. Les yeux mauresques de Xochi, abritaient une profonde tristesse, son nez était épaté, sa bouche généreuse et ses dents, d’une éclatante blancheur. Le Prince se rappelle lui avoir demandé quel était son secret, ce à quoi, elle avait bien ri.
Sur une autre photo, ils prenaient tous une pose solennelle pour les journalistes, lors de l’inauguration du terrain de golf à St Andrews. Son père, le Roi Georges, ne souriait jamais sur les clichés, comme s’il y avait quelque chose de sacré à être figé pour des années sur un morceau de papier glacé. Les yeux de Gabriel parcourent toutes les images. Chacune d’entre elles témoignage de l’état de santé de son père qui déclinait. Les années ne l’avaient pas épargné. Il avait dû affronter les répercutions de l’assassinat de 10 habitants dans une de ces villes, à Yvertale. Le meurtrier était un homme sans histoire, mais il avait perdu son travail et par la même, l’espoir de vivre. Dans un élan de désespoir, après avoir supplié de multiples entreprises de l’embaucher, il a ouvert le feu en plein jour, avant de se donner la mort. L’affaire avait fait grand bruit à Calbert, puisqu’une source avait divulgué que ce dernier avait écrit au Roi en personne, pour lui demander son aide. Une lettre à laquelle Georges avait répondu qu’il étudierait le dossier, avant de le mettre aux rangs des oubliettes, faute de temps. Une lettre qui avait laissé un goût amer dans la bouche du Roi. Une lettre pour laquelle il avait dû s’expliquer aux médias et son image avait pris un sale coup ! Dès lors, c’est au prix de sa santé qu’il avait encaissé les fresques de cette affaire. Il ne dormait que très peu, étudiant chaque dossier avec minutie, mangeait moins et stressait davantage. C’est âgé de 51 ans, un an après le mariage de Gabriel avec Megan, que le Roi George mourut d’un infarctus.
Aujourd’hui le Prince repense à son père, ce Roi. Il aimait son peuple et lui était dévoué. Sa mère était témoin de toutes les missions qu’il a pues accomplir, tous les moments de famille qu’il a dus sacrifier pour des causes bien plus grandes que lui. C’était un homme noble et loyal en dépit de ses erreurs.
Gabriel espère de tout coeur être à la hauteur de sa tâche, comme l’a été son père. Son regard se visse sur une autre photo. Sur celle-ci, Gabriel portait un béret et son uniforme lors de la Cérémonie militaire pour laquelle il a été gradé. Avec ses cheveux coupés si court, son air appliqué, il ressemble trait pour trait à son père.
— Gab ! interpelle Thomas à l’embrasure de la porte, on a besoin de toi pour valider les candidates afin d’annoncer à la presse que tu as fait ton choix.
— Ok, viens, dit-il, en désignant le fauteuil. Mais ne révèle pas de suite les prénoms aux médias, je préfère le faire après les avoir interviewées.
Il demande à Maria de leur emmener du thé et du café, il aura bien besoin de ce breuvage-là. Sa mère entre dans la pièce, un ordinateur dans les mains. Thomas, quant à lui, entre un large sourire collé sur ses lèvres et des photos plein les mains.
— Tu vas t’amuser frangin ! lance-t-il
— Je n’en doute pas, réplique-t-il, envoyant une balle de tennis sur le torse de son frère.
— Allons, allons, nous n’avons pas une minute à perdre. J’ai encore du pain sur la planche ! les reprend Catherine, comme s’ils avaient encore 14 ans.
— Voilà tes futures soupirantes…
À ces mots, Thomas étale les images sur la table basse, révélant une quantité non négligeable de femmes blondes, une poignée de brunes et cinq rousses.
— Ce sont celles qui nous ont paru les meilleures. Désires-tu visionner leurs vidéos pour être sûr ? Tu dois encore en éliminer quelques-unes, demande le cadet. Nous en avons 50 et nous arrivons à saturation.
— Pourquoi pas…
L’écran de son portable posé sur ses genoux, le café dans une main, Gabriel regarde avec ennui le visage des femmes défiler sous ses yeux. Pour la plupart d’entre elles, elles manquent de naturel, certaines sont trop maquillées, d’autres sont stressées par les caméras. Elles ne sont pas désagréables à regarder, loin de là, mais elles n’émettent chez lui aucune étincelle.
— Je pense que les femmes ont dû croire que tu aimais les blondes, s’écrie Tom. Un peu plus et elles se faisaient la même coupe de cheveux que Megan.
Il est vrai, qu’elles avaient toutes la même couleur de cheveux. Enfin, une rousse apparait à l’écran, une jolie frimousse, mais elle semble plus jeune que les autres candidates, à moins que le Prince ne se m’éprenne sur son âge.
« Bonjour, je suis Charlotte, j’aimerai inscrire ma soeur Ava, elle a 25 ans et est célibataire. Elle va me tuer, mais je sais qu’elle n’aura pas le courage de le faire. Voici sa photo…mais elle est plus belle en vraie. Votre Majesté, faite-moi confiance si je vous dis que c’est une fille en or. Elle est dévouée, loyale et quand elle était adolescente, elle avait des photos de vous partout sur les murs de sa chambre. Regardez ! »
La caméra zoome sur les images de lui. Il y a inscrit en contre-bas « you and I are meant to be… ». Le Prince ne peut s’empêcher de rigoler face à la témérité de cette Charlotte.
« J’espère que vous lui donnerez sa chance. Si c’est le cas, je vous en remercie d’avance. Si non, vous ne savez pas ce que vous perdez ! Euh…bon…eh bien je pense avoir fait le tout. Ah si, ma soeur adore lire. À bientôt. »
— Celle-là, je la garde, s’exprime le Prince, dommage qu’elle soit trop jeune cette Charlotte, je l’aime bien.
— On était sûrs que tu aimerais cette vidéo, c’est pourquoi on l’a gardée. Cette Ava, elle est plutôt jolie, non ?
— Il faudrait que je la vois en vraie, on la garde sous le coude.
Les vidéos défilent. Ce sont plus ou moins les mêmes discours, des femmes qui vantent leurs mérites et leurs qualités. Le Prince valide la candidature d’une rousse, une certaine Felicie, une française pétillante à l’accent plutôt sexy. Enfin, quand il est sur le point d’abandonner, une autre vidéo suscite son intérêt.
La caméra filme une jeune femme brune aux sourcils épais, le regard rempli de tristesse. Ce sont les mêmes yeux qui l’ont scruté ce matin-là à l’église. Elle est cette jeune femme éplorée à la basilique St Andrews. Il est allé prier et est tombé sur elle. Il a bien vu qu’il l’a effrayé à l’épier ainsi, aussi, il l’a suivi discrètement avant de lui payer son repas, une façon à lui de contribuer à améliorer son monde.
2 commentaires
Djeems Gufflet
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Il y a 7 ans
NC
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Il y a 7 ans