Fanny, Marie Gufflet LOVED Chapitre 1- Ava (partie 1)

Chapitre 1- Ava (partie 1)

Ava


« Le plus grand ennui, c’est d’exister sans vivre » Victor Hugo.


J’ai 25 ans. Ce qui correspond à 9125 jours passés sur terre, ça fait beaucoup, non ? Des jours irrattrapables, des heures irrécupérables, tel du sable écoulé dans un sablier géant : ma vie !

Pourtant j’ai le sentiment que pour un bon nombre d’entre eux, je n’ai fait qu’exister, survivre, courir sans arrêt, sans reprendre mon souffle. J’halète, mes poumons sont sur le point d’exploser, mais je n’ai pas d’autre choix que de continuer d’avancer ainsi. Courir comme si la fin est proche, continuer de survivre.

25 ans, un quart de siècle ! C’est censé être un bel âge, d’après maman.

Je ne suis pas une jeune femme à la beauté exceptionnelle, je n’ai rien de distinctif. Je suis plutôt dans la catégorie des banales, celles qu’on ne remarque pas réellement lorsqu’elles entrent dans une pièce. Il faut dire que je ne suis pas le genre de filles à se pavaner pendant des heures devant le miroir. Je n’ai ni le temps, ni le luxe de faire du shopping. Je mets les mêmes vêtements usés depuis le lycée que je customize parfois. Mes baskets me tiennent chaud au pieds jusqu’à ce qu’elles rendent l’âme !

AVA DAVIS, est mon nom, un nom qui sera vite passé au rang des oubliettes lorsque je partirai de ce monde, un jour ou l’autre, mais j’espère bien exister un peu avant, comme le préconisait Hugo.

J’adore lire, une de mes passions, une sorte d’échappatoire face à ce monde cruel. Dans l’encre noir, il y a toujours un peu de lumière pour réchauffer mon coeur. Les mots ont bercé mon enfance. Autant que je m’en souvienne, le salon de maman croulait et croule encore de livres écornés, de romans en tout genre, de recueils de poèmes. Notre bibliothèque est si remplie que, sur tout autre meuble, repose des bouquins : la table basse, le buffet, le panier près du sofa (même si ce n’est pas un meuble), la chaise au coin de la pièce…

Dans les livres, il y a tellement de possibilités. Au travers eux, je voyage vers des endroits paradisiaques, je suis ce que je désire être : une ballerine, une working girl, une star, un personnage de dessin animé…et pourquoi pas, une princesse. Après tout, dans la vraie vie, je ne suis qu’une fille banale.

— Ava, à table ! me crie ma petite soeur Charlotte.

— J’arrive…

Je referme le livre que je suis en train de lire, Demain est un autre jour de Lori Nelson Spielman. Pas mal du tout, me dis-je. J’aime assez ce genre de lecture, fraiche et pétillante, avec un brin d’humour, moi qui ne suis pas très marrante, d’après Charly.

Je referme la porte de ma chambre qui émet un étrange couinement. Il va encore falloir que je mette du dégrippant ! Cette maisonnée tombe en ruines un peu plus chaque jour. Je dévale les escaliers à toute vitesse, le bruit de mes pas assourdis par la moquette bleue. Maman est attablée avec nous ce soir, un sourire forcé sur ses lèvres en me voyant apparaître tout de noir vêtu.

— Chérie, tu travailles encore ce soir !

J’ai mis mon uniforme, celui que je dois porter lorsque je suis de service au Blue café.

— Yep ! Je prends mon service à 21 heures. On mange, j’ai faim ! dis-je, en me servant la première, une bonne cuillère de patates.

Le plouf de la purée dans mon assiette m’arrache un sourire. Je ne supporte plus de manger ainsi, mais c’est à peu près la seule chose dont sait faire Charlotte. Il faut vraiment que je lui apprenne à cuisiner ! Ce soir est son jour de corvée.

— Dans quelques mois, moi aussi, je commencerai un nouveau boulot. Ainsi, tu n’auras plus à cumuler deux jobs à la fois, annonce fièrement Charlotte.

— On en a déjà discutées, Charly, tu dois étudier ! Si tu veux devenir traductrice ou professeur, tu dois bosser dur tes études, pas te tuer à la tâche ! Laisse-ça pour moi. De toute façon, j’suis déjà trop vielle pour retourner à l’école et je n’aime pas étudier.

— N’importe quoi ! intervient maman.

