Fanny, Marie Gufflet LOVED Chapitre 2-3

Chapitre 2-3

Assise devant la piscine, enroulée dans ma veste, je savoure mes 30 minutes de pause. Le clapotis de l’eau me détend. Je déguste ma pomme, bois goulûment mon thé sans sucre, appréciant la quiétude de cet instant. Pas de client pour me déranger. Pas de gouvernante à mes trousses. Rien que moi et la nature qui se déploie sous mes yeux. Malgré le froid, je demeure ainsi à manger une banane à présent. Mon téléphone portable se met à sonner. Je ne prends pas la peine de décrocher, c’est mon manager du Blue Café. Sûrement pour me demander de remplacer quelqu’un ou d’arriver plus tôt. En tant que serveuse, femme de ménage ou vendeuse, on vit pour l’enseigne. Notre vie entière tourne autour de la boîte, on se doit d’être disponible à tout instant, selon les besoins de l’entreprise, c’est comme ça !

J’émets un grognement lorsque je vois un second appel, toujours le même. Ma messagerie prend la suite. Avant de terminer ma courte pause, je décide tout de même d’écouter le message.

— Ava…ce matin le patron a reçu un appel lui informant t’avoir vu sortir du café dimanche matin. Monsieur Johnson a donc visionné les caméras de surveillance et a découvert que vous aviez dormi dans les locaux et mangé dans le stock des denrées alimentaires. Je ne sais pas quelle est votre situation actuelle, mais vous auriez dû m’en parler, j’aurai pu négocier une avance sur salaire. J’ai tenté de vous défendre, mais j’en sais tellement peu sur vous. Le patron veut que vous lui rendiez ses clés et…malheureusement, il ne souhaite plus que vous bossiez pour lui. Je suis sincèrement navré. Euh…Bonne chance pour la suite. Je peux par ailleurs vous écrire une lettre de recommandation si vous en avez besoin.

Ma voix se brise. Je serre mon téléphone dans mes mains si fort que j’ai peur de le briser. J’ai perdu mon boulot au café. Comment vais-je faire ? Ce salaire, si maigre soit-il me permettait de payer le lycée de Charlotte, les frais de la maison. Mon seul travail ici ne sera guère suffisant. Je remonte les escaliers presqu’en titubant. Je suis fichue ! Il me faut une solution, un miracle. Maman est malade. Maman a besoin que je travaille pour payer les frais médicaux, je n’ai pas le choix. Maman…

Il y a 6 ans de cela, deux années après la tragique nuit, on a découvert qu’elle souffrait d’une sclérose en plaques. Impossible pour elle de continuer de bosser. La maladie s’est aggravée, elle a été forcée de rester à la maison, moi d’abandonner la faculté, je commençais le second trimestre de ma deuxième année de Licence en Littérature. J’avais 19 ans et bossais déjà en tant que vendeuse dans un magasin de vêtements.

Je pousse mon chariot vers la chambre suivante, le coeur démuni, les forces me manquent. Soudain le poids des responsabilités me tombent dessus, je suis seule, vraiment seule. Mes pensées sont tellement engluées par mes peurs que j’ai complètement oublié de lire la note pour le client-ci. Ce n’est que lorsque je m’attaque à la dernière chambre que ma gouvernante m’appelle furax. J’ai oublié de mettre les fleurs demandées dans la suite de Margot Montgorry. Je cours comme une dératée chercher le bouquet de roses, la boîte de chocolats 80 % et les huiles essentielles à la lavande. Je passe le pass et la porte s’ouvre sur la cliente, déroutée de me voir arrivée alors qu’elle est en grande discussion au téléphone.

— Je suis navrée madame, dis-je, je pensais que j’étais seule. Désirez-vous que je repasse ?

— Non, allez-y !

Elle m’ignore ensuite.

— Ce n’est personne Gaby, juste la femme de chambre !

Personne ! J’ai envie de l’étriper celle-là !

— Tu disais ? Ah oui ?! Mince ! Que comptes-tu faire ? Écoute passe me voir demain, je suis à l’hôtel Alabama, à LadyTown. On pourrait déjeuner ensemble, qu’en dis-tu ? reprend la riche Melle Montgorry.

