Fyctia
Chapitre 4-2
Au bord du désespoir, je me dis que je n’ai rien à perdre. C’est ironique quand même, c’est toujours dans les pires moments qu’on décide de venir chercher l’aide divine !
Je m’assois au fond de l’église et dans le silence des lieux, je laisse libre cours à mes pleurs. Je verse toutes les larmes contenues pendant bien des années. Je me sens submergée par un torrent d’émotions disparates, emportée par ma peur d’être rejetée, ma peur de ne pas y arriver. Je prends une claque en pleine figure, je réalise que je me fourvoie, je suis seule et je n’en peux plus de vivre ainsi. Désespérée, je me mets à genoux et murmure un « je t’en prie Seigneur, aide-moi ! ».
Quand je relève la tête, j’aperçois un homme assis sur le banc de la rangée à côté de la mienne, son visage, dissimulé sous une capuche. Visiblement, il a entendu mes pleurs, il me scrute par dessus son épaule, la main sur sa bouche. Ses yeux inquisiteurs me dérangent. Est-ce un fou ? L’église est vide, s’il décide de m’agresser une fois dehors, je n’ai aucune échappatoire. Il a les épaules voutées, mais je remarque qu’il est de grande taille. Assez trainer, je vais aller me chercher à manger, me dis-je. Quand je me lève, heureusement l’homme n’en fait pas autant.
Il est 12h30 quand je déguste, seule, mon sandwich dans une boulangerie à la vue imprenable sur le Palais dressé sur l’éperon rocheux. Même s’il n’est pas fameux, à cause de l’emplacement du restaurant, le prix du sandwich est exorbitant. Si maman m’avait accompagnée, elle aurait sûrement roulé des yeux et aurait tenté de négocier à la baisse notre repas. Je souris toute seule, rien qu’en imaginant la scène dans ma tête.
Devant moi, telle une carte postale, se dresse le château dont l’arrière plan sont les montagnes bleutées et enneigées. Tout semble placide, comme si le temps s’est figé là-bas. Je ne peux m’empêcher d’imaginer la vie de ses habitants. À quoi ressemble donc le quotidien de la famille royale ?
— Vous désirez autre chose miss ? me demande le vieux monsieur qui tient les lieux.
D’après mes souvenirs, c’est le même bonhomme de mon enfance, en plus âgé bien sûr ! Il est toujours aussi amical. Ses yeux enfoncés et rieurs, marqués par le temps écoulé, arborent une certaine tendresse non dissimulée.
— Ah le Palais ! C’est beau n’est-ce pas ?
— Oui, on se croirait être dans un film. Vous avez beaucoup de chance d’avoir ce paysage-là sous les yeux pour travailler.
— Eh oui mon petit ! Tenez, voici votre café.
— Mais…euh…je n’ai pas commandé de café.
— Je sais, mais votre repas est déjà réglé, mais l’homme a spécifié de vous offrir un café et même un dessert. Qu’est-ce qui vous ferez plaisir ?
— Waouh ! Mais quel homme ? demandé-je, regardant autour de moi à la recherche du mystérieux faiseur de bien.
— Il a dit vous avoir vu pleuré dans l’église et voulez égayer votre journée.
— Ok, merci.
Est-ce un de ces pervers qui m’attendent au coin de la rue pour abuser de ma naïveté ? J’ai tendance à être constamment sur mes gardes, mais j’en ai vu des vertes et des pas mûres au travail. Des gens de bonne apparence, sont en réalité des monstres déguisés en agneau. Ils vous appâtent avec une surprise, un poison bien enrobée dans un joli emballage ! Non merci !
— Pas de panique, c’est un habitué, quelqu’un de respectable, dit le vieillard comme s’il a lu en moi. Au fait, moi c’est Michel.
— Désolée, je suis un peu à cran. Dans ce cas, je prendrai bien votre tarte aux pommes.
— Excellent choix, je vous apporte ça de suite.