Elle sait parfaitement que je mens. J’adore lire et apprendre. Mon rêve était de devenir professeur de Littérature ou documentaliste, mais la vie en a décidé autrement.

Je travaille depuis mes 17 ans pour subvenir aux besoins de ma famille. 8 ans où mon corps s’est habitué à rester debout pendant d’innombrables heures. 8 années à utiliser mes mains pour le bien-être des autres. 8 années à prendre des commandes, demeurer polie face à l’hostilité de certains clients, servir les tables encore et encore. Des jours entiers à faire les chambres pour une grande chaîne d’hôtel et des longues nuits à servir des plats délicieux pour de parfaits inconnus !

Ainsi, j’occupe ma vie à survire…

— Eh cocotte, faut vraiment que tu cuisines autre chose que de la purée !

— Ah ça va…j’ai quand même fait un steak avec. Du coup, ça fait un hachis Parmentier.

— Mais qu’est-ce qui ne faut pas entendre !

Charlotte a 15 ans. Elle et moi avons 10 ans d’écart, pourtant j’ai le sentiment d’avoir une jumelle. On est tellement semblables, mis à part la couleur de ses cheveux roux, on a la même frimousse, le même caractère, la même façon de réagir face aux situations. Moi aussi plus jeune, je me passionnais pour les langues, surtout le français. Je vois en elle l’avenir que j’aurai pu avoir. C’est pour cela que je sème en elle tout ce dont je possède pour sa réussite. Je n’ai pas envie qu’elle subisse déjà l’âpreté de la vie. D’une certaine façon, elle est ce coquillage, renfermant en elle un trésor inestimable : l’innocence que j’ai perdue.

Charly et moi, on est très fusionnelles, et ce, depuis sa naissance. Par manque de place, on a pris l’habitude de la faire dormir avec moi. Son berceau était collé à mon lit une place. Ensuite, on a opté pour un lit double, où l’on dormait blotties l’une contre l’autre. Alors un lien indéfinissable s’est tissé. Une amitié est née, un amour de soeur qui surpasse toute épreuve.

On se complète. On se comprend en n’échangeant que des regards. On partage des sourires équivoques, des blagues qui ne font rire personne d’autre que nous.

— J’ai acheté des mousses au chocolat pour le dessert, dis-je, plaçant les pots sur la table.

Charlotte ne cache pas sa joie en se frottant les mains l’une contre l’autre. Elle et le chocolat, c’est une histoire d’amour !

— Et toi, tu n’en prends pas honey ? demande maman.

— Non ! Je vais sûrement engloutir ce qui ne s’est pas vendu au café. Don’t worry mum !

La vérité est que je préfère me sacrifier, Charlie en a plus besoin que moi. Pas besoin de l’expliquer à maman, elle en a fait tout autant dans le passé. Aujourd’hui, c’est à mon tour de prendre la relève.

— Bon, dormez pour moi, je file ! dis-je. Charlie je te laisse faire la vaisselle. Ne dors pas tard !

— Eh arrête de jouer les mamans poules, c’est encore moi sa mère, réplique maman, en se tordant de rire.

— Bonne nuit les marmottes !

Tu as aimé ce chapitre ?

10 commentaires

Fanny, Marie Gufflet

-

Il y a 7 ans

Merci bcp

liora.h

-

Il y a 7 ans

Je découvre enfin ton histoire !! Mais quelle agréable surprise je suis fan du thème ! Belle plume au passage :)

Fanny, Marie Gufflet

-

Il y a 7 ans

Merci

charmed

-

Il y a 7 ans

Pas mal comme début, je vais découvrir la suite

Goetz

-

Il y a 7 ans

Pas mal mais attention de ne pas tomber dans le cliché de l’histoire

Célia Picard

-

Il y a 7 ans

J’adore !

alexia340

-

Il y a 7 ans

J aime bcp leur relation

alexia340

-

Il y a 7 ans

Dont sait faire charlotte.... que sait ... non ?

Fanny, Marie Gufflet

-

Il y a 7 ans

;-)

paul geister

-

Il y a 7 ans

Purée ava manger du chocolat ;)
Vous êtes hors connexion. Certaines actions sont désactivées.

Cookies

Nous utilisons des cookies d’origine et des cookies tiers. Ces cookies sont destinés à vous offrir une navigation optimisée sur ce site web et de nous donner un aperçu de son utilisation, en vue de l’amélioration des services que nous offrons. En poursuivant votre navigation, nous considérons que vous acceptez l’usage des cookies.