— …

— Demain 12 h ? Parfait ! Oui, dans ma suite, ne t’inquiète pas pour ça, je serai être discrète, comme au bon vieux temps !

Je finis de poser les fleurs sur la table de salon et referme la porte derrière moi.

Plus qu’une chambre…une suite avant d’être libérée de ce supplice. Mon talkie-walkie se met de nouveau à vibrer. Décidément !

— Ava, la chambre de l’acteur, il y a un soucis avec les oreillers. Va voir !

— Bien madame !

Les minutes, voir les heures en plus, à courir vers des clients insatisfaits ne me sont jamais payées, évidement !

J’annonce ma présence cette fois-ci et entre dans la plus grande discrétion.

— Les oreillers sont en plume ! s’indigne-t-il, je suis allergique aux plumes ! Demain, on tourne, je ne peux pas me présenter avec le nez qui coule, vous comprenez ?

— Bien entendu monsieur, je vais faire le nécessaire, rassurez-vous.

Je défais le lit, retire les nombreux oreillers avant de retourner au sous-sol en trouver d’autres qui fassent l’affaire. Au bout d’un quart d’heure, je reviens avec ce qu’il faut, rassurant le client de la qualité des coussins. Il semble se détendre.

— Je suis navré, je ne voulais pas me montrer ingrat, finit-il par lâcher. C’est mon premier grand rôle, cette fois, je suis le héros. Ça me stresse un peu, vous comprenez ?

J’hoche la tête, ne souhaitant pas continuer davantage cette conversation.

— D’ailleurs, vous êtes mignonne, ils cherchent des figurants, si ça vous tente, c’est plutôt bien payé ! Bien mieux que femme de chambre. Tenez voici l’adresse, c’est demain. Passez-y ! Dîtes que vous venez de ma part.

— Merci. Mille merci.


Je gare la voiture dans l’allée devant la maison, encore incertaine de comment annoncer à maman pour la perte de mon emploi au Blue Café. À peine sortie, Charlotte vient à ma rencontre.

— Chris m’a invité à prendre un verre ! Tu t’en rends compte, dit-elle joyeuse, sautillant sur place.

— Mmm…

Je la pousse gentiment munie de mon sac à bandoulière.

— Qu’est-ce qui t’arrive ? Tu as pleuré ? Tes yeux sont rouges !

Ma soeur est perspicace, elle me connait. J’ai explosé en sanglots durant le trajet. La dernière fois que j’avais pleuré c’était lorsque j’ai appris que maman était malade.

— Chut ! Je te raconterai. Tiens, regarde ce que j’ai trouvé au boulot.

— La vache, des ballerines Valentino ! Ça coute un bras ces trucs-là ! crie-t-elle

— Je sais…

— Tu me les prêtes pour que je puisse me la péter au lycée ?

— Non ! On risque de t’agresser pour si peu ! On a besoin de cet argent, surtout que…

— Vas-y, balance ! Maman dort.

Je rentre dans le salon et m’affale sur le sofa, la tête entre les mains.

— On m’a viré du café…

— … T’es sérieuse ? Ils ne peuvent pas faire ça ! Tu es une des plus anciennes, dévouée, ce n’est pas juste !

— Eh ben si !

Je lui raconte pour ma nuit au café et la vidéo qui m’a trahie.

— Mais j’ai une solution, un client, tu sais celui qui a joué le second rôle dans Bye Bye Leonie, il m’a filé un tuyau, il y a des castings pour des figurants demain, ça pourrait marcher.

— Mais tu n’as aucune expérience dans ce métier-là ?

— Ce n’est pas comme si j’avais 10 000 solutions, je dois décrocher ce fichu rôle de rôle de figurant. Ça ne doit pas être si compliqué, non ?

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4 commentaires

Gufflet Pierre

-

Il y a 7 ans

Super

stanos974

-

Il y a 7 ans

Cool

Fanny, Marie Gufflet

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Il y a 7 ans

Merci

NC

-

Il y a 7 ans

Juste magnifique ! !! Bonne continuation
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