La petite salle exigüe se remplit de touristes. Le maître des lieux m’apporte mon dessert dans une jolie assiette blanche en porcelaine. L’horloge digitale affiche 13h30. La télévision s’allume et tous les regards sont à présent rivés sur le Prince régent, assis dans un salon.
La caméra est assez proche de lui, suffisamment pour qu’on note sa pomme d’Adam. Il a le regard vissé sur une vidéo de lui et de sa femme Megan. Tout ce qui émane de lui à cet instant est la tendresse, ses lèvres esquissent un sourire franc et ses yeux sont remplis d’amour.
— Prince Gabriel, voilà deux années qui se sont écoulées depuis la mort de votre femme, vous sentez vous prêt à avancer ?
Le Prince inspire profondément, réajuste sa position dans son siège avant de répondre. Moi, je suis là, comme toutes les autres touristes et habitants du coin, suspendue à ses lèvres, je suis curieuse. Que va-t-il répondre ?
— Eh bien, je me dois de continuer à avancer, même si je l’avoue ce n’est pas aisé de vivre sans Megan.
— Avez vous des projets de mariage en tête ? Des rumeurs courent quand à la teneur de votre relation avec Melle Montgory.
Ce prénom me dit quelque chose, bingo ! C’est la femme de l’hôtel, celle des fleurs et des chocolats noirs 80%. Elle était donc avec lui au téléphone quand je l’ai interrompu. Si ma mémoire ne me trompe pas, elle a dit « oui, je serai discrète. Dans ma suite comme au bon vieux temps ! ». Ah ah ! Ils ont donc une aventure…Sur ma chaise, je trépigne d’impatience et scrute le visage du beau Prince.
— Margot et moi sommes des amis de longues dates, il n’y a rien de plus entre nous.
Ouais, je ne suis pas convaincue, moi !
— J’ai en effet des projets de mariage, mais ce que j’ai à annoncer, est complètement aux antipodes des méthodes employées par ma famille dans le passé.
Le journaliste semble aussi surpris que nous le sommes ici dans la boulangerie. Des éclats de voix s’élèvent tandis que Michel calme les ardeurs de tous.
— Voilà, je suis à la recherche de ma future épouse et pour se faire, je lance un appel à candidatures. Toute femme célibataire ayant entre 25 ans et 30 ans, qui souhaite m’épouser, est prier d’envoyer sa candidature sous les 48 heures qui suivent, sous forme de vidéo, à l’adresse mail s’affichant ci-dessous. Passé ce délai, nous ne prenons pas en compte vos candidatures. Bien entendu, nous vous donnerons les résultats des 40 candidates qui auront l’honneur d’avoir un entretien avec moi.
— C’est pour le moins inattendue votre Majesté ! Ne pensez-vous pas que le délai soit trop court ?
— J’en ai conscience, mais je tenais à ce que les femmes soient le plus authentiques que possible.
Je suis sans voix. Mon corps s’est enfoncé dans la chaise, je pèse une tonne tout à coup.
— Que ferez-vous donc après avoir entendu les 40 candidates ?
— J’en choisirai 12 qui viendront au Palais pendant une période de allant de deux à trois mois, durant lesquelles j’apprendrai à les connaître. Bien entendu, il va de soit qu’elles seront dédommagées financièrement durant leur séjour, pour celles qui travaillent.
— C’est très généreux de votre part. Avez vous des critères spécifiques ?
Le Prince Gabriel est encore plus beau que dans mes souvenirs, vêtu de son pull bleu turquoise qui semble doux comme une plume. Il se pince les lèvres avant de répondre avec son sourire charmeur :
— Pas particulièrement !
Filmé de si près, je remarque à quel point ses mains sont grandes quand il se met à parler tout en se frottant le menton.
6 commentaires
Fanny, Marie Gufflet
-
Il y a 7 ans
Tamaya
-
Il y a 7 ans
Gufflet Pierre
-
Il y a 7 ans
Fanny, Marie Gufflet
-
Il y a 7 ans
Lena.payet.c
-
Il y a 7 ans
Fanny, Marie Gufflet
-
Il y a 7 ans